Dans un salon bourgeois qui respire l’aisance et le bon goût moderne, Richard (Davy Sardou) lit L’Équipe, au grand désespoir de Claire (Alysson Paradis), sa femme. Lui se complaît dans son image de fils d’immigré espagnol ayant réussi, elle dans celle de la fille de bonne famille aux idées progressistes. Entre eux, c’est forcément électrique, voire un brin tendu. Les blagues beaufs et lourdes de l’un ne font plus vraiment rire l’autre. Mais il n’est pas temps de se chamailler, car dans quelques minutes, leurs meilleurs amis viennent dîner. Et comme d’habitude, rien n’est prêt.

La sonnerie retentit. Pas le temps de s’appesantir, il faut accueillir avec le sourire, Mathilde (Marie-Ange Casta) et Christophe (Julien Personnaz). Loin du style décontracté de leurs hôtes, les nouveaux arrivants tirés à quatre épingles ont tout l’air de croque-mort dans leurs costumes sombres. La soirée s’annonce sous les meilleurs auspices. Bien que chacun fasse bonne figure, le vernis se fissure et se craquèle. Aucuns des deux couples ne semblent épanouis. Dissensions et amour qui s’effiloche transforment l’après-repas en règlement de compte à coups retenus. Une révélation des plus surprenantes va faire vaciller les derniers faux-semblants. Les chamailleries de bon ton laissent place à des vérités sanglantes.
Un vaudeville chic
Reprenant les codes du vaudeville tout en les adaptant aux couples bobos d’aujourd’hui, Bertrand Marcos signe une comédie douce-amère au schéma très classique. Les personnages, bien que croqués avec juste ce qu’il faut de caricatural pour être crédible, auraient mérité d’être un peu mieux dessinés. Les rôles sont toutefois bien campés par le quatuor d’acteurs. Alysson Paradis et Julien Personnaz sont tout en authenticité et justesse, Marie-Ange Casta, encore fragile, cherche ses marques. Quant à Davy Sardou, il est en mode automatique et ne laisse voir que trop rarement les failles de son personnage.
Rien de révolutionnaire dans ce boulevard « so » chic, la forme est basique et le texte assez convenu. Si on peut regretter de ne voir sur scène qu’une vision fantasmée de la vie parisienne, Amis pour la vie fonctionne sans accroc. On peut néanmoins regretter une fin à l’eau de rose, qui dessert cette histoire d’hier comme d’aujourd’hui.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Amis pour la vie de Bertrand Marcos
Théâtre de l’Œuvre
55 rue de Clichy
75009 Paris
du 17 avril 2025 au 29 juin 2025
durée 1h20
mise en scène de Bertrand Marcos
Avec Alysson Paradis, Davy Sardou, Marie-Ange Casta et Julien Personnaz