Pour sa rentrée, le théâtre du Rond-Point, en collaboration avec l’Adami, confie à Mathieu Bauer les clés de la salle Renaud-Barrault afin de rendre un hommage burlesque au cinéaste Federico Fellini et à son acolyte le musicien Nino Rota.
Après Erik Satie, Bob Dylan et Leonard Bernstein, l’Adami – société civile pour l’administration des droits des artistes et musiciens interprètes – célèbre le duo Fellini – Rota. Qui de mieux que le musicien et metteur en scène Mathieu Bauer pour s’acquitter de cette mission délicate où s’allie à la puissance visuelle du cinéaste romain de cœur, la force envoûtante des airs imaginés par le compositeur italien.
Cheveux roux hirsutes, derrière sa batterie, le directeur du Nouveau théâtre de Montreuil, cofondateur de la compagnie Sentimental Bourreau, dirige de mains de maitre l’orchestre amateur affilié à son CDN ainsi que les artistes qui par touches donnent vie à Fellini, à son œuvre, à sa complicité presque fusionnelle avec Nino Rota. Bien que fort didactique au début, le récit se perd imperceptiblement dans la folie du réalisateur, campé avec finesse par Gianfranco Poddighe. Face à lui, évoquant la star de la Dolce Vita, la pulpeuse Éléonore Auzou-Connes déjoue les codes passant en un clin d’œil du charme à la pantomime. Le ton est donné, la soirée hommage mêle habilement nostalgie, burlesque, rock et chant opératique.
S’attachant à respecter la veine néoréaliste teintée d’onirisme de Fellini, Mathieu Bauer signe un spectacle passionnant où s’entrechoque les grandes figures croquées par le cinéaste allant de la jeunesse italienne oisive des années 1950 aux portraits singuliers de femmes, tour à tour Vamp’, épouse délaissée, ou bohémienne naïve, sans oublier les personnages haut en couleurs et les marginaux traversant la scène avec extravagance. Rien ne manque, tout rappelle la synergie qui plus de vingt ans durant a uni derrière la caméra le cinéaste et son compositeur.
De la joyeuse bande de musiciens à l’ensorcelante mezzo-soprano Pauline Sikirdji, en passant par le clownesque Bonaventure Gacon et le charismatique maître de cérémonie Sylvain Cartigny, c’est toute une époque qui défile et rend compte des noces artistiques et sacrées entre un colosse furieux et un petit homme effacé, savant qui donnera naissance à quelques chefs d’œuvre du cinéma italien. Certes tout n’est pas parfait, l’équipe n’a eu que très peu de jours pour répéter, mais l’essentiel est là : l’âme passionnée de cette collaboration rare entre deux hommes si différents, l’un tonitruant, l’autre discret.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
L’œil et l’oreille d’après les œuvres de Federico Fellini et Nino Rota
L’Adami fête Fellini et Nino Rota
Théâtre du Rond-Point – salle Renaud-Barrault
2bis av Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
le 3 septembre 2019 à 20h – soirée exceptionnelle
Durée 1h30
Mise en scène de Mathieu Bauer assisté d’Anne Soisson
Musique et collaboration artistique de Sylvain Cartigny
Avec Pauline Sikirdji, Éléonore Auzou-Connes, Mathieu Bauer, Sylvain Cartigny, Stéphane Chivot, Bonaventure Gacon, Gianfranco Poddighe, l’Orchestre de spectacle du Nouveau théâtre de Montreuil
Costumes et scénographie de Chantal de la Coste
Régie générale et création lumières de Xavier Lescat
Crédit photos © Florent Drillon / crédit illustration © stéphane Trapier