Sur la scène du Petit-Saint-Martin, Camille Chamoux nous offre une excellente dédramatisation de ce qui nous préoccupe tous, à savoir, le temps qui passe trop vite. Alors apprenons avec elle à ralentir, à vivre au fil de l’eau.
La quarantaine l’a inspirée ! Pas la quarantaine subit par la Covid 19, non celle du calendrier, celle que l’on dit être rugissante. 40 ans, ce n’est pas rien, c’est un âge charnière sur la route de notre destinée. C’est souvent l’heure, du bilan, car ça y est, on est vraiment une grande personne. 40 ans, c’est la quête du Graal qu’est le bonheur. Camille Chamoux, à la question « avec qui devons-nous nous réconcilier pour être heureux dans la vie ? », répond par cet axiome, « avec le temps, va ».
Histoire d’une vie
Dans son spectacle, vous avez Proust, normal, il est le leader dans La recherche du temps perdu, Ferré, Moustaki. Avec l’esprit de contradiction qu’on lui connaît, elle explore tous les travers de notre société actuelle où tout doit aller de plus en plus vite. Elle s’interroge sur les rapports sociaux qui se dérèglent. Elle évoque la vieillesse de ses parents, ces boomers qui l’on fait naître sous Giscard, et qui refuse de lâcher prise, la jeunesse de ses enfants et leur rapport à cette vie qu’ils s’apprêtent à dévorer, la fatigue de son homme. Évidemment, parce que l’époque l’exige, elle évoque la place de la femme dans notre monde moderne.
Facétieuse introspection
Sans farfouiller dans Les rayons d’la mort comme Ferré, là où « même les plus chouettes souvenirs » ont « une de ces gueules », Chamoux nous fait part de ses réflexions sur la vie qui passe, celle du quotidien et dont on ne sait pas de quoi elle sera faite. Et durant 70 minutes, pas une de plus, sinon son régisseur coupe les projos parce qu’il n’a pas que ça à faire, la comédienne nous régale avec ses visions des choses de la vie.
Un seul-en-scène ciselé
La mise en scène de Vincent Dedienne est magnifique. Dans l’espace vide, cher à Peter Brook, on trouve une immense table de cuisine, celle où les enfants dessinent, celle sur laquelle on dîne, on travaille, on écrit. La symbolique est belle, cette table est le centre de la maison, l’endroit où l’on se retrouve. Ce spectacle est un petit bijou d’intelligence et de drôlerie, mené par une artiste extrêmement douée. Et puisque le temps ne se rattrape guère, sachez au moins une chose, Chamoux ne nous le fait pas perdre. Alors courez-y !
Marie-Céline Nivière
Le temps de Vivre de Camille Chamoux
Théâtre du Petit-Saint-Martin
17 rue René Boulanger
75010 Paris
A partir du 10 septembre 2020
Du mercredi au samedi à 20h30
Avec la complicité de Camille Cottin
Mise en scène de Vincent de Dedienne
Scénographie et lumière de Nicolas Marie
Costume de Constance Allain
Crédit photos © Christophe Raynaud de Lage