Audrey (douce Céline Perra) est dessinatrice pour enfant. Julien (tendre Roger Contebardo) est son éditeur. Entre eux, c’est une évidence, l’amour fou. Après un divorce difficile, le quarantenaire semble avoir trouvé la femme de sa vie. Tout semble simple, coulé de source. Depuis un an, la vie est belle. Mais l’horloge biologique se rappelle à la jeune femme, qui rêve de fonder une famille et d’avoir un enfant. Cette envie bouleverse la belle idylle. Les non dits, les blessures inavouées, les fêlures du passé qu’on n’ose pas dire, viennent tout abîmer, tout gâcher.
C’est sans compter Mona (inénarrable Tessa Volkine), la psychanalyste des deux, haute en couleurs, dont bien sûr l’autre ne connaît pas l’existence, son fils Sacha (charmeur Edouard Giard) et l’une de ses plus anciennes patientes (pétulante Caroline Brésard), qui n’est autre que la meilleure amie de Julien. Ce trio infernal et survolté va tout faire en sous-mains, plus ou moins discrètement, pour que tout finisse en un feu d’artifice émotionnel grandiose et heureux.
S’inspirant de ses rencontres avec Elsa Cayat, psychiatre et psychanalyste assassinée en 2015, David Basant, en collaboration avec sa complice Mélanie Reumaux, dresse le portrait d’une femme chaleureuse, virevoltante, qui ne jure que par la parole, la nécessité de dire les choses, de se libérer du poids des secrets, d’exprimer ses blessures, ses ressentis. Adepte des jeux de mots un brin tirés par les cheveux, croquant la vie à pleines dents d’un rire tonitruant, elle est une psy pas comme les autres, une grande sœur, une amie pour qui le bonheur des autres est le nécessaire, l’essentiel. Si ce vaudeville à l’humour facétieux fait bien sûr penser à Petites confidences (à ma psy) de Ben Younger, l’écriture vivante des deux comparses, émaillée de réparties tirées d’improvisations, rappelle sans conteste celle pince sans rire, un brin mélancolique de Woody Allen.
Porté par une mise en scène ciselée, une scénographie efficace et le jeu remarquable des comédiens, dont on retient tout particulièrement le charme piquant de Tessa Volkine et de Caroline Brésard, Pour le meilleur et pour le dire est une bien jolie bluette, drôle et sensible, qui rend un hommage vibrant, touchant à Elsa Cayat bien trop tôt disparue, ainsi qu’à tout ceux qui comme elle ont fait de leur existence, de leur métier, un sacerdoce pour aider les autres, les délivrer de leurs fantômes pour qu’enfin ils vivent heureux, sans entrave, sans peur. Une friandise théâtrale qui se déguste avec tendresse et sincérité. Une belle croisière au cœur des mots, qui malgré un démarrage poussif, finit par trouver son rythme enlevé.
Par Olivier Fregaville-Gratian d’Amore
Pour le meilleur et pour le dire de David Basant et Mélanie Reumaux
Café de la Gare
41 rue du Temple
75004 Paris.
Reprise du 25 septembre au 22 décembre 2024.
Durée 1h20.
La Manufacture des Abbesses
7, rue Veron
75018 Paris
Jusqu’au 2 janvier 2019
Les lundis, mardis et mercredis à 21h et les dimanches à 20h.
Trois relâches exceptionnelles les 23, 24 et 25 décembre.
Mise en scène de David Basant assisté de Clara Leduc
Distribution Café de la Gare : Tessa Volkine, Caroline Bresard ou Florence Hebbelynck, Roger Contebardo ou Matheo Capelli, Edouard Giard ou Virgile Daudet, Gaëlle Bourgeois ou Jenn Rihouey.
Distribution de la création : Caroline Brésard, Roger Contebardo, Edouard Giard, Céline Perra & Tessa Volkine
Scénographie d’Alain Lagarde
Éclairagiste : Pierre Peyronnet
Crédit photos © John Bersi