À L’Isle-sur-la-Sorgue, la Villa Datris propose jusqu’au 1er novembre 2022 de (re)découvrir un savoir ancestral, revisité et réinventé par des artistes d’hier et surtout d’aujourd’hui, l’art de la céramique, le travail de l’argile. De Picasso à Théo Mercier en passant par Léger ou Mette Maya Gregersen, il est temps de Toucher Terre, de faire de Gaïa une inspiratrice pour demain.
Le soleil est à son zénith en ce week-end de l’Ascension. Les rues de L’Isle-sur-la-Sorgue sont envahies de touristes, de chineurs, de curieux, de badauds espérant trouver la bonne affaire dans les nombreuses boutiques de brocante et d’antiquité, qui font la célébrité de la cité dans le monde entier. Pour tous ces passionnés, mais aussi pour les novices, Danièle Kapel-Marcovici, fondatrice et présidente de la fondation d’art contemporain Villa Datris, invite à une balade, une rêverie autour de la sculpture céramique qui réunit sur quatre étages, ainsi que dans le beau jardin, qui entoure la magnifique bâtisse ocre, plus 130 œuvres réalisées par une centaine d’artistes.
Un autre regard sur le monde
Après avoir mis à l’honneur en 2018, l’art textile, le lieu bordé par la Sorgue se pare de ses plus beaux atouts faits de terre crue, de terra cotta ou de porcelaine. Dès l’entrée, des objets en trompe l’œil s’amusent à nous faire dépasser nos préjugés, à en briser les solides chaînes. Ringard pour beaucoup, occupation de grand-mères pour d’autres, la céramique casse les codes, réveille les appétits créatifs de nombreux artistes et revient en force depuis plusieurs années sur le marché de l’art contemporain. Puisant dans cet art ancestral, nombreux plasticiens interrogent par ce retour à la nature, les problématiques sociétales et écologiques, des sujets brûlants d’actualités.
Un art éclectique
Après plus de douze ans d’existence la fondation Villa Datris continue à surprendre, à explorer des sentiers que l’on croyait rebattus mais qui révèlent sous le regard expert de Danièle Kapel-Marcovici et de Stéphane Baumet, de surprenantes et de nouvelles voies. En s’emparant de cette matière qu’est la terre, Giséle Garric, Jean-Baptiste Bernardet, Catherine Bret-Browston ou Bartélémy Toguo propose certes de se reconnecter aux énergies et à l’essence même de la planète qui nous porte, mais aussi à dépasser les frontières du quotidien, du réel. Blouson reproduit en argile, vase stylisée aux moirés éclatants, créatures hybrides, pommier aux fruits rouge vif plus vrai que nature, fonds marins chimériques, frontispice de porcelaine entièrement réinventé, bonhomme vert recouvert de polyester ou mur de salle de bain avec double vasque questionnant à la manière d’un Duchamps le « ready-made », tout est matière au jeu, à rendre l’art vibrant, à offrir une vision fantasmée du monde, une fenêtre sur des ailleurs, des imaginaires.
Au-delà des apparences
Opaque, presque translucide, vernie, émaillée, lisse ou rugueuse, brute ou totalement retravaillée, la terre se mue, se transforme au contact des mains, des moules, des stylets utilisés par les artistes. Ocre, turquoise, violet ou noir, mat ou brillant, tout est fait pour attirer l’œil, questionner notre regard. Réparti en 6 thématiques et autant d’univers, les œuvres composent une exposition dense, riche autant qu’iconoclaste. Un moment suspendu entre singularité, beauté, intensité et loufoquerie !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Toucher terre
L’art de la sculpture céramique
Gratuit
Villa Datris
7, avenue des Quatre Otages
84800 L’Isle-sur-la-Sorgue
Jusqu’au 1eer novembre 2022
Crédit photos © Bertrand Hugues
