Un cache-cache, un théâtre à scène et ciel ouverts, une immobilité poétique dans la fourmilière. Le principe de Fake détonne : équipé d’un casque audio, le spectateur se fond dans la masse grouillante de la Canopée des Halles à Paris. Pas de parcours prévu, il se promène là où il souhaite. Dans ses oreilles, un comédien divague en direct et s’interroge sur la place des médias dans notre société.
On confie sa carte d’identité en échange d’un casque. L’expérience commence alors par un bulletin d’information de la radio. Puis, la voix d’Abbi Patrix résonne. Il n’est pas loin de nous, sous cette gigantesque structure, cette canopée qui recouvre cette Grand’Place du centre commercial des halles. On le cherche du regard, scrutant les coursives des trois étages. Se faufilant dans la foule dense, il se déplace à travers les espaces, le micro à la main. Celui d’abord du comédien voulant se faire entendre qui au fur et à mesure de l’expérience se révèle comme l’instrument d’un étonnant micro trottoir. Paré comme un journaliste, le comédien interroge les passants sur la pluie et beau temps, entre deux répliques philosophiques. Car, Fake le revendique, c’est une adaptation singulière du Peer Gynt d’Henrik Ibsen. Le personnage nous questionne sur notre rapport à l’identité, notre identité, qu’on vient de laisser pour un casque audio…
Comme le héros du dramaturge norvégien, notre conteur parcourt lui aussi différents mondes, apparaissant tantôt au balcon transparent surplombant les spectateurs, s’asseyant avec les poussettes sur un banc, enfin prenant les escalators, tel un seigneur, un roi, impassible, hiératique.
Pour accompagner le personnage dans son monologue, des musiciens, en direct aussi, livrent des courtes mélodies aux relents électros. Le concept du dehors est toujours excitant, mais le propos est parfois brouillé.
Marie Gicquel
Tous les jeudis du 9 mai au 27 juin 2019 à 20 h à la Gare de l’Est de Paris.