Les gestes sont déliés. Les mouvements maîtrisés pleins de grâce et d’espièglerie. En adaptant la pièce féerique de Shakespeare en ballet, le chorégraphe Jean-Christophe Maillot en respecte certes la trame, mais faute de s’appuyer sur les folles et délurées aventures des amants contrariés par le trublion Puck, en signe une version ultra classique qui manque quelque peu d’extravagance. Dommage !
L’écrin imaginé par Ernest Pignon-Ernest est des plus épurés. Seuls des parallélépipèdes blancs sont disposés ça et là sur la scène, rappelant les vestiges stylisés de quelques temples grecs. Statufiés, immobiles, les héros de ce songe attendent d’être réveillés par d’étranges gais lurons . Feux follets virevoltants, les artisans donnent vie aux protagonistes de la scène. Sous les regards amusés du duc Thésée et de sa femme Hippolyte, la douce Héléna est entichée du plaisant Démétrius, qui ne rêve que de la belle Hermia qui n’a d’yeux que pour le charmant Lysandre, qui l’aime en retour. Tout pourrait être pour le mieux, mais Egée, le père d’Hermia en a décidé autrement. Pour vivre pleinement leur passion, les deux amants n’ont d’autre choix que la fuite. La forêt enchantée à deux pas d’Athènes semble le lieu idéal. La nuit venant, les fées, les satires sortent de leurs tanières, prêts à jouer des tours pendables à tous ceux qui viendraient perturber leurs folles et endiablées bacchanales.
En déclinant le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare sous forme de ballet, Jean-Christophe Maillot ne s’y est pas trompé. Féerique, fantastique, riche en rebondissement, la pièce a tous les ingrédients nécessaires pour faire un grand et extraordinaire spectacle. Pourtant, malgré la virtuosité des danseurs, la ligne chorégraphique certes très classique mais parfaitement exécutée et virevoltante, l’ensemble ne captive pas autant qu’il devrait. Il y a un petit quelque chose, un manque de folie qui laisse en dehors, qui ne permet pas de se laisser totalement emporter par les volutes gestuelles, les arabesques magnifiquement dessinées dans les airs par les corps incroyablement souples des interprètes.
Si Le Songe de Jean-Christophe Maillot révèle quelques enchantements, quelques moments de grâce, quelques digressions drolatiques, si les musiques choisies (Felix Mendelssohn, Daniel Teruggi et Bertrand Maillot) ont de quoi séduire, plus d’entrain, de fantaisie, d’extravagance auraient certainement fini par nous entraîner dans cette aventure débridée où les cœurs battent la chamade à tort et à travers.
Par Olivier Fregaville-Gratian d’Amore
Le songe d’après l’œuvre de William Shakespeare
Théâtre national de danse de Chaillot
Salle Jean Vilar
Place du trocadéro
75016 Paris
jusqu’au 15 juin 2018
Mardi, mercredi et vendredi à 20h30, jeudi à 19h30 et dimanche à 15h30
Durée 2h00 avec entracte
Chorégraphie & mise en scène de Jean-Christophe Maillot
Musique de Felix Mendelssohn, Daniel Teruggi &Bertrand Maillot
Scénographie d’Ernest Pignon-Ernest
Costumes de Philippe Guillotel
Lumières Dominique Drillot
Conseiller et assistant à la mise en scène Des « Artisans » : Nicolas Lormeau
Avec 30 Danseurs
Sous La Présidence De S.A.R. La Princesse De Hanovre
Crédit photos © Alice Blangero