À Avignon, Jan Martens entre dans la cour des grands. S’inspirant des mouvements de foule, de contestation et des manifestations de ces dernières années, il s’attaque, pour la première fois, à une pièce de groupe et invite les corps de tout âge et de toute morphologie de ses danseurs à entrer en résistance contre les règles établies, à sortir du rang.
Ciselant l’espace, tranchant l’air de mouvements secs, son écriture précise, minutieuse, influencée par les grammaires radicales, sans concession d’Alain Platel, de Boris Charmatz, d’Anne Teresa de Keersmaeker ou de Lucinda Childs, le chorégraphe belge se laisse porter par la musique entêtante, sans fin du compositeur polonais Henryk Górecki. Elle sert de support à cette pièce qui fonctionne par cycles, par gestes répétés, par phénomènes de déjà-vus, mais dont un infime décalage en modifie la structure, la cadence, l’harmonie.
Reprenant des thématiques qui lui sont chères, comme la question de genre, le rapport à l’autre, les sujets sociétaux, Jan Martens imagine une danse qui transcendance les soulèvements de protestation actuels. Au fil de la pièce, l’individu isolé devient foule, le gris morose de la normalité passe au rouge vif de la révolte. On peut regretter çà et là quelques facilités, quelques longueurs, mais, il n’y a qu’à voir le public debout, la standing ovation qui est réservée chaque soir aux dix-sept danseurs, tous excellents, pour comprendre que le prodige belge touche juste.
Avec Any Attempt Will End in Crushed Bodies and Shattered Bones – Toute tentative se soldera par des corps broyés et des os brisés, mots prononcés par le président chinois XI Jinping lors des manifestations de Hong Kong en octobre 2019 – Jan Martens signe un spectacle exigeant autant que populaire avec des défauts à la marge, mais de belles qualités. Séduisant la majorité des spectateurs, laissant de côté les autres, il donne à la cour du Lycée Saint-Joseph, quelque peu endormie en cette 75e édition, une deuxième vie plutôt réjouissante.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
any attempt will end in crushed bodies and shattered bones de Jan Martens
Festival d’Avignon
Cour du Lycée Saint-Joseph
Rue des Lices
84000 Avignon
Jusqu’au 25 juillet 2021 à 22h
Durée 1h40 environ
Tournée
Du 28 au 29 août 2021 à Amsterdam – Internationaal Theater Amsterdam
Du 10 au 12 septembre 2021 à Genève – Pavillon de la Danse
Le 18 septembre 2021 à Porto – Rivoli – Teatro Municipal do Porto
Du 13 au 14 octobre 2021 à Toulouse – ThéâtredelaCité – CDN
Le 20 octobre 2021à Charleroi – Charleroi danse
Du 22 au 23 octobre 2021 à Anvers – deSingel
Le 27 octobre 2021 à Turnhout – Cultuurhuis De Warande
Le 28 octobre 2021 à Utrecht – Stadsschouwburg – Utrecht
Le 16 novembre 2021 à Angers – Centre National de la Danse Contemporaine – Angers
Le 10 décembre 2021 à Gent – Vlaamse Opera Gent
Le 11 décembre 2021 à Bruges – Concertgebouw Brugge
Le 18 janvier 2022 à Louvain – 30CC Schouwburg
Du 28 au 29 janvier 2022 à Oslo – Dansens Hus Oslo
Du 1 au 2 février 2022 à Stockholm – Dansens Hus Stockholm
Du 4 au 5 février 2022 à Umeå – NorrlandsOperan
Du 4 au 5 mars 2022à Düsseldorf – Tanzhaus NRW
Du 10 au 11 mars 2022 à Strasbourg – Le Maillon
Du 19 au 20 mars 2022 à Barcelona – Mercat de les Flors
Le 5 avril 2022 à Orléans – La Scène nationale d’Orléans
Le 8 avril 2022 à Ibos – Le Parvis
Du 24 au 25 mai 2022 à Londres – Sadler’s Wells Theatre
Chorégraphie Jan Martens
Avec Ty Boomershine, Truus Bronkhorst, Jim Buskens, Baptiste Cazaux, Zoë Chungong, Piet Defrancq, Naomi Gibson, Cherish Menzo, Steven Michel, Gesine Moog, Dan Mussett, Wolf Overmeire, Tim Persent, Courtney May Robertson, Laura Vanborm, Loeka Willems en alternance avec Pierre Bastin, Georgia Boddez, Zora Westbroek
Collaboration artistique – Anne-Lise Brevers
Lumière de Jan Fedinger assisté de Vito Walter
Costumes de Cédric Charlier, Thibault Kuhn, Alexandra Sebbag
Regards extérieurs – Marc Vanrunxt, Renée Copraij, Rudi Meulemans, Siska Baeck
Musiques additionnelles de Henryk Górecki, Kae Tempest, Max Roach, Abbey Lincoln
Texte extrait de Spring de Ali Smith avec la permission de Wylie Agency
Crédit photos © Christophe Raynaud de Lage