Van Gogh, in Memori

Au Studio Hébertot, Orianne Moretti fait renaître Vincent Van Gogh.

Trop de jaune, les dernières heures de Vincent Van Gogh, ou le portrait sans retouche d’un artiste complexe au Studio Hébertot.

Oriane Moretti s’est emparée de la pièce d’Emmanuel Fandre avec une acuité qui a retenu toute notre attention. Elle aurait pu suivre une narration naturaliste, enchaînant les faits exposer, au lieu de cela, elle a choisi de suivre le monde intérieur mouvementé et délirant de Vincent Van Gogh à quelques heures de son trépas. Nous sommes dans sa tête, sa folie, sa peur de la mort prochaine, son envie de comprendre pourquoi il en est arrivé là, pourquoi sa vie n’a été qu’une suite de douleur.

Sa mise en scène est vraiment attrayante. S’appuyant sur la scénographie de Laëtitia Franceschi et les lumières de Cynthia Lhopitalier, Oriane Moretti propose des images fortes. Comme celle de Van Gogh sur la table de dissection qui fait songer à un tableau de Rembrandt. Comme celle du corps de Vincent, se tordant, qui rappelle les représentations picturales du Christ descendu de la Croix. Elle mélange dans un savant dosage les références classique et moderne. Car il est aussi question de notre monde d’aujourd’hui : la place de l’artiste, le merchandising, le traitement de la folie, la recherche de sa place dans la famille puis dans la société.

Grâce à la qualité de son travail, tout est limpide dans les méandres du cerveau usé de l’homme à l’oreille tranchée, incarné par un comédien d’une beauté christique et d’un talent remarquable. Retenez son nom Thomas Coumans, il est promis à un grand avenir. Dans les rôles des parents, êtres durs et sans compassion, Brigitte Aubry et Laurent Richard sont comme toujours excellents. Malik Farouk est un docteur Gachet impitoyable. Si Xavier Fabre nous a moins convaincus dans le personnage de Gauguin, il a l’avantage d’avoir une dégaine de voyou qui sied à cet artiste haut en couleur.

La délicate rouquine Anne-Lise Maulin prête sa grâce aux personnages de Sien, d’une prostituée et de la mort. Carole Massana, toujours exquise, donne beaucoup de générosité à la logeuse. Et puis il y a Francisco Gil et Edouard Michelon, un duo à la Rosencrantz et Guildenstern, qui dans les rôles des infirmiers et autres personnages, fournissent une touche burlesque assez décapante. Un spectacle audacieux à découvrir.

Marie-Céline Nivière


Trop de jaune, les dernières heures de Van Gogh d’Emmanuel Fandre
Studio Hébertot
76 bis, boulevard des Batignolles
75017 Paris
Jusqu’au 16 Février 2020
Du mercredi au samedi à 21h00 et le dimanche à 14h30
Durée 1h30

Adaptation et mise en scène d’Orianne Moretti
Avec Thomas Coumans, Laurent Richard, Malik Faraoun, Xavier Fabre, Francisco Gil, Édouard Michelon, Brigitte Aubry, Anne-lise Maulin, Carole Massana
Scénographie de Laëtitia Franceschi
Lumières de Cynthia Lhopitallier
Costumes d’Anaïs Dautais-Warmel
Sons de Clément Atlan

Crédit photos © Stéphane Audran

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