À l’heure du crime et des règlements de compte, Thierry Klifa signe un face-à-face mordant, explosif entre l’impératrice incontestée du cinéma français, Catherine Deneuve, et un jeune et brillant rappeur au sourire ravageur, comédien très prometteur, Nekfeu. Esthétiquement réussi, l’alléchant long métrage perd de son éclat en raison notamment d’un scénario par trop bancal. Dommage !
Sous le soleil de plomb qui baigne Sète, des mondes très différents s’opposent et s’affrontent avec violence et férocité : celui de la pègre mafieuse et de la petite délinquance ; celui de la bourgeoisie décadente et du prolétariat rêveur ; enfin celui d’une mère autoritaire, dépassée, et d’une fille junkie, déjà abîmée par la vie. Tout pourrait bien se passer, si ces différents univers, ces conflits rentrés n’entraient pas en collision brutale suite à un accident mortel, un geste déplacé, une bagarre d’amants dissonants.
S’inspirant des chefs-d’œuvre de Techiné, de Cabrol, des polars américains à l’ancienne, Thierry Klifa et son complice Cédric Anger nous entraînent dans les tourments du crime, dans les dangers du chantage de circonstance. S’éloignant de tout réalisme, de toute véracité, ils content l’improbable rencontre entre une maîtresse femme, chef d’entreprise, et une petite frappe à la belle gueule. Se servant des rôles secondaires comme faire valoir, ils se concentrent sur le duel solaire et mortifère entre la grande Deneuve et le novice Ken Samaras alias Nekfeu.
Et, c’est d’ailleurs dans ces moments d’étrange complicité, de rencontres clandestines entre deux êtres blessés par la vie que ce singulier long-métrage dévoile ses plus beaux atouts. Bouleversant de justesse, l’étoile montante du rap français se révèle un acteur éblouissant. Tenant tête à la grande Catherine qui survole le film de sa présence évanescente, il déploie devant la caméra une palette impressionnante d’émotions. Captivant !
Si l’on dépasse les clichés, les fausses notes et les invraisemblances, on est séduit par quelques moments d’une rare intensité, comme les étreintes fougueuses et brutales entre Diane Kruger et Nicolas Duvauchelle, où les relations étranges, empoisonnées, entre une mère surprotectrice et sa fille dépressive. Mais, la vraie qualité de cette œuvre bancale réside dans l’esthétisme apporté à l’image. Thierry Klifa a ce don extraordinaire de graver sur pellicule de la poésie. Ainsi on se laisse subjuguer par les gros plans particulièrement saisissants du visage étincelant bien que fatiguée de la sublime Diane Kruger, du sourire fantomatique presque sépulcrale de la divine, bien que sous employée, Catherine Deneuve, enfin de la présence irradiante du fascinant Nekfeu.
Tout nous sépare n’a certes rien d’un thriller haletant, mais cache derrière de nombreuses maladresses, un film à l’ambiance ténébreuse et vénéneuse qui rappelle les polars noirs d’antan. Bien que dispensable, ce long métrage signe la naissance d’une nouvelle étoile du cinéma, l’épatant Ken Samaras.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Tout nous sépare de Thierry Klifa
Avec Catherine Deneuve , Nekfeu ,Nicolas Duvauchelle , Diane Kruger, Michael Cohen
Scénario de Thierry Klifa & Cédrix Anger
Production Mars Films
Sortie le 8 novembre 2017
Durée 1h38
Scénario de Thierry Klifa & Cédrix Anger
Production Mars Films
Sortie le 8 novembre 2017
Durée 1h38
Crédit photos © Mars Films