À l’occasion du lancement de l’édition 2023 du festival Danse dense, qui se tient du 21 novembre au 8 décembre 2023, Olivier Stora, qui a pris l’an passé la succession d’Émilie Peluchon à la direction de la plateforme, évoque l’importance d’un tel dispositif pour accompagner les artistes et les chorégraphes émergents.
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En quelques mots, pouvez nous explique ce qu‘est la plateforme Danse dense ?
Olivier Stora : Danse Dense est une plateforme de repérage et d’accompagnement dédiée aux chorégraphes émergents. Elle existe depuis maintenant presque 40 ans, et s’appuie sur une équipe réduite composée d’Aurélia Boitier, administratrice, Corinne Hadjadj, conseillère artistique et chargée de l’action culturelle, le soutien de stagiaires et d’alternants, et moi-même, à la direction depuis 1 an. Nous menons un important travail de veille pour détecter les chorégraphes dont les créations seront susceptibles de trouver un écho auprès du réseau professionnel et du public. Nous proposons aux 15 chorégraphes que nous accompagnons des parcours individualisés qui visent à leur donner les outils pour développer et structurer leur projet à la fois sur le plan artistique, dramaturgique, et sur le plan professionnel. Nous soutenons également la production et la diffusion de leurs créations. Enfin, nous œuvrons afin de rendre ces projets visibles auprès du réseau professionnel et du public.
Comme vous l’évoquez, vous venez d’arriver à la direction artistique. Quel projet souhaitez-vous défendre ?
Olivier Stora : Je souhaite défendre un projet multiculturel et porteur de diversités esthétiques et apporter de la visibilité aux artistes émergents qui nous livrent, avec leurs créations, leurs récits du monde, qui reflètent sa complexité. Ouvrir le projet de Danse Dense à l’échelle européenne est un pas dans cette direction. J’ai aussi l’envie de travailler sur la dimension collective du projet en réunissant régulièrement les artistes accompagnés par Danse Dense pour que nous réfléchissions ensemble aux problématiques qu’ils traversent dans le développement de leur activité professionnelle.
Comme nous n’avons pas de lieu dédié, ce projet ne pourrait se réaliser sans l’important soutien de notre réseau de partenaires, à Pantin où nous sommes implantés, en Seine-Saint-Denis, en Ile-de-France, en France, et, je suis en train de le développer, en Europe, avec notamment l’Abri à Genève, les Brigittines à Bruxelles.
Pouvez-vous nous parler du temps fort qu’est le festival ?
Olivier Stora : #lefestival est la partie visible de notre iceberg, de nos activités. Organiser un temps fort sur l’émergence chorégraphique c’est donner une visibilité à ce moment précieux du parcours d’un auteur, où il pose les fondations de son écriture. C’est aussi proposer au public un récit de notre monde par les jeunes générations d’artistes. C’est important à mes yeux de croiser ces regards sur le monde, ces narratifs. Inviter des artistes de différents pays y contribue. Dans cette édition de #lefestival, nous avons invité des créateurs français, suisses, lituaniens, ukrainiens, hongrois. Nous organisons aussi 2 plateformes professionnelles pendant #lefestival. Ce sont des moments dédiés aux créations en cours de fabrication. La première aura lieu le 30 novembre au Point Éphémère à Paris, avec Maya Masse, Renaud Dallet, Lili Buvat. La seconde, dédiée aux artistes d’Europe de l’Est et d’Europe centrale, aura lieu le 5 décembre à l’Atelier de Paris / CDCN, avec Lukas Karvelis, Vilma Pitrinaite, Yana Reutova et Nika Horiacha.
Quelle est la spécificité de votre première édition ?
Olivier Stora : J’ai souhaité une forte ouverture sur l’Europe. Elle se traduit par une attention particulière à la scène émergente Suisse, et à celle d’Europe de L’Est et d’Europe Centrale, co-construite avec Anne Sauvage, directrice de l’Atelier de Paris. J’ai souhaité également développer les séries qui concernent 5 spectacles sur les 13 du festival, car la diffusion de la danse se cantonne trop souvent à des représentations isolées, surtout pour l’émergence. Enfin, nous avons poussé l’articulation résidences de création / représentations qui concernent 3 spectacles cette année. Nous avons aussi 2 nouveaux lieux partenaires sur le festival (qui se déroulera cette année dans 9 lieux franciliens) La Ménagerie de Verre, et l’Atelier de Paris.
Comment choisissez-vous les artistes que vous programmez ?
Olivier Stora : Même lorsque nous présentons des premières pièces (5 sur le festival), elles résultent toujours de processus au long cours qui s’étalent sur plus d’une année. Ce sont déjà des écritures très abouties. Avant de se lancer dans la création de Magdalena, Chloé Zamboni a mené un laboratoire de recherche de plus d’une année, sur les variations Goldberg de Bach. Ces pièces m’interpellent en tant que spectateur. Elles m’intriguent, m’interrogent, me déplacent. J’essaie d’imaginer ce qu’elles peuvent provoquer chez d’autres. Workpiece, qu’Anna-Marija Adomaityte a créée après avoir travaillé quelques mois chez Mc Donald’s, nous transmet physiquement l’univers des fast foods, de leurs modes de consommation, de leur organisation du travail. Au-delà de cette subjectivité, je tiens compte de ce qu’elles représentent, de la vision du monde qu’elles nous apportent. Il y a une part d’intuition et de véritable élan que je confronte avec des critères d’objectivation que j’ai mis en place pour déjouer mes habitudes. Je dialogue aussi beaucoup avec mes coéquipiers de Danse Dense, les équipes des lieux d’accueil, les partenaires des projets, mes pairs.
Enfin ces représentations s’inscrivent dans une logique de parcours d’accompagnements structurés et interviennent à la suite de résidences, de présentations des travaux en cours dans les plateformes professionnelles. Max Fossati créera ainsi Inaccessible Vallée à la Nef à Pantin après y avoir été accueilli en résidence technique pendant 2 semaines, et après avoir présenté sa pièce en cours de fabrication lors d’une précédente plateforme professionnelle et lors d’1 km de danse, organisée par le CND à Pantin.
Que peut-on vous souhaiter ?
Olivier Stora : Mobiliser davantage de partenaires, pérenniser nos moyens et notre équipe, pour continuer à découvrir des artistes et des pratiques innovantes et sensibles, sont de véritables enjeux pour répondre aux besoins d’accompagnement et d’insertion de la jeune création chorégraphique contemporaine. Renforcer nos liens avec les lieux et partenaires qui nous permettent de connecter les artistes avec leurs publics, et, surtout, avoir un lieu dédié, le sont également.
Pour que la danse rentre dans la vie de chacun !
Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Festival Danse Dense
le Festival des formes chorégraphiques émergentes
Du 21 novembre au 8 décembre 2023