Dans le cadre de June Events à l’Atelier de Paris, Gaëlle Bourges questionne notre rapport à l’art, à la beauté, ainsi qu’à la restitution des œuvres à leur pays d’origine. Partant de l’histoire des cariatides soutenant le portique du temple d’Érechtheion, qui ont été démantelées pour rejoindre les collections du British Museum, la chorégraphe francilienne signe une pièce politique, épique autant que sensible. Plongée dans l’intimité créatrice d’une artiste passionnante et engagée.
Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Un spectacle d’Holiday-on-Ice – donc des gens en costumes à paillettes qui glissent sur la glace – je devais avoir 5 ans. C’était le spectacle de l’Arbre de Noël organisé par le comité de l’entreprise où travaillait mon père. Chaque enfant recevait un sac rempli de bonbons, en plus du spectacle.
Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
Ne pas faire un métier « normal », ne pas avoir une vie « normale », ne surtout rien faire de « normal ».
Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être danseuse et chorégraphe ?
La danse était ce qu’il y avait de plus accessible pour moi. Je ne savais pas ce qu’était l’art, j’aimais juste danser, et je pouvais danser sans trop d’effort pour mes parents : il y a toujours un cours de danse à côté de là où on habite, même dans les petites villes.
Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ?
Mon premier gala de fin d’année – j’avais encore 5 ans. Je portais un pyjama – c’était le costume de scène – et un baigneur en plastique dans les bras, que chaque enfant devait bercer en rythme sur la musique. J’étais très appliquée, puis soudain j’ai vu les poussières voler dans la lumière des projecteurs et j’ai été hypnotisée.
Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Pas de souvenir d’un seul coup de cœur, mais plutôt un empilement de souvenirs marquants : un des premiers travaux de Xavier Leroy, dont j’ai oublié le nom ; Nom donné par l’auteur de Jérôme Bel ; Pièces distinguées de La Ribot ; Lisa Nelson et Steve Paxton improvisant ; La sorcière de Mary Wigman dansée par Latifa Laâbissi ; les films des danses courtes de Valeska Gert ; les photographies de Nijinski en faune ; celles d’Isadora Duncan sur l’Acropole ; Denis Lavant dansant à la fin du film Beau travail de Claire Denis ; Con forts fleuve de Boris Charmatz ; Love de Loïc Touzé ; des fragments de spectacle d’Yves-Noël Genod, de Joris Lacoste, de Jennifer Lacey, …
Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Avec la lecture.
En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
C’est surtout une façon de vivre, plus qu’un métier. La preuve : je suis loin d’avoir toujours gagnée ma vie en l’exerçant.
Qu’est-ce qui vous inspire ?
Des livres.
De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Je pourrais m’en passer. Mais je ne peux pas me passer de lire, ni d’aller au cinéma.
À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Joker. Je trouve la question trop romantique.
Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Je travaille déjà avec tous les artistes importants pour moi, parce que parmi ceux que j’aime le plus, beaucoup sont morts déjà. Je peux donc travailler avec eux sans leur demander leur avis : c’est pratique.
À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Je me méfie des projets fous, je préfère les projets discrets.
Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
Histoire de ma vie de George Sand, qui est donc l’histoire de sa vie, disponible en 2 tomes dans La Pléiade.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
OVTR (ON VA TOUT RENDRE) de Gaëlle Bourges
June Events
Atelier de Paris
Conception & récit de Gaëlle Bourges
Avec des lettres de Lord Elgin, Giovani Batistta Luisieri, le révérend Philip Hunt, Mary Elgin, François-René de Chateaubriand, …
Extraits de discours de Melina Mercouri, Neil Mac Gregor & Emmanuel Macron
Traduction des lettres anglaises : Gaëlle Bourges, avec l’aide d’Alice Roland & Gaspard Delanoë
Avec Gaëlle Bourges, Agnès Butet, Gaspard Delanoë, Camille Gerbeau, Pauline Tremblay, Alice Roland, Marco Villari & Stéphane Monteiro a.k.a XtroniK (musique live)
Lumière d’Alice Dussart
Musique de Stéphane Monteiro a.k.a XtroniK
+ The Beatles, David Bowie, Kate Bush, The Clash, The Cure, Marika Papagika & The Sex Pistols
Coiffes des cariatides, moulages, couture, dorure, plume : Anne Dessertine
Crédit photos © Kit Brown, © DR et © Danielle Voirin