À l’Agora, à deux pas de la maison qu’elle a dirigée durant près de vingt ans, et avant d’investir la cloître des Carmes à Avignon, la chorégraphe mulhousienne porte au plateau des paroles de femmes face à leur quotidien. S’inspirant de la série réalisée par Valérie Urrea et Nathalie Masduraud pour Arte, Mathilde Monnier met en lumières avec épure et radicalité les violences conjugales, les agressions sexistes ordinaires, les brutalités subies verbales autant que physiques qui sont tristement le lot commun de toutes ses consœurs.
Au son des mouettes rieuses, alors que le manteau de la nuit recouvre le théâtre à ciel ouvert, huit silhouettes féminines prennent possession de la scène. Entre les fumeroles émanant de sorte de météorites, de pierres volcaniques stylisées, qui servent d’uniques éléments de décor, elles font face au public, refusent de baisser les yeux, de se taire encore et toujours, de faire semblant. La peur et la honte doivent changer de camp, le monde doit voir leur corps tordu, désarticulé, violenté. L’une après l’autre, elles déchirent l’obscurité, où elles étaient reléguées jusqu’alors, élèvent leur voix dans la lumière et exposent ouvertement leur meurtrissure. Le geste est puissant, nécessaire.
S’appuyant sur dix textes d’autrices repérées, reconnues comme Lola Lafon, Siri Hustvedt ou Alice Zeniter, Mathilde Monnier poursuit son exploration de nouveaux horizons artistiques, de nouvelles formes hybrides et signe, avec Black Lights, un uppercut scénique engagé autant que militant. Plus plastique et théâtral que véritable dansé, ce dernier opus, est un manifeste féministe, un objet scénique qui dit autant par les mots, les silences que par les gestes que l’époque a changé, qu’il est temps d’en finir avec le patriarcat crasse, avec le sexisme ambiant, avec le renvoi systématique de la femme à son sexe. Le poing levé, la tête haute et le regard droit, les huit interprètes – Aïda Ben Hassine, Kaïsha Essiane, Lucia García Pulles, Mai-Jùli Machado Nhapulo, Carolina Passos Sousa, Jone San Martin Astigarraga, Ophélie Ségala et l’incroyable Isabel Abreu – mettent K.O. l’injustice et le temps d’une soirée – au moins – renversent la vapeur !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Montpellier
Black lights de Mathilde Monnier, d’après la série télévisée d’Arte H24 de Valérie Urrea et Nathalie Masduraud
Création le 22 juin 2023 à Montpellier Danse
Agora, cité internationale de la danse
18 Rue Sainte-Ursule
34000 Montpellier
Durée 1h10
Tournée
du 20 au 23 juillet 2023 au Festival d’Avignon
du 30 novembre au 2 décembre 2023 au Théâtre de la Cité Internationale, Paris
les 17 et 18 janvier2024 à La Comédie, Clermont-Ferrand
les 26 et 27 janvier 2024 au TPR, ADN, La Chaux-de-Fonds, Suisse
les 7 et 8 février 2024 à la MC2, Grenoble
le 22 février 2024 aux Théâtre des Salins, Martigues
du 20 au 23 mars 2024 aux Subs, Maison de la Danse, Lyon
le 4 et 5 avril 2024 Le Quartz, Brest
Chorégraphie et mise en scène de Mathilde Monnier
Dramaturgie de Stéphane Bouquet
Scénographie d’Annie Tolleter avec l’atelier Martine Andrée, Halle Tropisme Dramaturge lumière – Éric Wurtz
Son de Nicolas Houssin, Olivier Renouf
Avec Isabel Abreu, Aïda Ben Hassine, Kaïsha Essiane, Lucia García Pulles, Mai-Jùli Machado Nhapulo, Carolina Passos Sousa, Jone San Martin Astigarraga, Ophélie Ségala