Après des mois où la culture a été empêchée, suite aux restrictions sanitaires, le concours PODIUM – ex- (re)connaissance – revient les 19 et 20 novembre 2021 avec une 2e édition internationale qui fait la part belle à la créativité chorégraphique actuelle. Initié en 2009, par Le Pacifique – CDCN de Grenoble, la manifestation a pour objectif de donner une seconde chance à des pièces et des compagnies qui auraient peu tournées ou pas connues le succès mérité. Marie Roche, directrice du lieu, a accepté de répondre à quelques questions.
En quelques mots, pouvez-vous nous expliquer la genèse de Podium ?
Marie Roche: Le concours, anciennement connu sous le nom (re)connaissance, existe depuis 2009 et réunit l’expertise d’un groupe de structures culturelles qui repèrent des compagnies de danse contemporaine sur leur territoire, et souhaite leur apporter un soutien et une visibilité nationale. Il s’est transformé en 2019, lors de la 10ème édition, en devenant PODIUM pour répondre au mieux aux difficultés rencontrées par les compagnies en termes de diffusion et de durée de vie trop courte des créations chorégraphiques. Devenant biennale pour intégrer les tournées des lauréats, il a maintenant pour objectif de dynamiser la diffusion de la danse en offrant un tremplin à des œuvres chorégraphiques, qu’elles soient récentes ou non, d’élargir des possibilités de diffusion et de circulation sur un territoire national et européen.
Quelles sont les spécificités du concours ?
Marie Roche : L’objectif du concours PODIUM est de dynamiser de la diffusion de la danse contemporaine et de réfléchir à une coopération territoriale vertueuse en termes de bilan carbone.
Concrètement, les partenaires ainsi que leurs théâtres voisins, accueilleront au minimum un des quatre lauréats du concours pour au moins une représentation la saison suivante. Nous encourageons ainsi des tournées ayant une cohérence géographique, permettant à chacun de profiter des avantages financiers d’une tournée.
PODIUM initie des pratiques coopératives et vertueuses en matière de développement durable dans le champ chorégraphique. En impulsant des logiques de tournées territoriales, en diffusant dans la durée des pièces insuffisamment jouées, en participant à la transformation des pratiques professionnelles, PODIUM œuvre au développement d’une société plus soucieuse d’écologie et de durabilité.
L’ensemble des partenaires de PODIUM veille également à la parité des directions artistiques entre femmes et hommes lors de ses choix et de la sélection.
Après une année covid, comment cette édition prend ses marques et s’inscrit dans le paysage grenoblois ?
Marie Roche : PODIUM est une coréalisation du Pacifique – CDCN (Centre de Développement Chorégraphique National) de Grenoble et de La Rampe – La Ponatière, scène conventionnée d’intérêt national Art et création – Danse et Musiques à Echirolles avec le soutien du CCN2, Centre Chorégraphique National de Grenoble. Ce partenariat entre nos trois labels associés à la danse nous semblait évident pour renforcer nos complémentarités et proposer un rendez-vous chorégraphique important dans la métropole. PODIUM est une grande fête de la danse qui réunit publics et professionnel·les (1200 personnes attendues). Cette dynamique territoriale a permis d’en faire un événement extrêmement suivi par les grenoblois·es, le vote des spectateurs fondant ce lien indéfectible entre le concours et son public fidèle. D’autant que cette année, le public attribuera non pas un, mais deux prix, un par soirée. Après une année de privation de spectacles pour les publics et deux saisons totalement perturbées pour les organisateur·trices et les artistes, le concours PODIUM s’annonce d’ores et déjà comme un événement important et attendu dans la Métropole grenobloise et au-delà.
Comment se fait le choix des artistes et des œuvres que vous sélectionnez ?
Marie Roche : Ce sont les 17 partenaires qui opèrent la sélection. Chacun·e fait une ou plusieurs propositions de pièces dont il·elle est persuadé·e qu’elles ont un fort potentiel, mais qu’elles n’ont pas été assez vues que ce soit par les professionnel·les ou par les publics. Solos-duos ou pièces de groupes, cette sélection propose des spectacles pouvant être accueillis sur petits et grands plateaux afin d’élargir le réseau de diffusion de la danse contemporaine.
Pour cette édition, évidemment, ces critères ont pris un autre relief en considérant toutes ces créations qui n’ont pas pu avoir lieu pendant ces deux saisons perturbées par la pandémie. L’ensemble du réseau s’est mobilisé pour proposer des pièces qui n’ont pas été vues ou dont les tournées ont été annulées. Nous avons reçu une quarantaine de propositions (contre 30 les éditions précédentes). Nous nous sommes réuni·es début avril pour procéder à la sélection par vote en tenant compte également de la parité.
Avec 9 nationalités présentes, cette édition de PODIUM est résolument tournée vers l’international. Cette sélection choisie collectivement par les partenaires, offre une diversité d’esthétiques et de langages chorégraphiques, du solo à la pièce de groupe, en invitant parfois le texte, le chant, l’humour, ou bien encore en creusant des sujets éminemment politiques qui font écho à notre actualité ou à notre humanité.
Pourquoi la diffusion vous semble essentiel à ce jour ?
Marie Roche : Cette 2e édition de PODIUM est particulièrement attentive à montrer des pièces dont la diffusion a été stoppée avec la crise sanitaire.
Le secteur culturel vit une problématique aiguë à ce stade de la reprise. Les créations d’avant la crise sanitaire n’ont pu être diffusées. Pendant ces longs mois de fermeture, les artistes ont continué de créer. Du côté des organisateur·trice·s, les nombreux reports saturent les programmations des prochaines saisons. Il s’en suit un véritable embouteillage où beaucoup de créations risquent d’être balayées à peine écloses. La danse, déjà insuffisamment représentée dans les saisons, s’en trouve encore davantage fragilisée.
Alors qu’une étude de l’ONDA en octobre 2019 montrait bien les difficultés de diffusion des spectacles de danse contemporaine (près de 24 % n’ont été présentés qu’une seule fois en 5 ans), PODIUM propose aux profesionnel·les de programmer des spectacles de danse et les aide à développer des pratiques vertueuses à travers des dynamiques de tournées territoriales, qui ont en plus l’avantage de faire baisser les coûts (et par la même occasion le bilan carbone). Le fait que les œuvres lauréates soient sélectionnées par des professionnel·les, mais aussi par le public rassure certains partenaires, notamment celles et ceux qui diffusent peu de danse.
Comment avez-vous formé le jury et quel est sa mission ?
Marie Roche : Le jury est composé d’une artiste, d’une programmatrice danse, d’un programmateur généraliste, d’une journaliste et d’une personnalité du monde de la culture. Comme pour le choix des œuvres, les 17 partenaires font une ou plusieurs propositions de personnes pour chaque catégorie de juré et procèdent à la sélection par vote. Ce jury diversifié représente le regard professionnel du secteur. Il décerne un prix pour les solo-duo et un prix pour les pièces de groupe. Les pièces lauréates se verront offrir un ensemble de représentations chez les partenaires et leurs théâtres voisins la saison suivante (2022-2023).
Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
PODIUM 2e édition
19 et 20 novembre 2021 à La Rampe – La Ponatière, Scène conventionnée danse et musiques à Echirolles
Crédit photos © Ariel Tagar, © Hervé Veronese, © Pierre Ricci, © Valerio Figuccio, © Flurin Bertschinger et © Céline Roze