L'étang de Gisèle Vienne - Adèle Haenel © Estelle Hanania

L’enfer, c’est l’Étang

Au théâtre de Nanterre-Amandiers, Gisèle Vienne présente son adaptation très cérébrale de L’Étang, roman de jeunesse de Robert Walser.

L'étang de Gisèle Vienne - Adèle Haenel © Estelle Hanania

Au théâtre de Nanterre-Amandiers, après une belle tournée dans toute la France, Gisèle Vienne présente son adaptation très cérébrale de L’Étang, roman de jeunesse de Robert Walser. Dans un cube blanc immaculé représentant son espace mental, un jeune garçon, estimant être mal aimé par sa mère, simule un suicide espérant provoquer enfin un sursaut d’affection maternelle. 

Pénétrant à pas lents, voire lourds, sur le plateau, Adèle Haenel, toute de blanc vêtue, se glisse dans la peau de cet ado rongé par le mal-être. Modulant sa voix, métamorphosant ses expressions, ses attitudes corporelles, l’actrice donne vie à la schizophrénie vertigineuse de son personnage. Face à elle, Henrietta Wallberg incarne, avec un détachement glaçant, la figure tutélaire de cette mère distante, froide. Totalement enfermées dans un carcan sonore assourdissant et un jeu de lumières allant des tonalités les plus crues à d’autres fluorescentes, les deux comédiennes, à l’engagement sans faille, appuient leur jeu à l‘excès quitte à devenir inaudibles. À trop vouloir se détacher du texte, désincarner les rôles de leur chair pour les muer en idées, en pensées, à flirter avec des frontières trop expérimentales du théâtre, de la danse, l’effet intellectualisant, presque abstrait, s’avère contre-productif. L’ennui gagne une partie de la salle pour ne plus jamais la quitter. Reste la présence unique des deux artistes. Malheureusement cela ne suffit pas. 

Toujours aussi inclassable, la chorégraphe, plasticienne et metteuse en scène franco-autrichienne continue son exploration aux marges de l’art vivant. S’affranchissant des règles, brouillant toutes les frontières artistiques, elle signe un spectacle extrêmement performatif, un brin prétentieux, qui divise tant sur la forme que sur le fond. Certains seront subjugués ayant l’impression d’avoir assisté à un chef d’œuvre, d’autres déçus sortiront très dubitatifs pensant être passés totalement à côté de cet Étang trop sophistiqué pour véritablement séduire. À chacun de se faire son avis !

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

L’étang de Gisèle Vienne – D’après l’œuvre originale Der Teich (L’Etang) de Robert Walser
Chaillot, Théâtre National de la DanseFestival d’Automne 2023
1 place du Trocadéro et du 11 novembre
75016 Paris
Du 22 au 29 spetembre 2023
Du mardi au vendredi à 19h30, samedi à 17h, dimanche à 15h.
Durée 2h25.


Théâtre Nanterre-Amandiers
7 avenue Pablo-Picasso
92022 Nanterre Cedex
Jusqu’au 15 mai 2022.

Conception, mise en scène, scénographie, dramaturgie de Gisèle Vienne
D’après l’œuvre originale Der Teich (L’Etang) de Robert Walser
Avec Adèle Haenel, Henrietta Wallberg
Lumière d’Yves Godin
Création sonore d’Adrien Michel
Direction musicale de Stephen F. O’Malley
Musique originale de Stephen F. O’Malley, François J. Bonnet
Assistanat en tournée – Sophie Demeyer
Regard extérieur de Dennis Cooper, Anja Röttgerkamp
Traduction française de Lucie Taïeb à partir de la traduction allemande d’Händl Klaus et Raphael Urweider (éditions Suhrkamp Verlag, 2014)
Collaboration à la scénographie – Maroussia Vaes
Conception des poupées – Gisèle Vienne
Création des poupées – Raphaël Rubbens, Dorothéa Vienne – Pollak, Gisèle Vienne en collaboration avec Le Théâtre National de Bretagne
Fabrication du décor – Les ateliers de Nanterre-Amandiers
Décor et accessoires de Gisèle Vienne, Camille Queval, Guillaume Dumont
Costumes de Gisèle Vienne, Camille Queval & Pauline Jakobiak
Maquillage et perruques de Mélanie Gerbeaux

Crédit photos © Estelle Hanania

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