Isabel Abreu © DR
Isabel Abreu © DR

Isabel Abreu : la scène est sa maison

Éblouissante en mère tuant des fascistes dans la fresque dystopique de Tiago Rodrigues ou en guerrière des temps modernes contre le sexisme ordinaire dans Black Lights de Mathilde Monnier, la comédienne portugaise passe d’un projet à l’autre avec une aisance confondante. Une présence magnétique !

Votre premier souvenir d’art vivant ?
La musique. La voix de Zeca. La voix d’Amália.
Voir pour la première fois en direct l’actrice Eunice Muñoz dans O Caminho para Meca d’Athol Fugard en 1995, l’année où je suis entrée au conservatoire de théâtre. Voir une actrice réussir à faire en sorte que tout le monde dans la salle respire avec elle.

Isabel Abreu dans Catarina ou la beauté de Tuer des fascistes de Tiago Rodrigues © Jaime Machado
Catarina ou la beauté de tuer des fascistes de Tiago Rodrigues © Jaime Machado

Qu’est-ce qui vous a poussée à choisir cette voie ?
Honnêtement, je ne sais pas.

Pourquoi ce métier ?
Je pense que le fait d’avoir eu le théâtre comme discipline a été fondamental. Je viens d’une région du Portugal où je n’avais pas accès au théâtre, à la danse, aux musées ou aux concerts. L’art ne faisait pas partie de mon quotidien. Ainsi, la pratique du théâtre et l’accès à un festival de théâtre international qui existait à l’époque dans ma région ont été essentiels dans mon choix de carrière.

Racontez-nous le tout premier spectacle auquel vous avez participé. Une anecdote marquante ?
Ce n’est pas le premier spectacle, mais le deuxième : I Stand Before You Naked de Joyce Carol Oates, mis en scène par Ana Nave. Un enchaînement de plusieurs monologues. Pendant les répétitions à la table, j’ai mémorisé le texte sans le faire intentionnellement, c’est venu tout seul. Lorsque nous sommes allés sur scène, la première fois que j’ai dit mon monologue, je l’ai joué comme si c’était la première d’une représentation.

Ce qui m’a marquée, c’est ce que la metteuse en scène m’a dit ensuite :« C’est fait et on pourrait déjà jouer. Tu as encore deux mois de répétitions et beaucoup de représentations, tu seras capable de répéter et de te remettre à jour, ou bien c’est quelque chose qui n’est arrivé qu’une seule fois ? » L’importance de l’idée de répétition.

Black lights de Mathilde Monnier © DR (avec l'aimable autorisation d'isabel Abreu)
Black lights de Mathilde Monnier © DR (avec l’aimable autorisation d’isabel Abreu)

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Il y en a beaucoup. Je vais en choisir un, car il m’a ramenée à l’enfance, à un endroit sans préjugés où les émotions me guidaient :  de Baro d’evel.

Quelles rencontres ont marqué votre parcours ?
Tous ceux et toutes celles que j’ai croisés, peu importe comment, ont eu une influence. Artistes, techniciens, œuvres ou simples passants dans ma vie. Mais je ne peux pas ne pas mentionner Tiago Rodrigues, qui a profondément modifié et inspiré ma manière de voir le théâtre et le monde.

Où puisez-vous votre énergie créative ?
Dans ceux qui sont à mes côtés. Dans l’écoute des gens et dans ces moments où il semble qu’il n’y ait rien.

En quoi ce que vous faites est essentiel à votre équilibre ?
Faire du théâtre est pour moi une addiction. Sans ces moments, je ressens souvent un syndrome de sevrage. Un vide un peu douloureux.

Que représente la scène pour vous ?
Le présent. L’instant. Le partage.

Où ressentez-vous, physiquement, votre désir de créer et de jouer ?
Je ne sais pas.

Hamlet de Christiane Jatahy © Simon Gosselin
Hamlet de Christiane Jatahy © Simon Gosselin

Avec quels artistes aimeriez-vous travailler ?
Avec beaucoup d’artistes avec qui j’ai déjà travaillé, et avec des personnes inattendues qui pourraient surgir. Principalement avec de bonnes personnes.

Si tout était possible, à quoi rêveriez-vous de participer ?
Dîner avec David Lynch.

Si votre parcours était une œuvre d’art, laquelle serait-elle ?
Mon parcours n’est pas une œuvre d’art. Je préfère citer un poème que j’aime pour parler d’œuvres d’art. Une poétesse portugaise, Adília Lopes :« A obra de arte: L’œuvre d’art / n’est pas un ajustement / de comptes / c’est un ajustement / de coins. »


Catarina ou la beauté de tuer des fascistes de Tiago Rodrigues
Pièce en portugais surtitré en français et en anglais, présenté en octobre 2022 au
Théâtre des Bouffes du Nord dans le cadre du
Festival d’Automne à Paris
Durée 2h30 

Tournée
19 au 21 mars 2025 à La Criée – Théâtre national de Marseille

mise en scène de Tiago Rodrigues assisté de Margarida Bak Gordon
avec António Fonseca, Beatriz Maia, Isabel Abreu, Marco Mendonça, António Afonso Parra, Romeu Costa, Rui M. Silva, Sara Barros Leitão 
scénographie de F. Ribeiro 
costumes de José António Tenente 
lumières de Nuno Meira 
création et design sonore de Pedro Costa 
chef de chœur, arrangement vocal de João Henriques 
conseillers en chorégraphie – Sofia Dias, Vítor Roriz 
conseiller technique en armes – David Chan Cordeiro 
traduction de Daniel Hahn (Anglais), Thomas Resendes (Français) 
surtitrages  de Rita Mendes 


Black lights de Mathilde Monnier, d’après la série télévisée d’Arte H24 de Valérie Urrea et Nathalie Masduraud
Création le 22 juin 2023 à Montpellier Danse
Durée 1h10

Tournée
10 au 12 avril 2025 au TnBA en partenariat avec la Manufacture CDCN
13 mai 2025 au Théâtre Victor Hugo à Bagneux
20 mai 2025 au Grand R – Scène nationale de la Roche-sur-Yon

Dates passées
20 au 23 juillet 2023 au Festival d’Avignon
30 novembre au 2 décembre 2023 au Théâtre de la Cité Internationale, Paris 
17 et 18 janvier2024 à La Comédie, Clermont-Ferrand
26 et 27 janvier 2024 au TPR, ADN, La Chaux-de-Fonds, Suisse 
7 et 8 février 2024 à la MC2, Grenoble 
2 février 2024 aux Théâtre des Salins, Martigues

20 au 23 mars 2024 aux Subs, Maison de la Danse, Lyon
le 4 et 5 avril 2024 Le Quartz, Brest

Chorégraphie et mise en scène de Mathilde Monnier
Dramaturgie de Stéphane Bouquet
Scénographie d’Annie Tolleter avec l’atelier Martine Andrée, Halle Tropisme Dramaturge lumière – Éric Wurtz 
Son de Nicolas Houssin, Olivier Renouf
Avec Isabel Abreu, Aïda Ben Hassine, Kaïsha Essiane, Lucia García Pulles, Mai-Jùli Machado Nhapulo, Carolina Passos Sousa, Jone San Martin Astigarraga, Ophélie Ségala

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