Pour fêter les vingt ans de la création de sa compagnie Vivarium Studio, Philippe Quesne reprend au Centre Pompidou La mélancolie des dragons, ce spectacle mythique créé en mai 2008 au Wiener Festwochen. À ne pas manquer !
© Martin Argyroglo
Avoir vingt ans ce n’est pas rien, et ça se fête ! En 2003, le metteur en scène, plasticien, scénographe, directeur de théâtre (Nanterre-Amandiers de 2014 à 2020 et maintenant la Ménagerie de verre), Philippe Quesne fondait sa compagnie. En juillet de cette année, il a présenté au Festival d’Avignon, à l’occasion de la réouverture de la carrière Boulbon, sa dernière création, Le Jardin des Délices. Mais il était impensable de célébrer l’événement sans poser une cerise sur le gâteau. En reprenant, pour quelques représentations exceptionnelles, le spectacle cultissime de sa compagnie, La mélancolie des dragons, l’artiste nous offre un magnifique cadeau.
Ovni théâtral démentiel
En 2008, c’est avec un certain émerveillement que les spectateurs avignonnais découvraient le travail de Philippe Quesne. Il ne fallait pas manquer l’événement. Le paysage de neige qui s’offrait à leurs yeux et le le vent de folie qui s’y promenait avait de quoi rafraîchir des festivaliers sous canicule. En avril 2009, au Centre Pompidou, puis février 2010 au Rond-Point sous l’impulsion de Jean-Michel Ribes, Paris accueillait Philippe Quesne et sa compagnie, triomphants. Nombreux furent conquis, atteints de « mélancolimania dragonnesque ». Le succès fut au rendez-vous.
L’ambiance de soirée d’hiver qui accueille le public saisit et fascine. La scène n’est plus qu’un champ de neige, entouré d’arbustes poudrés. Dans, un coin, lune caravane est installée, dans un autre, comme échouée, une vieille Citroën AX toute pourrie. Entassés à l’intérieur de la voiture, de drôles de gaillards chevelus écoutent à fond du hard rock. Ça décoiffe !
Arrive une petite dame en mobylette. Elle a l’air toute fragile et semble en danger face à ces gugusses. Mais il n’en est rien. Car les plus vulnérables ne sont pas ceux que l’on pense. Les canettes de bière à portée de mains, la sono braillant, ces hards rockeurs sont en réalité d’éternels enfants accrochés à leur rêve : la création d’un parc d’attractions pas comme les autres.
Comme un songe d’une nuit d’hivers
Il n’y a pas que l’esthétisme, pourvu d’images sublimes, qui séduit dans ce spectacle. Il y a la dramaturgie, faite de longs silences, de phrases jamais terminées ou commencées, souvent murmurées. La mélancolie n’a jamais autant trouvé sa place sur scène. Ces égarés, sorte de héros des temps modernes, courent après des chimères de pacotille, parce que notre monde n’a plus que cela à leur offrir.
Isabelle Angotti et ses chevaliers sans amure, Rodolphe Auté, Cyril Gomez-Mathieu, Émilien Tessier, Gaëtan Vourc’h (pour les anciens), Jean-Charles Dumay, Sébastien Jacobs, Victor Lenoble (pour les nouveaux), dans une perfection du faux non-jouer, embrasent l’univers merveilleux de Philippe Quesne. Et puis, il y a la vedette, le chien (à l’époque Hermès), qui improvise chaque soir sa prestation. S’il reste des places, n’hésitez pas et précipitez-vous. Au royaume des chimères, Il fait bon de rêver !
Marie-Céline Nivière
La mélancolie des dragons, conception, mise en scène et scénographie de Philippe Quesne.
Centre Pompidou – Festival d’Automne à Paris
Place Georges Pompidou
75004 Paris.
Du 9 au 17 décembre 2023.
Le samedi 9, lundi 11, mercredi 13, jeudi 14, vendredi 15, samedi 16 déc. à 20h, les dimanches 10 et 17 déc. à 17h.
Durée 1h20.
Avec Isabelle Angotti, Rodolphe Auté, Cyril Gomez-Mathieu, Jean-Charles Dumay, Sébastien Jacobs, Victor Lenoble, Émilien Tessier, Gaëtan Vourc’h.
Technique Marc Chevillon.