Philippe Laudenbach © DR
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Philippe Laudenbach, la discrétion au service d’un grand talent

Le comédien, grand compagnon de route de Laurent Terzieff est mort à l’âge de 88 ans. Adieu Monsieur, vous allez nous manquer.

La première impression, lorsque vous croisiez la route de Philippe Laudenbach, était de le connaître déjà. Il y a des filiations qui marquent, dans la chair comme dans la voix. Cela l’amusait, parce qu’il en était fier et qu’il n’y pouvait pas grand-chose. Mais voilà, c’était ainsi, son oncle était Pierre Fresnay, connu en Marius chez Pagnol ou en Capitaine de Boeldieu de La Grande Illusion. La deuxième impression qu’il laissait ne tenait qu’à lui, et venait de sa silhouette aristocratique : son élégance, son visage si beau et si doux, sa voix si extraordinaire… Il a joué tant de rôles au cinéma, chez Resnais, Truffaut, Lelouch, Sautet ou Beauvois, sans parler des séries télévisées de la grande époque de l’ORTF.

Laudenbach - Marie-France de Valérie Lemercier © DR
Avec Hélène Vincent dans Marie-France de Valérie Lemercier © DR

Philippe Laudenbach était un seigneur, un de ces artisans du métier au parcours exceptionnel. Le regarder jouer procurait bien des joies, tant il était doué. Au théâtre, il a été avant tout au service des auteurs et des metteurs en scène. Il n’a jamais été un premier rôle, mais on a tant besoin de ces autres, ceux qui, par leur présence et leur talent, mettent l’ensemble en lumière. La liste des metteurs en scène pour lesquels il a travaillé, appartient à la mémoire du théâtre : Pierre Franck, Michel Fagadau, Georges Vitaly, Marcel Bluwal, Yves Gasc, Jean-Paul Roussillon, Jorge Lavelli, Stephan Meldegg, Bernard Murat, Nicolas Briançon

Laudenbach
Francine Walter et Philippe Laudenbach dans Le Lucernaire, 50 ans de théâtre de Laurent Tézé © Les Films d’un Jour

J’entends d’ici les puristes, les connaisseurs : et Laurent Terzieff ? Eh bien oui, Philippe Laudenbach est associé à tout jamais à ce grand homme. Ils avaient une relation toute particulière basée sur l’amitié. Leur collaboration a été longue et fructueuse, de Rubezahl, scènes de Don Juan à Moi, Bertolt Brecht en passant par Le Bonnet du fou. Je me souviens d’un soir, mon premier dîner avec Terzieff. Nous remontions la rue de la Gaîté, du Rive Gauche à un restaurant aujourd’hui devenu depuis un japonais. Les autres comédiennes et comédiens du spectacle marchent devant nous, pendant qu’Alain Terzieff évoque avec moi la dialectique brechtienne. Nous arrivons au restaurant. Pascale de Boysson nous tient la porte. Les autres sont déjà assis à la table. Je glisse à l’oreille de l’épouse de Terzieff, que « Brecht c’est bien, mais ça risque d’être chiant ! » Et là, ils éclatent tous de rire, Philippe Laudenbach et sa femme, l’adorable Francine Walter, en tête. On a oublié Bertolt et l’on a passé une soirée magnifique.

Philippe et Francine sortaient beaucoup, ils allaient applaudir leurs nombreux compagnons de route. Il nous arrivait de deviser sur le trottoir très longuement. Francine ayant un cours de théâtre, ils suivaient aussi les petits oisillons, comme Benjamin Bellecour, Nicolas SchmittLaudenbach était un être délicieux, toujours partant pour donner un coup de main aux autres et donner de son temps pour des lectures. Il était beau, délicat, attentif, généreux, discret. Ce n’est pas pour rien que Valérie Lemercier l’a choisi comme papa dans son film Marie-France. Voilà : on a perdu aujourd’hui un adorable papa de théâtre, et on a le cœur meurtri.

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