Par son métier, l’avocat en droit pénal des affaires, Antoine Beauquier connaît très bien son sujet. Comme bon nombre de ses confrères, l’écriture est sa passion. À son actif, un roman policier Pavillon 7 et cette pièce, Le Journal. Dans une construction assez classique, il met en place une intrigue diablement maîtrisée qui donne à réfléchir sur la société.
Être ou ne pas être intègre, là est la question ?
![Le Journal - Antoine Beauquier - Anne Bouvier © Beatrice Livet](https://www.loeildolivier.fr/wp-content/uploads/2025/02/Le-ournal-Beatrice-Livet-23.jpg)
Dès sa création, avec l’invention de l’imprimerie, la presse écrite a tissé des liens avec le pouvoir. Et vice versa. Certains hommes politiques ont su et savent encore se servir d’elle pour leurs propres intérêts. Mais, en règle générale, la presse se doit d’être libre et indépendante, au service de l’information. Celle-ci toujours bien vérifiée se doit d’être de qualité et pluraliste.
Comme il est dit dans la Charte : « Cependant, la responsabilité du journaliste ne peut être confondue avec celle de l’éditeur, ni dispenser ce dernier de ses propres obligations. » Aujourd’hui, les majorités des patrons de presse sont des entrepreneurs. La déontologie demande au journaliste de ne pas « user de la liberté de la presse dans une intention intéressée. » À l’ère du numérique, informations et fake news se mélangent, changeant la donne. C’est de tout cela qu’Antoine Beauquier a ausculté.
Un jeu de massacre
![Le Journal - Antoine Beauquier - Anne Bouvier © Beatrice Livet](https://www.loeildolivier.fr/wp-content/uploads/2025/02/Le-Journal-Beatrice-Livet-1.jpg)
Edmond, directeur d’un journal d’investigation, possède un lourd dossier sur Jacques Flamm, un ministre ambitieux. Il demande à Raphaël, son meilleur journaliste, d’écrire dessus. À quelques heures de la parution de l’article, sa fille Apolline est arrêtée pour trafic de drogue à Djakarta. Seul Jacques Flamm semble être en mesure de l’arracher aux griffes du système judiciaire indonésien. Se retrouvant pris en étau entre sa raison de père et d’homme de presse, Edmond quitte le navire, repris ensuite par un homme d’affaires peu scrupuleux. Mais, c’est sans compter sur Raphaël qui par principe appartient aux journalistes qui ne lâchent jamais rien.
Dans un décor stylisé, dirigée avec brio par Anne Bouvier, les comédiens interprètent parfaitement la partition. Artiste sensible, Bruno Putzulu est convaincant en homme qui a consacré sa vie à son journal et en père qui refuse de sacrifier sa fille. Carolina Jurczak est émouvante dans ce personnage de jeune fille qui a toujours cru qu’elle passait après le travail de son père. Bruno Debrandt retrouve enfin les planches, après sa longue escapade dans les séries télévisées, Caïn, Le visiteur. Il est formidable en journaliste fatigué qui rejette les nouvelles règles de l’information. Olivier Claverie est étonnant en entrepreneur trop heureux de s’offrir un journal. Et puis, il y a Bernard Malaka, dont le jeu subtil ne cesse de nous séduire depuis le début de sa carrière. Avec lui, l’homme politique est roublard, suffisant et tordu à souhait !
Marie-Céline Nivière
Le Journal d’Antoine Beauquier
Théâtre de Paris – Salle Réjane
15 rue Blanche
75009 Paris
Du 22 janvier au 30 avril 2025
Durée 1h30.
Mise en scène d’Anne Bouvier
Avec Bruno Putzulu, Bruno Debrandt, Bernard Malaka, Carolina Jurczak, Olivier Claverie
Assistant mise en scène César Duminil
Décor de Citronelle Dufay
Lumière de Denis Koransky
Costumes de Claire Schwartz
Musique de Julien Vasnier.