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Mémoires d’un fou, mise en scène de Sterenn Guirriec… Voyage époustouflant dans les méandres d’un esprit fiévreux

Les mots jaillissent par flots ininterrompus, exprimant les angoisses de l’adolescent, ses colères, ses violences et ses interrogations face à un monde hostile qui se refuse à le comprendre. Ils brûlent, résonnent et bourdonnent. Ils prennent vie dans le corps et l’âme de William Mesguich qui incarne avec une passion dévorante la folie destructrice qui embrase l’esprit du jeune Flaubert. Captivé par le feu intense qui se dégage du comédien, par sa rage et la maîtrise de son jeu et de son être, on s’enfonce progressivement avec lui dans l’aliénation de l’auteur… jusqu’au précipice. Stupéfiant !.. L’argument : écrits à

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Au théâtre de poche-Montparnasse, William Mesguich donne vie aux Mémoires d’un fou de Gustave Flaubert

Les mots jaillissent par flots ininterrompus, exprimant les angoisses de l’adolescent, ses colères, ses violences et ses interrogations face à un monde hostile qui se refuse à le comprendre. Ils brûlent, résonnent et bourdonnent. Ils prennent vie dans le corps et l’âme de William Mesguich qui incarne avec une passion dévorante la folie destructrice qui embrase l’esprit du jeune Flaubert. Captivé par le feu intense qui se dégage du comédien, par sa rage et la maîtrise de son jeu et de son être, on s’enfonce progressivement avec lui dans l’aliénation de l’auteur… jusqu’au précipice. Stupéfiant !..

L’argument : écrits à 17 ans, Les mémoires d’un fou sont, dans l’œuvre de Flaubert, une tentative singulière de mêler les genres de la biographie et des mémoires. Réflexion sur les liens qui existent entre le langage et la réalité qu’il tente de représenter, Flaubert nous entraîne dans un jeu habile où il oppose sa « folie » à la bêtise du monde.

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William Mesguich incarne Flaubert jusqu’à la folie © Chantal Depagne

La critique : la scène est un antre, celui d’un écrivain en devenir. Le sol, les murs sont recouverts de feuilles blanches ou couvertes d’écritures. Derrière un poteau se tient une ombre. Elle s’avance… Dans la lumière éclatante apparaît un jeune homme, l’œil hagard, le regard bleu, fiévreux, les boucles blondes de sa chevelure hirsute. C’est Gustave Flaubert (impressionnant William Mesguich). Il a 17 ans. C’est un adolescent solitaire dont la jeune existence est déjà cabossée, meurtrie.

En grande partie autobiographique, Les Mémoires d’un fou dévoilent les premiers émois, les premières pensées et les premières blessures de l’auteur de L’Education sentimentale et de Madame Bovary. Tout y est : ses angoisses, ses douleurs, ses colères et ses troubles. Comme dans un journal intime, il y dépose ses pensées, sans fard. Il jette les mots sur le papier avec l’énergie du désespoir et de la démence qui le guette. Le texte est âpre, brûlant, violent et décousu. La syntaxe vive, saccadée et fragmentée. L’ensemble exalté, puissant.

Afin d’approcher au plus près l’adolescent, ses idées, ses réflexions et ses divagations les plus intimes, Sterrenn Guirriec a fait le choix judicieux d’une mise en scène simple et moderne, qui mêle jeu de lumières et arts vidéo, tout en conservant la structure narrative en dents de scie, alternant les moments de pure folie et les instants, plus calmes, de lucidité. L’effet est bluffant, tant est prégnante l’impression d’explorer les méandres de cet esprit enflammé.

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Dans cet antre de papier, l’auteur de l’Education sentimentale se livre sans fard © Chantal Depagne

Seul sur scène, l’incandescent William Mesguich est ce Flaubert jeune, fiévreux, insensé, exalté, en colère contre le monde. Il l’incarne jusqu’à l’aliénation. Le feu de ses yeux embrase, le souffle de sa bouche qui déverse avec force, passion et violence les mots de l’auteur qui se cognent et s’entrechoquent, brûle. C’est saisissant de brutalité et de bestialité. Happé dans ce monde de suspicion, on est en apnée, suspendu aux lèvres du comédien dans l’attente de la prochaine salve de pensées, de sensations qui envahissent l’auteur en herbe. Puis le calme vient, la tempête cesse, un temps, Gustave est amoureux. Une femme brune hante ses pensées. L’apaisement ne peut durer. L’homme ne sait vivre qu’avec hargne et démesure. Les émotions et les sentiments ne peuvent être qu’absolus. passionnés, par les mots du romancier et la force de son écriture, William Mesguich déploie toute la palette de son talent pour rendre au mieux toutes ces couleurs, ces tonalités et ces intensités.

Confiné dans cette caverne de papier, véritable lieu rituel de passage et de transformation, l’artiste incarne l’écrivain à l’aube de son passage dans l’âge adulte. Il suit ce parcours initiatique enfiévré où l’adolescent lucide doit oublier ses rêves les plus fous, ses désirs les plus profonds, pour entrer dans le rationalisme strict de son futur statut d’homme.

Bien que secoué, bringuebalé, malmené pendant plus d’une heure, on est séduit par ce texte de jeunesse, tragique et authentique. Bouleversé par l’interprétation d’un artiste vibrant, on sort avec l’envie de se (re)plonger dans l’œuvre de ce fin et lucide psychologue qu’était Gustave Flaubert.

Mémoires d’un fou de Gustave Flaubert
Théâtre de Poche-Montparnasse
75 Boulevard du Montparnasse
75006 Paris
Jusqu’au 8 novembre 2015
Du mardi au samedi 19h, dimanche 17h30
Durée 1h environ

Adaptation de Charlotte Escamez
Mise en scène de Sterenn Guirriec
Avec William Mesguich
Lumières de Mathieu Courtaillier
Son Franck Berthoux
Décor et costumes de Camille Ansquer
Production Théâtre de l’Etreinte et coréalisation Théâtre de Poche-Montparnasse – Compagnie soutenue par la Région Ile de France au titre de la permanence artistique et du Conseil Général du Val de Marne au titre de l’aide au fonctionnement

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