Pauline Hercule et Maxime Mansion © En Acte(s)
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Maxime Mansion et Pauline Hercule : « Les Contemporaines font entendre de nouvelles voix »  

Au TNP de Villeurbanne, pour la troisième année consécutive, le duo porte un festival faisant la part belle aux écritures dramatiques contemporaines.

Maxime Mansion : Il n’existe pas de lieu dédié à l’écriture contemporaine dramatique et à ses auteurs et autrices à Lyon. Il y a deux structures à l’origine du festival : EN ACTE(S), que j’ai cofondée, et les Journées de Lyon des autrices et auteurs de théâtre (JLAAT) qui existent depuis plus de trente ans et dont le comité réunit professionnels et amateurs. Nos structures sont les plus engagées sur ces questions. Nous réunir pour créer un événement commun était une nécessité.

En acte © DR
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Pauline Hercule :  Nous réunissons, au sein du même festival, un concours littéraire avec édition des textes lauréats, des lectures publiques et un laboratoire d’expérimentation et de rencontre. Littérature et jeu : le théâtre. Les cinq textes choisis par le comité de lecture des JLAAT sont publiés chez des éditeurs partenaires — Théâtrales, Lansman, Espace 34, L’Espace d’un instant, Koïné, etc. —. Chacun est également mis en espace par des équipes professionnelles de la région Auvergne Rhône-Alpes. La rencontre entre les équipes et les auteurs et autrices ouvre parfois des perspectives au-delà du festival.

Maxime Mansion : Les Contemporaines est aussi un espace de liberté, et le laboratoire porté par EN ACTE(S) répond d’un dogme singulier : écrire une pièce d’une heure maximum, pour cinq comédiens maximum, en faisant écho à l’actualité ou en pensant la nécessité de l’écriture. Pas plus de dix jours de répétitions, une création sur tréteaux sans régie son ni lumière : tout doit naître du plateau. Sur les cinq auteurs et autrices sélectionnés sur extrait et note d’intention, trois sont mis en lien avec des metteurs et metteuses en scène qu’ils ont pu proposer eux-mêmes. Les deux autres bénéficient d’un accompagnement dramaturgique dans l’écriture de leur texte. Ces laboratoires, qui ont bientôt dix ans, permettent de créer des rencontres délestées de contraintes de production, qui n’auraient probablement pas eu lieu dans un autre contexte et qui invitent les metteurs en scène à un pas de côté. Depuis peu, le concept est présent à l’île de la Réunion. 

Pauline Hercule : L’essence du spectacle vivant est le présent. Les auteurs et autrices contemporains en sont un moteur essentiel. La littérature dramatique représente un champ hybride dans lequel tout est possible et rien n’est totalement calibré. La parole d’aujourd’hui est inventive, multiple, inouïe, sauvage, vibrante, singulière, radicale. Elle porte les sujets du monde et donne un éclairage sur notre époque. Les thèmes des pièces du festival résonnent avec notre actualité brûlante : la dictature, l’écologie, l’amour, la solitude, la parentalité, la famille, le deuil… Travailler nos imaginaires, faire entendre de nouveaux récits, tout cela est essentiel.

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Maxime Mansion : Le festival offre un espace pour entendre ces voix nouvelles. Il est en outre nécessaire d’être attentif aux auteurs et aux autrices dans la mesure où leur statut reste précaire et inégalitaire. En 2017, l’étude sur la place des écritures contemporaines et des auteurs dramatiques vivants francophones indiquait que les textes contemporains, ceux écrits après 1950, concernaient 75% des spectacles du théâtre public, et que 64% d’entre eux avaient été écrits après 2001. Pour autant, les auteurs qui ne sont pas également metteurs en scène rencontrent de grosses difficultés à accéder aux outils de production sans passer par la mise en scène de leurs propres textes. Les auteurs-metteurs en scène représentent 61% des auteurs vivants joués. Pour l’écrasante majorité, il est donc impossible de vivre de leur écriture, malgré leur fonction centrale dans l’économie du spectacle vivant.

Maxime Mansion : Le festival dure deux semaines. Il se déroule dans plusieurs lieux de la métropole de Lyon comme le TXR, le Nid de poule et la médiathèque de Vaise, et principalement au Théâtre National Populaire, notre plus grand et plus fidèle partenaire.

Pauline Hercule : Nous proposons six soirées où deux textes sont joués mais limités à une heure maximum, suivis de bords de scènes avec les auteurs et autrices. Des temps d’échanges pour les professionnels sont prévus et permettent aux plus de cinquante artistes présents de partager sur leurs pratiques. Un salon du livre et des revues de théâtre, un DJ set littéraire et une table ronde sur le théâtre jeunesse viennent étoffer notre programmation. Nous menons également un partage des textes du festival auprès du publics scolaires à travers différents dispositifs mais aussi en faisant participer les jeunes professionnels du théâtre du GEIQ Compagnonnage ou de l’école d’Arts en scène.

Pauline Hercule : L’enjeu principal est le partage des textes dramatiques d’aujourd’hui auprès de tous les publics et la rencontre entre professionnels.

Maxime Mansion : C’est aussi changer de paradigme dans la création contemporaine actuelle, mieux répartir les pouvoirs face à la production et donner une meilleur visibilité aux sans qu’ils et elles dépendent d’un ou d’une metteuse en scène.

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Maxime Mansion : Difficile de choisir tant il y a de choses ! Les lectures et les labos évidemment : c’est toujours un moment magique quand les mots prennent vie au plateau ! Mais aussi les temps de rencontres comme le salon du livres des éditeurs de théâtre, où l’on découvre les ouvrages lauréats et le Connect#6 proposé par Artcena, qui réunit plusieurs structures nationales professionnelles engagées auprès des auteur et autrices. Cette année, nous innovons avec le DJ set littéraire au cours duquel la musique proposée par les auteurs eux-mêmes est accompagnée de textes inédits.


Les contemporaines
TNP-Villeurbanne
8 place Lazare-Goujon
69627 Villeurbanne cedec
du 31 mai au 8 juin 2024

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