Le « ou presque » du titre permet de comprendre que c’est une version exhaustive du chef-d’œuvre anglais. La pièce d’Isobel McArthur, adaptée en français par Virginie Hocq et Jean-Marc Victor, est politiquement incorrecte. C’est-à-dire irrévérencieuse, parodique et musicale. Pourtant, dans les grandes lignes, tout ce qui fait la grandeur d’Orgueil et Préjugés est bien présent.
Perfide Albion !

Pas facile d’être une femme dans l’Angleterre de cette fin du XVIIIe siècle. Quelle que soit sa condition, peu de droits lui sont accordés. Madame Bennet en sait quelque chose. Elle n’a que des filles. Si son mari décède tous ses biens reviendront à un mâle de la famille. Même s’il est un cousin lointain ! La seule solution pour éviter que ses filles se retrouvent sans rien et sans avenir, les marier. Mais, les donzelles possèdent des caractères bien trempés et des rêves de princes charmants. Ce n’est donc pas gagné !
Comme dans les séries télévisées Maîtres et serviteurs ou Downton Abbey, la pièce démarre avec les domestiques. Ces gens « d’en bas » (downstairs) qui observent tout ce qui se passent chez les gens de la haute société. Profitant certainement d’avoir la maison libre, les servantes, se parant des vêtements et des tics de leurs maîtresses et de leurs prétendants, vont narrer avec une belle ironie le destin de ses filles à marier. C’est irrésistiblement drôle.
Un cocktail de talents explosif

Toute la saveur de ce pudding réside dans sa recette : un texte finement mijoté à l’humour « so british », une mise en scène enlevée et des comédiennes de haut vol. Celles-ci vont se glisser dans la peau de plusieurs personnages, hommes compris (un travail de travestissement remarquable), chanter et danser. Incarnant l’inénarrable mère dépassée par les événements ainsi que l’imbuvable Darcy, Emmanuelle Bougerol mène le bal. Mais ne nous trompons pas, c’est une pièce chorale. Céline Espérin, Magali Genoud, Agnès Pat’et, Lucie Brunet (Denali) sont de magnifiques caméléons. Jouant de leur charme et de leur fantaisie, elles ne cessent de surprendre.
L’habile metteuse en scène Johanna Boyé a minutieusement réglé cette ronde infernale. Les magnifiques costumes de Marion Rebmann et les somptueuses perruques de Julie Poulain sont enfilés à la vitesse de l’éclair par les comédiennes, qui surgissent des coulisses ou de la salle. Ce rythme endiablé est porté par les arrangements musicaux de Mehdi Bourayou, interprété à la guitare électrique par Mélody Linhart, et les chorégraphies de Johan Nus. La bande-son du spectacle est une sélection de tubes aux paroles revisitées, allant de Lily Allen à Elton John, en passant par Queen, les Beatles, Eurythmic… Ambiance assurée dans la salle !
Marie-Céline Nivière
Orgueil et préjugés ou presque, d’Isobel McArthur, librement inspiré du roman de Jane Austen
Théâtre Saint-Georges
51 rue Saint-Georges
75009 Paris.
Jusqu’au 26 avril 2025
durée 1h30.
Adaptation française de Virginie Hocq et Jean-Marc Victor
Mise en scène de Johanna Boyé,
assistée de Stéphanie Froeliger.
Avec Emmanuelle Bougerol, Lucie Brunet, Céline Espérin, Magali Genoud, Agnès Pat’et Mélody Linhart.
Scénographie de Caroline Mexme
Lumières de Cyril Manetta
Costumes de Marion Rebmann
Perruques de Julie Poulain
Musique de Mehdi Bourayou
Chorégraphies de Johan Nus.