Depuis des années, Didier Caron nous régale avec ses comédies de mœurs, dans lesquelles il égratigne, gratte, chatouille les diverses et nombreuses névroses, peines et travers de tout un chacun. Il explore, avec beaucoup d’humour et de tendresse, les tendances qu’ont les humains à compliquer les choses, comme s’ils se refusaient à vivre heureux ensemble. En bon observateur de notre société, il sait en utiliser ses travers et ses mutations.
Boris (Christian Vadim) nous prévient dès le début de la pièce : il n’est pas toujours bon de donner un conseil à un ami. Surtout quand l’ami en question, est un énergumène comme Alain (Manuel Gélin). Dépressif, lâche, inconstant, immature, ce dernier possède tous les défauts pour appartenir à la catégorie des gens dont il faut se méfier.
Alain veut se séparer de Julie (Juliette Meyniac), on ne sait pas très bien pourquoi, et il est évident que lui-même n’en sait pas plus. En tout cas, ce n’est pas pour une autre. Comme il ne veut pas lui faire de peine, il demande des conseils à Bori, qui vit le grand amour avec Claire (Marie Fugain). Celui-ci est-il vraiment bien placé ? Pas certain. Comme il est délicat de dire à sa compagne que l’on veut se séparer pour personne d’autre, Boris préconise de s’inventer une liaison et surtout de ne pas dire le nom de cette personne ! Alain va bien suivre la première instruction… mais va faire n’importe quoi avec la seconde.
Avoir un bon copain, il n’y a qu’ça de vrai au monde
C’est là qu’intervient la bonne idée de l’auteur : dans la panique, ne sachant quoi répondre à sa femme, Alain désigne Boris comme étant l’homme de sa vie ! Ce coming-out improvisé va permettre de mettre en marche les ingrédients nécessaires à une bonne comédie, à savoir quiproquos, malentendus et rebondissements. Le style de Caron est assez léger et perspicace pour que l’on ne tombe jamais dans la caricature.
Les bouleversements qui traversent les personnages sont abordés avec justesse, tant dans l’écriture que dans l’interprétation. En cinquantenaire dépassé qui assiste au naufrage de sa vie, Christian Vadim est formidable. Il nous surprendra toujours ! En Droopy égaré dans un monde trop vaste pour lui, Manuel Gélin est redoutable. Toute en charme, Marie Fugain (en alternance avec Mathilde Penin) donne à son personnage de femme de tête de belles fragilités qui rendent crédible son revirement. Juliette Meyniac, toujours à son aise dans les personnages de naïves aux grands cœurs, est, elle, d’une irrésistible drôlerie. Le quatuor fonctionne et interprète avec justesse et un bon sens du comique chaque note de cette partition cocasse.
Pour orchestrer les échanges de cette belle distribution, la mise en scène de Didier Caron fonctionne à merveille. Le metteur en scène a pris le parti de montrer en un seul espace les deux appartements dans lesquels les personnages évoluent. S’appuyant sur le décor d’Edouard Laug, il met rapidement les codes en place pour que l’on ne s’y perde jamais. On peut même dire qu’il réinvente le claquage de portes ! Ne laissant aucune place aux temps morts, cette comédie menée de main de maître déclenche de grands éclats de rire aux spectateurs venus se divertir. Ce qui ne fait jamais de mal, surtout lorsque c’est aussi bien fait.
Marie-Céline Nivière
Un conseil d’ami, texte et mise en scène de Didier Caron.
Studio Marigny
Carré Marigny
75008 Paris
Jusqu’au 2 juillet 2023.
Du mercredi au samedi à 20h30, matinée samedi à 17h30 et dimanche à 15h.
Durée 1h30.
Avec Christian Vadim, Marie Fugain en alternance avec Mathilde Penin, Manuel Gélin et Juliette Meyniac.
Assistante à la mise Scène Bénédicte Bailby.
Costumes de Mathilde Penin.
Décor d’Edouard Laug
Lumières de Denis Schlepp.
Son d’Aurélien Bianco.
merci infiniment chère Marie-Céline ! la grosse bise. Didier.