A mi-chemin entre le cinéma 3D et le spectacle vivant, Mutilverse déconcerte autant qu’il séduit. Si les prouesses techniques sont saisissantes, les chorégraphies trop saccadées, presque robotiques, manquent de fluidité et empêchent de se laisser totalement embarquer dans cet univers irréel et incroyable… Faute d’être ému, on est « bluffé » par autant de virtuosité.
Dernière des créations australiennes à être présentée au Théâtre national de Chaillot, Multiverse de Garry Stewart, directeur de l’Australian Dance Theatre, surprend par son originalité et son ancrage dans le monde de demain. En puisant son inspiration au cœur des recherches scientifiques sur la théorie des cordes, des univers multiples ou des phénomène des trous noirs, le chorégraphe invente un spectacle.
Affublé de lunettes 3D, le spectateur est tout d’abord plongé dans un noir profond. Puis un point lumineux apparaît au centre de la salle. Il grossit, se déforme. Il ondule. Concentré sur cette vision presque surnaturelle, on en oublierait presque la présence d’un danseur sur la scène. Au rythme de la musique sourde et des mouvements des images 3D, son corps ondule, se plie, se tord. Le regard attiré par les volutes jaunes qui flottent au-dessus de lui, il est difficile d’avoir une vue d’ensemble du spectacle.
Les chorégraphies s’enchaînent. Tour à tour, en solo, duo ou trio, trois danseurs évoluent au gré des images 3D qui envahissent l’espace. Les corps dialoguent avec les arabesques et les circonvolutions numériques. Les images et les mouvements s’entremêlent, se superposent et se mixent, créant des illusions optiques surprenantes. Malgré la prouesse technique et la beauté complexe des images 3D, les gestes saccadés, stroboscopiques, voire robotiques, n’arrivent pas émouvoir, charmer. La magie du spectacle n’opère malheureusement pas. Trop froid, l’ensemble, bien que spectaculaire, perd vite de son sel.
En explorant l’univers de la physique et de l’astrophysique et en s’appuyant sur le travail numérique de Motion.Lab, le directeur de l’Australian Dance Theatre éblouit par la technicité de ce monde 3D, sublime, mais échoppe sur une chorégraphie passée au second plan, presque invisible… Dommage.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Mutliverse de Gary Stewart
Théâtre national de Chaillot –Foyer
1, place du Trocadéro
75016 Paris
jusqu’au 7 juin 2015
Tous les jours à 19 heures
Conception, mise en scène et chorégraphie Garry Stewart /Australian Dance Theatre
Conception scénique 3D, design et programmation Kim Vincs, Daniel Skovli, John McCormick, Simeon Taylor, Peter Divers, Motion.Lab and Deakin University
Musique originale Brendan Woithe (Klang)
Costumes Catherine Ziersch
Lumières Damien Cooper
Création vidéo Matthew Gingold
Conseiller Dr Andrew Melatos (département de physique de l’université de Melbourne)
Avec Kimball Wong, Samantha Hines, Matte Roffe
Crédit photos © Chris Herzfeld