37 heures, c’est le temps nécessaire pour passer le permis de conduire sous la houlette d’un moniteur. Mais ici, si ce dernier connaît bien le code de la route, il ignore les règles de bonne conduite envers les femmes.
Camille, seize ans, est mal dans sa peau. Cette jeune fille en fleurs rêve du grand amour initiatique et libérateur. Son bel instructeur, Christian a tout pour faire l’affaire. Il cède aux regards de biche de la gamine. Ce prédateur sexuel va entraîner sa proie dans une spirale infernale. Nous sommes au cœur des sujets soulevés par le mouvement #MeToo. Pourquoi la victime a-t-elle continué à voir son tortionnaire et à subir ses actes ? Parce que face à la violence, le cerveau se met en état de sidération et se déconnecte. Des années plus tard, retrouvant la mémoire de cet épisode traumatique et, avec elle, la possibilité d’enfin libérer sa parole, Camille va oser porter plainte dans une colère toute justifiée : elle avait dit non et il n’en a pas tenu compte.
Inspiré d’une histoire veritable, le récit d’Elsa Adroguer bouleverse parce qu’il nous met en face d’une réalité insoutenable et soulève bien des questions. À l’image de sa mémoire blessée, elle fragmente son récit sans linéarité, passant du passé au présent. L’humour, qui ne fait pas de mal, passe par là quelques fois, aidant sa colère à résonner. S’appuyant sur une mise en scène dépouillée et ingénieuse, la comédienne, d’une grande sensibilité, fait surgir les maux à travers un jeu plein de nuances et de droiture. Rejoignant Le Consentement, L’Odeur de la guerre et Va aimer !, ce spectacle d’utilité publique est à voir absolument.
Marie-Céline Nivière
37 heures de et avec Elsa Adroguer
Théâtre La Flèche
77 rue de Charonne
75011 Paris
Du 3 avril au 5 juin 2024
Durée 1h15
Collaboration artistique de Mikaël Teyssié et Pauline Bertani
Dramaturgie d’Émilie Beauvais
Scénographie de Valentine Bougouin
Lumières de Paul Durozay, Matthieu Fays, Quentin Loyez
Création sonore de Matthieu Desbordes