Comment définiriez-vous l’identité de cabosanroque ?
cabosanroque : Nous travaillons avec des artifices ainsi que sur la relation entre le public et ce que nous créons. Ce qui nous intéresse, c’est de voir la réaction des spectateurs en posant la question de l’espace d’exposition. C’est pour ça que notre travail se situe entre les arts visuels et la performance. Flors i viatges, par exemple, on peut la voir aussi bien dans un théâtre que dans un musée. Nous aimons réunir des idées à la fois politiques et poétiques. Nous ne voulons pas dire au public ce qu’il doit penser, mais ouvrir un schéma de réflexion.
C’est justement le cas dans Flors i viatges (Fleurs et voyages), qui se base sur des récits de guerre, à partir du livre de Mercè Rodoreda…
cabosanroque : Oui, nous posons ces questions au public, parce que ce sont des sujets très importants. Flors i viatges est le dernier volet d’une trilogie. C’est un projet que nous avons commencé en 2012, mais la crise économique est arrivée. Quand nous l’avons repris dix ans plus tard, nous avons mieux compris le texte. Ce temps-là a permis de se rendre compte de tout ce qu’il racontait. Ce sont des histoires de voyages et des descriptions de fleurs imaginaires. En regardant le sommaire, on a compris que les voyages racontaient la guerre du point de vue des femmes, des enfants, des animaux et de la terre. Et les fleurs parlaient de Mercè Rodoreda elle-même. C’était magnifique.
Vous présentez une autre installation intitulée Petrotuning, qui sera activée par le chanteur Niño de Elche. Comment s’est passée cette rencontre ?
cabosanroque : Nous avions déjà travaillé avec Niño de Elche pour Dimonis, la deuxième partie de la trilogie, à partir de textes de Jacint Verdaguer. C’est l’un des poètes les plus mis en musique en Europe. Mais nous en avions marre d’écouter ces paroles chantées de la même manière. C’était quelque chose de très choquant, de demander à Niño de Elche de les chanter, c’était contre les traditions. Quelquefois, il paraît possédé et cette œuvre parle de possession, ça a été magnifique. Il nous a dit « Demandez-moi ce que vous voulez, je vous dirai toujours oui ». Pour Petrotuning, nous avons découvert que l’Auto-Tune vient de l’extraction de pétrole. Et ce sera marrant de travailler avec Niño sur des sons de moteur, sur le pétrole et la pétro-masculinité. On va voir ce qui va se passer, parce que nous ne l’avons jamais fait.
Il y a une autre collaboration importante dans votre parcours, aux côtés de la danseuse Rocío Molina…
cabosanroque : Notre relation avec Rocío Molina remonte aussi à dix ans. En découvrant une exposition que nous avons faite au Mercat de les Flors à Barcelone, elle a souhaité nous rencontrer et travailler avec nous. Nous avons improvisé pendant quinze jours et nous avons fait une présentation. Après ça, nous lui avons demandé de faire quelques enregistrements. Elle dit toujours que nous lui faisons traverser des chemins qu’elle ne s’imaginait pas. Ça l’intéresse beaucoup. Elle et Niño sont des artistes très expérimentaux.
Ils se sont d’ailleurs récemment retrouvés sur Carnación…
cabosanroque : Oui, c’est nous qui les avons présentés. Et maintenant, nous travaillons avec Niño sur le nouveau spectacle de Rocío. Nous serons en résidence ici et nous montrerons une partie de ce travail avec une chaise, autour du son et du mouvement, des relations avec l’objet.
Propos recueillis par Peter Avondo – Envoyé spécial à Toulouse
Constellation “Objets Catalans Non Identifiés”
Théâtre Garonne
1 avenue du Château d’eau
31300 Toulouse
Du 3 au 12 avril 2025
