Au cœur du XXe arrondissement, à deux pas du métro Saint-Fargeau, à l’emplacement de l’ancien Théâtre Est Parisien et du Tarmac, Théâtre Ouvert a trouvé refuge et fait peau neuve. Poutres apparentes, sol en béton armé poussiéreux, scène à nu, petit à petit, le lieu se réinvente sous l’impulsion de Caroline Marcilhac, directrice du centre national dédié aux dramaturgies contemporaines.
Le ciel est couvert en cette matinée de janvier. La pluie drue, froide, tombe sans interruption. Devant le 159 avenue Gambetta, des tôles grises cachent l’entrée. Difficile dans ces conditions de découvrir la façade en bois noir nouvellement installée. Des collants blancs recouvrent les portes vitrées empêchant les curieux de jeter un œil à l’intérieur. Regard bleu pétillant, serein, Caroline Marcilhac est fière de présenter son tout nouveau lieu, pensé comme un écrin pour les écritures émergentes et contemporaines, pour permettre aux dramaturges d’aujourd’hui, de demain de s’épanouir.
Point de chute à Gambetta
Évincé de sa mythique adresse, Cité Véron – le Moulin Rouge souhaitant récupérer son bien, le jardin d’hiver et la fameuse coupole d’or qui surplombe une piste de danse, transformée depuis en salle de spectacle – Théâtre Ouvert a dû trouver un nouveau site,au débotté. La convention d’occupation temporaire par le Tarmac du 159 avenue Gambetta étant arrivée à échéance, le ministère de la Culture a lancé en 2018 un appel à candidatures public à l’issue duquel Théâtre Ouvert s’est vu attribuer l’autorisation d’occuper ce bâtiment appartenant à l’État afin d’y poursuivre ses missions. Les fonds dévolus à la mission francophone du Tarmac sont quant à eux répartis sur plusieurs structures identifiées par le Ministère de la Culture sur le territoire national : la Cité Internationale des Arts, les Francophonies de Limoges et La Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon, l’ONDA.
Un lieu ouvert vers l’extérieur
Très vite, passé la porte, ce qui frappe c’est le plafond fort bas. « L’espace d’accueil est grand, explique la directrice, mais pour le rendre chaleureux, vaste, il a fallu avec l’architecte Karine Petit, le réinventer totalement. Nous souhaitons donner au lieu une nouvelle impulsion, une nouvelle respiration. Nous avons ouvert au maximum le foyer, nous avons cherché les moyens de lui apporter de la lumière. Il était important pour nous qu’il y ait une porosité entre intérieur et extérieur, qu’il y ait de la vie même en journée. » Pour l’instant, on ne peut qu’imaginer la bibliothèque, le mobilier connecté qui permettra à tous ceux qui voudront s’attarder un moment, boire un verre, d’avoir accès au wifi. Résidence d’artistes dévolue à l’écriture, Théâtre Ouvert se doit d’être vivant.
Un gros œuvre de remise aux normes
Ancienne salle de répétition du Théâtre de l’Est Parisien construit en 1973, rénovée 10 ans plus tard pour la transformer en un lieu de culture pour accueillir du public, le 159 avenue Gambetta avait besoin d’un coup de neuf, d’être rendu accessible aux personnes à mobilité réduite, et enfin des travaux étaient nécessaires pour réaliser une double isolation, phonique et thermique, le désamiantage du bâtiment, une refonte du système électrique, un remplacement pur et simple du système de ventilation totalement dysfonctionnel. « Le bâtiment appartenant à l’Etat, souligne Caroline Marcilhac, c’est l’OPPIC – Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture – qui gère et finance le gros œuvre, surtout des travaux structurels, comme la mise en place d’un ascenseur. Pour ce qui est des aménagements liés à la pratique du théâtre, des écritures, c’est Théâtre Ouvert qui en assure la maîtrise d’ouvrage. Il était logique de tout faire en même temps avant la réouverture au printemps. Afin de fluidifier les échanges et permettre une passation simple entre les deux phases de travaux, nous avons décidé de faire appel à la même architecte. »
Gain d’espace pour les artistes
Inscrit dans l’ADN de Théâtre Ouvert, la place des dramaturges, des auteurs émergents et contemporains, l’adaptation aux plateaux des œuvres, doit trouver dans ce bâtiment entièrement réhabilité le meilleur des outils. En plus de la grande salle (260 places), une petite salle obstruée avant par deux énormes piliers en béton remplacés par un immense IPN, va devenir un autre espace pouvant accueillir une centaine de spectateurs. « Par ailleurs, raconte Caroline Marcilhac, il était nécessaire de pousser les murs, pour trouver des endroits dédiés à la création, aux répétitions, au travail de plateau. Ainsi, nous avons décidé de transformer les anciennes régies de la grande salle, inutilisées depuis longtemps, en un studio de 35 m2, et le bureau RP du deuxième étage en un autre espace d’accueil de 75 m2 pour les compagnies. D’immenses fenêtres éclairent le lieu. C’est très apaisant, très stimulant. Étant au même niveau que les bureaux de l’équipe administrative, le lien avec les artistes est maintenu. C’était primordial dans le cahier des charges. »
Une réouverture au printemps
Occupant pour l’instant des locaux à la MJC des Hauts de Belleville, Théâtre Ouvert continue, hors les murs, sa mission. Après avoir investi lors de temps de festival la MC93 ou encore l’Hôtel d’Albret, Caroline Marcilhac vise l’avenir, le printemps, la réouverture des lieux de culture pour inaugurer un 159 avenue Gambetta méconnaissable et totalement revu. Au programme de cette fête consacrée aux nouvelles écritures : Rapports sur toi (de mon chaos est née une étoile filante) de Baptiste Amann, mis en scène par Rémy Barché. Un moment de retrouvailles, qu’il sera, on n’en doute pas, bon de partager.
En attendant de retrouver les auteurs encouragé par le centre national sur scène, vous pouvez découvrir les deux derniers textes publiés chez Tapuscrit | Théâtre Ouvert : Fanny de Rébecca Déraspe – l’adaptation théâtrale sera mise en scène par Rémy Barché en novembre 2021 à La Comédie de Reims, puis sera présentée en janvier 2022 à Théâtre Ouvert – et Soldat·e inconnu·e de Sidney Ali Mehelleb – création en octobre 2021 à Théâtre Ouvert dans une mise en scène d’Aurélie Van Den Daele.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Théâtre Ouvert – Centre national des dramaturgies contemporaines
159 Avenue Gambetta
75020 Paris