En voulant filmer au plus près l’intimité d’une comédienne reconnue à la carrière vacillante, Olivier Assayas signe un film esthétique, clinique mais qui manque d’âme et de profondeur…
Le synopsis : À 18 ans, Maria Enders a connu le succès en incarnant Sigrid, jeune fille ambitieuse et au charme trouble qui fascine et conduit au suicide une femme mûre, Helena. Vingt ans plus tard, à l’apogée de sa gloire, elle reçoit à Zurich un prix prestigieux au nom de Wilhelm Melchior, l’auteur et metteur en scène de la pièce qui, quelques heures avant la cérémonie, meurt subitement. On propose à Maria Enders de reprendre cette pièce, mais cette fois de l’autre côté du miroir, dans le rôle d’Helena.
La critique : Le nouvel opus d’Assayas s’attache à étudier tant psychologiquement qu’anatomiquement la vie d’une quarantenaire. Mais, pas n’importe laquelle, une actrice au sommet de son art, reconnue dans le monde entier, mais dont la carrière amorce son déclin. Aidée par sa charmante et troublante assistante, elle va tenter dans l’isolement d’un chalet relié au monde extérieur uniquement par internet et les nouvelles technologies de faire le deuil de son pygmalion ainsi que de sa jeunesse.
Dans ce quasi huis-clos vont s’affronter deux conceptions de la modernité, celle figée dans la nostalgie du rôle qui l’a rendue célèbre, et celle évolutive d’une jeune fille de son temps. D’un côté, Juliette Binoche, fidèle à l’image d’elle-même que les écrans nous renvoient depuis quelques décennies et de l’autre Kristen Stewart, sortie enfin de la saga Twilight, exceptionnelle et captivante dans le rôle qui lui est attribué. La présence de Chloë Grace Moretz, jeune étoile montante d’Hollywood, donne charme et piquant à la distribution de ce long métrage.
Malgré un scénario riche et intense, Olivier Asssayas n’arrive pas à faire décoller son film qui manque cruellement de profondeur et reste superficiel et froid. En voulant théoriser sur le métier de comédienne et ses affres (la peur de vieillir, de perdre son statut d’actrice adulée, de ne plus tourner de grands films), le réalisateur tient ses spectateurs à distance et les empêche de ressentir une quelconque émotion.
Le jeu de miroir entre le film et la pièce qui a révélé au public le talent de la comédienne Maria Enders est parfaitement orchestré et savamment dosé, entretenant le doute sur les véritables relations entre les protagonistes. C’est uniquement dans ce remarquable exercice de style que tout le talent d’Olivier Assayas se dévoile.
Bien que ce long métrage ne manque pas de charme et d’élégance, il n’en reste pas moins que l’ennui et la torpeur nous gagnent dans la pénombre des salles obscures. Au rythme lent de la vie en Suisse, le film s’écoule doucement suivant l’inexorable fuite du temps à l’image du phénomène climatique étrange qui donne son nom à la fameuse pièce qui sert de boucle dans la narration et dans la carrière de Maria Enders.
Trop cérébral, cet objet cinématographique n’est certes pas sans charme, le trio de comédiennes y étant pour beaucoup, mais manque d’incarnation… C’est bien dommage.
Réalisé par Olivier Assayas
Avec Juliette Binoche, Kristen Stewart et Chloë Grace Moretz
Date de sortie : 20 août 2014