Premier émoi, premier baiser, les hormones du jeune Vincent sont en folie. L’obscur objet de ses désirs est un garçon. Comment à 14 ans interpréter ces signes, ces élans amoureux pour une personne du même sexe ? Avec simplicité, Yann Dacosta s’empare du roman de Thomas Gornet et signe une pièce touchante et nécessaire sur un sujet encore tabou chez les adolescents : l’homosexualité.
Physique d’endive, comme il le dit lui-même, blanc comme un linge, Vincent (surprenant Côme Thieulin) a 14 ans et entre en troisième. Avec sa meilleure amie Myriam (éblouissante Manon Thorel) et son pote Aziz (épatant Théo Costa-Marini), il s’apprête à affronter cette nouvelle année entre les railleries de son prof de sport et la bêtise crasse du « bogosse » beauf de sa classe. Chétif, malingre, il est une cible facile pour tous les « trouducs », les frustrés, ceux qui se sentent supérieurs, car dans la norme.
Avec humour et autodérision, il traverse les épreuves, s’amusant avec sarcasmes des préjugés des uns, du manque d’intelligence des autres. Mais tout bascule avec l’arrivée d’un nouveau venu, le beau et ténébreux Cédric. La boule au ventre, le cœur qui palpite, Vincent découvre avec stupeur et angoisse les sentiments qui sont en train de naître en lui. Sans repère, sous les quolibets idiots de ses camarades, il apprend à accepter son homosexualité.
Plongeant dans les chroniques adolescentes de Thomas Gornet, dans les pages de son journal intime, Yann Dacosta esquisse une belle et douloureuse histoire, celle d’une révélation, d’une quête d’identité. Dans un monde patriarcal hétéronormé, comment accepter d’être différent, d’aimer un être du même sexe ? Avec délicatesse et ingéniosité, s’appuyant sur la scénographie modulable de Grégoire Faucheux et les dessins de Hughe Barthe, il évoque le récit de cet apprentissage et permet à chacun, adolescent comme adulte, de mieux comprendre les tourments, les doutes qui assaillent les jeunes homos.
Ouvrant plusieurs pistes de réflexions sans pour autant les emprunter, la pièce, particulièrement adaptée avec un encadrement adéquat à être diffusée en milieu scolaire, touche par sa simplicité. Si elle peut manquer parfois de profondeur, de chair, elle a le mérite d’éveiller les consciences et peut-être, sait-on jamais, de changer à terme les mentalités.
Par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Qui suis-je ? de Thomas Gornet roman paru aux Editions du Rouergue
Festival d’Avignon le OFF
11. Gilgamesh – Salle 1
11, boulevard Raspail
84 000 Avignon
jusqu’au 27 juillet 2018
tous les jours à 14h40, relâches les 11 et 18 juillet 2018
Durée 1h
mise en scène d’Yann Dacosta
Avec Côme Thieulin, Manon Thorel et Théo Costa-Marini
Dessinateur : Hugues Barthe
Scénographiede Grégoire Faucheux
Lumièresd’Eric Guilbaud
Costumes de Corinne Lejeune
Vidéo de Camille Sénécal
Régie : Marc Leroy et Antonin Barteau
Compagnie Le Chat Foin
Crédit photos © Arnaud Bertereau