Le Journal d'une femme d'Octave Mirbeau, mise en scène de Nicolas Briançon © Fabienne Rappeneau
© Fabienne Rappeneau

Lisa Martino, éblouissante dans « Le Journal d’une femme de chambre »

Après Paris et une belle tournée, qui se poursuivra l’an prochain dans toute la France, la comédienne se glisse avec délice, gouaille et piquant dans les mots acérés d’Octave Mirbeau, au Chêne noir à Avignon. 

Installée confortablement dans son tub d’étain, la charmante Célestine conte par le menu ses aventures de domestique chez les gens de la haute. De Paris à ce coin paumé de Normandie, où elle vient tout juste d’arriver, la brune soubrette, n’a ni les yeux ni la langue dans sa poche. Minois appétissant, formes généreuses et sens aigu de l’observation, elle brosse, dans son Journal d’une femme de chambre, le portrait peu reluisant de la bonne société. Tous ses maîtres et maîtresses n’ont qu’à bien se tenir, elle n’a pas fini de raconter leurs petits secrets et leurs gros travers. 

Née en Bretagne, la jolie Célestine perd son père alors qu’elle n’est encore pas plus haute que trois pommes. Battue par sa mère, elle monte à Paris pour se trouver une place. Ne restant jamais longtemps chez les gens, elle en voit des intérieurs, du beau linge, de belles argenteries et des âmes viles, putrides et puantes. Passant d’un vieux libidineux, fétichiste de bottines, à une bourgeoise de province, au ton pincé et à la radinerie maladive, elle n’en finit pas de mettre à nu leur perversité. 

Avec beaucoup de finesse, Nicolas Briançon porte au plateau cette œuvre magistrale et subversive de la littérature française et offre à l’excellente Lisa Martino un rôle magnifique. Jouant de la bonhomie et du sourire enjôleur de sa comédienne, le metteur en scène adoucit les angles sans pour autant atténuer le propos. Cruel, noir et sans concession, sur fond d’affaire Dreyfus, le pamphlet d’Octave Mirbeau n’a rien perdu de sa force et de sa lucide analyse de la nature humaine. Faisant étrangement écho à l’actualité la plus brûlante, complotisme, croyance dans les « fake news » – déjà à l’époque – , populisme et antisémitisme, ce Journal d’une femme de chambre est du beau théâtre comme on aime, touchant, drôle et terriblement acerbe ! 


Le journal d’une femme de Chambre d’Octave Mirbeau
Festival off Avignon
Théâtre du Chêne Noir
8 rue Sainte-Catherine
84000 Avignon

Du 29 juin au 21 juillet 2024 à 10h30 – Relâche les lundis
Durée : 1h20

Mise en scène Nicolas Briançon assisté d’Elena Terenteva
Avec Lisa Martino
Décor de Bastien Forestier
Costumes de Michel Dussarrat
Lumières de Jean-Pascal Pracht
Son d’Emeric Renard
Vidéo d’Olivier Simola

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