Des corps décharnés, des visages émaciés, des hommes, des femmes qui expirent, l’œuvre du peintre Jusepe de Ribera (1591-1652) entraîne le visiteur dans un monde où ténèbres et lumières s’affrontent et se confrontent magistralement. Empruntant ses modèles au réel et à la rue, il décale le regard et humanise allégorie et symbolisme. Né en Espagne, à Xàtiva, près de Valence, « Lo Spagnoletto » (l’espagnolet), surnom qui lui est donné en raison de sa petite taille, arrive en 1605 à Rome. Il a tout juste quinze ans et découvre le travail du Caravage, alors à son apogée. Se sont-ils rencontrés ? Rien n’est moins sûr. Il est toutefois certain que les clairs-obscurs profonds et intenses de cet aîné flamboyant et exalté vont le marquer et influencer sa pratique.
Drapés somptueux, chairs que l’on croirait vivantes ou vibrantes, les tableaux de Jusepe de Ribera fascinent et hypnotisent. Sujets religieux, métaphores des sens, exploration des mythes antiques ou mise en lumière de la vie ordinaire, de la misère, l’artiste déploie au fil de sa production prolifique, un style tant audacieux que rageur. Loin des académismes, il n’hésite pas à peindre la noirceur du monde ou à révéler la beauté d’un enfant des rues. Le sourire lumineux de l’enfant au pied-bot en est un des exemples les plus frappants. Ce tableau en fin de l’exposition ponctue magistralement une rétrospective exceptionnelle.
Du Reniement de Saint-Pierre à La Lamentation sur le Christ mort, de La Femme à barbe au Jugement de Salomon, l’œuvre de Ribera crue, théâtrale, mystérieuse ou énigmatique s’expose merveilleusement dans les salles du Petit-Palais. La galerie de ses Saints, tous prêts à sortir de la toile, tant ils semblent réels éblouit et envoûte. Avec plus d’une centaine de tableaux et de dessins exposés, cette première rétrospective française est l’un des événements de cet automne à ne pas manquer !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Ribera. Ténèbres et lumière
Petit Palais
Avenue Winston Churchill
75008 Paris
Du 05 novembre 2024 au 23 février 2025
