Dans le salon rose bonbon de Thérèse, les femmes sont reines. Libres de toutes contraintes, elles babillent pour oublier le quotidien, la maladie, leur mari. L’atmosphère est légère. Le bon mot à l’honneur, la bonne humeur de rigueur. Les vicissitudes de la vie sont laissées à la porte. Mais derrière les masques et l’humour potache se dessinent des portraits de femmes complexes et torturées, campées par des comédiennes de talent – Elisabeth Vitali y est bouleversante. Toutefois, si on rit beaucoup aux répliques de ces joyeux drilles, la mécanique manque par trop de rythmique laissant le spectateur sur sa faim…
L’argument : l’histoire se déroule dans un charmant salon de coiffure où se retrouvent régulièrement quelques clientes habituées. Autour de Thérèse, la patronne qui les shampouine, les coiffe, les cajole, ces fidèles d’âge et de conditions sociales différentes s’épanchent sur leur vie, lâchent des confidences, s’amusent de leur parcours.
La critique : alors que la canicule sévit dans les rues de la capitale, quel plaisir de pénétrer dans la salle climatisée du Théâtre Michel. Installé confortablement dans le salon de coiffure « Thérèse Beauty » de Paimpol, on est prêt à suivre les aventures et les histoires de la patronne du lieu – interprétée par l’étonnante Marie–Hélène Lentin, qui a la langue aussi acérée que son brushing choucroute – , de sa jeune apprentie aussi pieuse que naïve (amusante Sandrine Le Berre) et de ses quatre fidèles clientes du samedi. L’occasion pour ces six femmes de se libérer du quotidien, de rire et d’échanger ragots et autres potins.
Très vite, l’intrigue tourne autour de Magalie (plaisante Léa François), la plus jeune d’entre elles. Fille de Jeanne (fabuleuse et flamboyante Elisabeth Vitali), cette dernière est atteinte d’un diabète rare. Au rythme de son histoire, le salon vibre. Gai quand elle se marie, plus sombre quand elle décide d’avoir un enfant contre avis médical. Ainsi, au fil de l’histoire chacune donnera son avis, échangera ses conseils, consolera la mère inquiète, amusera la galerie, ou détendra l’atmosphère.
A un rythme certes soutenu mais pas toujours approprié, les blagues et les répliques fusent mais ne font pas toujours mouche. Des longueurs viennent ça et là casser la fluide et drolatique mécanique. Et c’est le gros défaut de cette pièce fort sympathique au demeurant. D’autant que par flash, la pièce semble familière. On imagine Michèle Laroque ou Julia Roberts dans le rôle de Magalie et Annie Gregorio ou Darryl Hannah dans celui de l’apprentie. Et oui, car sous le titre, peu évocateur de Coiffure et confidences, se cache la comédie dramatique, Steel Magnolias, écrite par Robert Harling et portée à l’écran, en 1989, par Herbert Ross, puis adaptée dans la foulée en français par Michel Treguer sous le titre, Coiffure pour dames. Et malheureusement, la comparaison tourne vite au désavantage de cette nouvelle mise en scène. Si l’ensemble est plutôt bien mené, il manque un grain de folie, une pincée de peps qui relèverait une scénographie trop sage que le rose bonbon du décor ne suffit pas à aciduler.
Malgré quelques longueurs, ces tranches de vie prennent couleurs et souffles grâce au jeu caustique et nuancé des comédiennes. En tête, Elisabeth Vitali, subjugue et envoute. A l’aise dans la comédie comme dans la tragédie, elle nous émeut aux larmes. Dans ce rôle de mère hyper protectrice, elle bouleverse et montre un nouvelle fois toute l’étendue de son talent. L’élégante Isabelle Tanakil fascine dans ce rôle de grande bourgeoise rock n’roll. Ariane Pirie, dont c’était la première, se fond à merveille dans le personnage de la richissime voisine un peu coincée. En Accentuant les accents de petite fille de sa voix, Sandrine Le Berre est parfaite en trentenaire perdue et confite de bondieuserie. Marie–Hélène Lentin est plus vraie que nature en tenancière de salon de province un peu ringard. Seule Léa François détonne un peu. Son jeu par trop enfantin a bien du mal à se hisser au niveau de celui des cinq autres comédiennes.
Ne boudons pas toutefois notre plaisir, on passe un bon moment aux côtés de ces dames aux caractères bien trempés. D’autant plus que derrière le vernis un peu trop lisse se cache un portrait riche et étonnant de femmes pour qui amitié et solidarité ne sont pas de vains mots… Joli moment !…
Coiffure et confidences de Robert Harling
Théâtre Michel
38 rue des Mathurins
Paris 8°
Du mardi au samedi
Jusqu’à 15 août
adaptation: Didier Caron
Mise en scène : Dominique Guillo
Avec Marie–Hélène Lentini, Léa Francois, Elisabeth Vitali, Sandrine Le Berre, Isabelle Tanakil, Brigitte Faure (Juin et Août) et Ariane Pirie (Juillet)
