Actuellement en travaux, La Comédie de Valence ouvre sa saison avec des formes théâtrales itinérantes. Toujours en quête de père, Lorraine de Sagazan propose un voyage dans les souvenirs flous d’un mal voyant et signe un spectacle délicat et humain porté par deux comédiens habités et un amateur épatant.
Assis au premier rang, un homme s’avance vers le devant de la scène. Le pas assuré, il se dirige à l’aide une canne blanche. Face au public, il prend la parole. La voix hésitante, mais matinée d’une belle forme d’autodérision, il se présente. Son nom est Thierry Sabatier, il vit à Valence. Une maladie congénitale l’a rendu lentement mal voyant. Depuis plusieurs années, il a appris de faire de ce handicap une force. Passionné de théâtre, il a fait la rencontre l’an passé lors d’une résidence d’écriture de Lorraine de Sagazan, Guillaume Poix et deux comédiens, Chloé Olivères et Romain Cottard.
Une autre perception
S’interrogeant sur la manière dont les personnes privées de vue ressentent la réalité du monde, la metteuse en scène et l’auteur ont recueilli un certain nombre de témoignages, tous plus passionnants, fascinants les uns que les autres. Les deux complices puisent dans cette matière brute, dans ces récits de vie et imaginent un puzzle fragmentaire, une histoire à tiroirs. Partant du dernier souvenir visuel de théâtre de Thierry Sabatier, ils remontent le temps et revisitent à partir de bribes une improbable pièce.
L’absence de père
Dans une boîte blanche, une femme (lumineuse Chloé Olivères) et un homme (remarquable Romain Cottard) s’observent. Entre eux, la tension est palpable. Couple heureux jadis, l’arrivée d’un enfant, l’amour dévorant de l’une, le désir d’indépendance de l’autre, ont mis à mal leur histoire. Comment sauver le reste de passion, de flamme sur un champ de ruines ? Entremêlant réalités, fictions et réminiscences d’un passé que le temps à modifier, réarranger, magnifier, Guillaume Poix creuse avec tendresse la veine de l’intime, la quête du père absent, trop tard retrouvé.
Forme itinérante
Conçu pour pouvoir aller au plus près de nouveaux publics, pour être facilement mobile, la belle et épurée mise en scène de Lorraine de Sagazan s’attache à l’essentiel, à la force du récit, à la personnalité chaleureuse de Thierry Sabatier, à la présence intense des deux comédiens. Avec peu, elle donne vie à tout un monde, à une famille, à une pièce, à la possibilité du pardon salvateur.
Toute en délicatesse, La vie invisible attrape et saisit. Loin de la crise de la Covid, cette petite forme théâtrale sans prétention est une bulle d’humanité dans un monde de plus en plus inquiétant.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – envoyé spécial à Valence
La vie Invisible de Guillaume Poix et Lorraine de Sagazan
La Comédie de Valence
Spectacle créé le 22 septembre 2020 à La Parenthèse de Saint-Jean-en-Royans, dans le cadre de la Comédie itinérante
Durée 55 min environ
Tournée
Les 8 et 9 octobre 2020 à l’Espace Culturel Liberté, Saint-Marcel-Lès-Valence
Le 13 octobre 2020 à la Salle Polyvalente de Lus-La-Croix-Haute
Le 14 octobre 2020 à la Salle des Voconces à Luc-En-Diois
Le 15 octobre 2020 à la Salle des fêtes de Mirabel-Et-Blacons
Le 16 octobre 2020 à la Salle des fêtes de Vinsobres
Du 2 au 13 mars 2021 à l’Espace Cardin – Théâtre de la Ville
Du 16 au 20 mars 2021 au Théâtre des 2 Rives – CDN de Normandie-Rouen
Texte de Guillaume Poix, à partir de témoignages de personnes non et mal-voyantes
Conception et mise en scène de Lorraine de Sagazan
Collaboration artistique et dramaturgie de Romain Cottard
Avec Romain Cottard, Chloé Olivères et Thierry Sabatier
Crédit photos © Christophe Raynaud de Lage