Avec la douceur des premiers rayons de soleil printanier, plus que jamais le festival Spring, porte bien son nom. Cette manifestation, dont c’est la 16e édition, se déroule durant cinq semaines dans différentes communes et lieux culturels de la Normandie. Sa programmation variée présente des créations de jeunes talents et d’artistes confirmés. Chacun peut y trouver son bonheur.
Pour le premier week-end, les propositions étaient nombreuses. C’est au Cirque-Théâtre d’Elbeuf que nous nous sommes rendus pour assister à deux représentations. Celle de Biographies de la Cie EA EO suivie de Ka-In du Groupe acrobatique de Tanger mis en scène par Raphaëlle Boitel. Il y avait du monde devant les portes des deux salles, des familles et des habitués du festival. On sentait la ferveur des premières sorties. Certains, programme à la main, se donnant des conseils, évoquaient leur emploi du temps à venir des prochains jours.
Biographies : un beau jeu de rime et de balles
La Cie EA EO, découverte à la dernière édition du festival Alba-la-Romaine avec Les fauves, présente leur nouvelle création, Biographies. Comme son titre l’indique, ce spectacle nous plonge dans l’intimité de la brillante jongleuse Neta Oren. La particularité de ce travail, mise en scène par Éric Longequel, est sa conception.
L’espace de jeu est très « intime », plaçant les spectateurs au plus proche du spectacle. Le comédien et rappeur Pierre Laloge s’installe sur un tabouret derrière une petite table. « Un, deux, trois, quatre, cinq » est la cadence de ce flow de mots qui accompagne les gestes et les pensées intérieures de la jongleuse. Dans un formidable ensemble, ils font entendre et percevoir le quotidien d’une jeune artiste. Il est question de son rapport au corps, l’entraînement, la répétition des mouvements, sa relation à ses balles, la conception d’un numéro… Derrière l’artiste, il y a la femme. Celle qui a fui un pays, rencontré l’amour et est devenu mère. Comment faire quand on est sans cesse sur les routes ? Puis vient une magnifique mise en abyme. Les deux artistes imaginent comment ce spectacle de « leurs trente ans » va grandir avec eux. Ils s’inventent alors une biographie fictionnelle tissée par ces moments partagés sur scène, sur les routes des tournées, une amitié. C’est beau.
Ka-In : un hymne à la jeunesse
La première apparition du Groupe Acrobatique de Tanger en 2007, à La Villette, avec Taoub, mis en scène par Aurélien Bory demeure gravée dans les mémoires. On découvrait qu’entre tradition, celle de leur art, mais aussi de leur culture, et modernité, celle du cirque contemporain et du monde actuel, il pouvait exister une bonne harmonie. Des thèmes que l’on retrouve dans ce nouveau spectacle, Ka-In, mis en scène par Raphaëlle Boitel.
Le spectacle démarre sur des jeunes qui traînent sur une place, un bord de mer, une rue, tous ces lieux de « rendez-vous » pour tuer le temps. Celui d’une vie sans véritable but. On écoute de la musique et on danse, mais on se croise aussi sans toujours dialoguer. Ces petits djinns (petits génies) se chamaillent, se répondent et défient les lois de l’apesanteur dans tous les sens. En filigrane, que l’on soit du côté de la tradition ou de la « modernité », cette problématique du vivre ensemble demeure. La parole est présente et l’on regrette, parce que c’est frustrant, qu’elle ne soit pas traduite, par un sous-titrage ou par des mots projetés. Jouant sur les clairs-obscurs, des jeux de lumières qui dessinent sur le sol des figures, des carrés et des lignes, Raphaëlle Boitel fait entrer le soleil marocain filtré par des persiennes.
L’univers des Acrobates de Tanger est là avec les numéros phares – comme la ligne humaine sur lequel l’une des acrobates se promène. Même si les artistes tendent de plus en plus vers la danse, ils n’en perdent pas leur aptitude à exécuter de formidables prouesses acrobatiques. Raphaëlle Boitel les amène aussi vers des instants plus poétique, comme cette bataille lumineuse avec les vagues de la mer ou ce numéro de trapèze en pleine tempête. Un spectacle riche en images et en émotions.
Marie-Céline Nivière, envoyée spéciale à Elbeuf
Festival Spring
Du 5 mars au 16 avril 2025
Biographies, texte Neta Oren, Éric Longequel et Pierre Laloge
mise en scène Éric Longequel
jonglage Neta Oren
rap Pierre Laloge
musique Jérémy Ravoux
regard extérieur Etienne Manceau
création lumière, conception et construction scénographie de Jules Guerin Jules Guerin
régie de tournée Erwan Sautereau
costumes Lorhanne Da Cunha
Durée 1h.
Création du 5 au 8 mars au Théâtre Cirque d’Elbeuf, (Festival Spring)
Pour les dates de la tournée cliquez ici
Ka-In, par le Groupe acrobatique d’Alger et Raphaëlle Boitelmise en scène et chorégraphie Raphaëlle Boitel
acrobates et danseurs Hamidou Aboubakar, Sidiki, Mohcine Allouch, Hammad Benjkiri, Zhor El Amine Demnati, Achraf El Kati, Bouchra, El Kayouri, Youssef El Machkouri, Mohammed, Guechri, Hamza Naceri, Kwatar Niha, Youssef, Salihi, Hassan Taher, Mohammed Takel.
Collaboration artistique, lumière, scénographie Tristan Baudoin
assistante mise en scène Sanae El Kamouni
création musicale Arthur Bison
coach chorégraphique et training Mohamed Rarhib, Vassiliki Rossillion
complice à la technique en création Thomas Delot, Nicolas Lourdelle, Anthony Nicolas,
renfort plateau et son Joël Abriac
direction technique Laure Andurand
direction du Groupe Acrobatique de Tanger Sanae El Kamouni.
Dans le cadre du Festival Spring :
5 au 8 Mars 2025 / (Premières) Cirque Théâtre d’Elbeuf
23 et 24 Mars2025 / CDN de Caen
5 et 6 avril 2025 / Théâtre de Dieppe, Scène nationale
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