Fidèle du festival Cadences, organisé depuis vingt-deux ans en septembre à Arcachon, Blanca Li y était invitée cette année avec sa nouvelle création : une version chorégraphique de Didon et Énée. Petit flash back pour comprendre la genèse du projet. En 2023, à l’invitation de William Christie, directeur de l’ensemble baroque Les Arts Florissants, elle signe une chorégraphie de l’unique opéra d’Henry Purcell avec musiciens, chanteurs et danseurs se partageant la scène.
S’émancipant de cette première expérience, non sans avoir au préalable songé à utiliser un enregistrement de cette œuvre puissante, la nouvelle présidente de la Villette prolonge son travail avec une pièce chorégraphique. Créée à l’Opéra de Dijon en juin 2024, cette nouvelle proposition met en scène dix interprètes au lieu de six et se veut une digression autour de cette histoire d’amour tragique.
Réjouissant prélude
Si elle a nous a souvent habitués à brouiller les pistes avec exubérance, mélangeant les styles et la technologie, Blanca Li joue ici la carte danse contemporaine plutôt empreinte de sobriété. Allons-y pour l’épure si sa manière de donner à voir cette tragédie se révèle lisible. Ici, point de surtitres comme dans l’opéra, le livret doit s’incarner dans chaque interprète. Tout commence d’ailleurs très bien avec un réjouissant prélude, où les danseurs composent un mini-orchestre de chambre en mimant les gestes de la pratique instrumentale.
Mais la bonne impression du début tarde à se confirmer. Dans une scénographie très dépouillée, la danse se déploie avec fluidité mais sans grande originalité esthétique. Larges mouvements de bras, inclinaisons des bustes, la chorégraphie semble vouloir imiter le ressac des vagues.
Didon et Enée en maillots de bain
Pour évoquer la mer Méditerranée, toile de fond des amours contrariées de la digne Didon, reine de Carthage et de Énée, Troyen écartelé entre devoir et amour, des litres d’eau sont déversés sur le plateau noir qui devient un terrain d’exploration pour les danseurs en maillots de bain. Curieuse sensation d’avoir déjà trop vu ce procédé scénique. Les images affluent. Nombre de chorégraphes ont invité l’eau dans leur travail, telle Pina Bausch dans Vollmond dont on retrouve ici les chevelures lâchées et ondulantes au contact de l’élément aquatique.
Les tableaux s’enchainent sur ce parquet flottant. Cette Mare nostrum entraine déséquilibres et glissades rapidement répétitifs. Et malgré les magnifiques lumières de Pascal Laajili et les accents mélancoliques de la musique, on perd le fil conducteur de ce Didon et Énée dont l’universalité aurait dû pourtant émouvoir. Au théâtre Olympia à Arcachon, le public, lui, a salué la proposition par une standing ovation.
Claudine Colozzi – Envoyé spéciale à Arcachon
Didon et Énée de Henry Purcell
Vu le 19 septembre 2024 au Théâtre Olympia à Arcachon, dans le cadre du festival Cadences.
L’Espace chapiteaux de la Villette avec Chaillot-Théâtre national de la Danse
du 17 au 31 octobre 2024
Durée : 1h10
En tournée
31 décembre au 2 janvier 2025 au Théâtre de Liège (Belgique)
4 et 5 janvier 2025 au KVS de Bruxelles (Belgique)
9 et 10 janvier 2025 à la MC2 de Grenoble (38)
13 février 2025 au Cube Garges à Garges-lès-Gonesse (95)
19 mars 2025 au Théâtre Alexandre Dumas à Saint-Germain-en-Laye (78)
23 mars 2025 au Palais des festivals et des congrès de Cannes (06)
Mise en scène et chorégraphie de Blanca Li assistée de Déborah Torres Garguilo et Glyslein Lefever
Scénographie de Blanca Li avec la participation de Pierre Attrait assistés de Nina Coulais
Avec Alizée Duvernois, Victor Virnot, Julien Marie-Anne, Meggie Isabet, Maeva Lassere, Coline Fayolle, Gaël Rougegrez, Martina Consoli, Gaëtan Vermeulen, Quentin Picot
Musique enregistrée – Les Arts Florissants – William Christie
Enregistrement de la musique au Gran Teatre del Liceu de Barcelona
Lumières Pascal Laajili assisté de Jean-Luc Passarelli et Boris Pijetlovic
Costumes Laurent Mercier assisté de Ghjulia Giusti Muselli