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Le Poisson belge, Conte aquatique et fantastique sur fond d’identité

Comment vivre dans un monde qui vous rejette parce que vous n’êtes pas dans la norme ? Tel est le point de départ de la dernière pièce de Léonore Confino. De son écriture ciselée et de son ton résolument décalé, l’auteure esquisse les contours d’un monde fantastique et onirique, refuge des âmes en peine. Joliment mise en scène par sa complice de toujours, Catherine Schaub, cette fable contemporaine interroge les douleurs de l’enfance, l’incompatibilité familiale et les questions d’identité. Bien que le sujet soit délicat à traiter, on est charmé par la simplicité du propos et par l’étonnante performance de

Comment vivre dans un monde qui vous rejette parce que vous n’êtes pas dans la norme ? Tel est le point de départ de la dernière pièce de Léonore Confino. De son écriture ciselée et de son ton résolument décalé, l’auteure esquisse les contours d’un monde fantastique et onirique, refuge des âmes en peine. Joliment mise en scène par sa complice de toujours, Catherine Schaub, cette fable contemporaine interroge les douleurs de l’enfance, l’incompatibilité familiale et les questions d’identité. Bien que le sujet soit délicat à traiter, on est charmé par la simplicité du propos et par l’étonnante performance de deux comédiens au diapason. Marc Lavoine, séduisant, tout en gravité et gaucherie, et Géraldine Martineau, en état de grâce, toute en finesse et exubérance. Magique !..

Alors que la salle est plongée dans le noir, une respiration hésitante se fait entendre. Le rideau se lève. La scène est presque nue. Côté cour, un banc sur lequel sont assis un petit bout de bonne femme (solaire Géraldine Martineau), au corps gracile, presque enfantin, et un cinquantenaire un peu triste (touchant Marc Lavoine), portant des boucles d’oreilles, emmitouflé dans un caban. Elle est une gamine en fugue à la recherche de chaleur, lui, une « grande » monsieur, en attente d’un rendez-vous qui ne vient pas. Ces deux -là semblent écorchés par la vie. Fragile et impertinente, la fillette sait toucher la corde du sensible. Manipulatrice, elle sait aussi se faire menaçante dans le seul but de capter l’attention, un geste de tendresse. Bourru et solitaire, l’homme semble agacé. Il aimerait être ailleurs, ne pas être obligé de faire la conversation. Toute présence extérieure autre que sexuée et violente lui est pénible, voire hostile. Pourtant, sous la carapace, son cœur bat. Le sourire espiègle et le ton libre de la jeune fille vont faire voler en éclats ses certitudes sur le monde qui l’entoure, son rapport aux autres, et lui redonner vie. Humain, il lui propose de l’héberger pour la nuit.

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Si tout semble opposer ces deux contraires, l’un est mutique, l’autre bavard, l’un vieux, l’autre jeune, l’un se rêve femme, l’autre poisson, leurs solitudes différentes et pourtant similaires vont les rapprocher. Au fil de leurs confrontations et de leurs dialogues, ils vont s’apprivoiser, se découvrir, se comprendre, se reconnaître et panser, sans le savoir, les blessures de l’autre. Rejeton de deux psychiatres surexcités et hystériques, qui se complaisent dans leur univers bruyant qui exclut « les autres », l’enfant asthmatique s’enferme chaque jour un peu plus dans le silence, rêvant un monde aquatique dans lequel elle développe des branchies. Rejeté par sa famille et ses proches pour aimer se travestir, l’homme est persuadé depuis sa plus tendre enfance « qu’une fille pousse clandestinement dans sa poitrine. »

Avec infiniment de délicatesse, de poésie et de malice, Léonore Confino s’attache à brosser un univers onirique, teinté de surréalisme, dans lequel ces deux êtres singuliers, en quête d’identité, vont s’aider à affronter la réalité, leur réalité, chacun se retrouvant dans l’autre. Alors que la mise en scène fine et précise de Catherine Schaub instaure une atmosphère oppressante, faite de respirations sourdes, de tons obscurs et de lumières froides, les dialogues décalés et les bons mots percutants de l’auteure contrastent et créent une intimité étonnante entre les deux protagonistes et le public, témoin privilégié de leur introspection.

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Si le décor est simple et sombre, l’intensité qui se dégage de la jeune comédienne, Géraldine Martineau, illumine littéralement la scène. La silhouette fine, elle virevolte, rayonne, déploie une force étonnante et fantastique qui touche en plein cœur. Sous le charme de sa partenaire, Marc Lavoine campe avec tendresse et modestie ce « grande » monsieur ténébreux, touchant et fragile. Les deux comédiens s’accordent parfaitement et donnent une note de fraîcheur et d’humanité à cette fable contemporaine sur l’identité, véritable hommage à la différence.

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

Le Poisson belge de Léonore Confino
La Pépinière Théâtre
7, rue Louis-Le-Grand
75002 Paris
A partir du 23 septembre 2015
Du mardi au samedi à 21h – matinée samedi à 16h
Durée 1h30 environ

mise en scène Catherine Schaub.
Avec Marc Lavoine, Géraldine Martineau

Crédit photos © Christophe Vootz

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