Dans la pénombre, une créature rampe sur le sol et traverse la scène. Elle se tord, se contorsionne. C’est Héphaïstos tout droit sorti de sa forge. Rapidement rejoint par sa ribambelle de frères et sœurs. Certains sont légitimes comme Arès, d’autres nés des infidélités de Zeus, comme Artémis, son jumeau Apollon, Athéna ou Dionysos. Dans une folle farandole, une orgie de tous les diables, les corps se mélangent et se perdent jusqu’à en perdre la raison.
![Infamous Offspring de Wim Vandekeybus © Wim Vandekeybus](https://www.loeildolivier.fr/wp-content/uploads/2025/02/INFAMOUS-OFFSPRING-pic.-Wim-Vandekeybus.12.png)
Sous le regard du roi et de la reine de l’Olympe, qui apparaissent en vidéo sur un grand écran au-dessus de la scène, la progéniture divine n’en fait définitivement qu’à sa tête. Orgueilleux, colériques, imbus de leur rang, vaniteux, les enfants de cette famille recomposée n’ont pas fini d’en faire voir de toutes les couleurs à leurs parents. Leur seule obsession est de savoir qui entrera au Panthéon et prendra la succession de Zeus. Prêts à tout pour le pouvoir, ils se déchainent, s’aiment, se haïssent, se battent et se violent.
Sous les cieux des dieux
Revisitant la mythologie grecque, Wim Vandekeybus calque les dérives de nos sociétés sur celles des mœurs divines. Sexualisation des femmes, féminicides, comportement guerrier, quête d’identité, volonté de nuire, tout y passe dans une fresque dansée fascinante, hypnotique autant que déroutante. La gestuelle est précise, virevoltante. Le style est reconnaissable : le chorégraphe belge entremêle les grammaires et invite à une transe. Mouvements lents ou plus rapides, en solo ou en groupe, les huit danseurs – tous excellents – se laissent porter par une partition qui se joue des tempos, des synchronisations et des désynchronisations.
Conjuguant habilement les différents arts, de la vidéo à la danse, en passant par la musique ou le théâtre, et s’adjoignant le talent d’artistes internationaux comme Lucy Black, Daniel Copeland ou Israël Galvan, il signe une œuvre fleuve drôle, cruelle, décalée autant percutante que digressive. Narration foisonnante façon soap opéra et esthétisme pop un peu kitsch – les vidéos rappellent Les Éternels de Marvel – sont les forces et les faiblesses de cet Infamous offspring qui offre aux spectateurs l’occasion de côtoyer les dieux et d’en découvrir leur profonde nature humaine.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Infamous offspring de Wim Vandekeybus
Première française le 5 février 2025 à Points communs
Durée 2h environ
Tournée
5 mars 2025 au Théâtre des Salins, scène nationale de Martigues
26 au 28 juin 2025 à La Villette, Paris
19 novembre 2025 au Château Rouge Annemasse
Mise en scène, chorégraphie, réalisation, scénographie de Wim Vandekeybus
Co-création, interprétation – Iona Kewney, Maria Zhi Tortosa Soriano, Lotta Sandborgh, Cola Ho Lok Yee, Samuel Planas, Rakesh Sukesh, Paola Taddeo, Adrian Thömmes, Hakim Abdou Milanao
Interprétation dans le film – Israël Galvan, Daniel Copeland, Lucy Black, Thi-Mai Nguyen, Cola Ho HLok Yee, Iona Kewney, Paola Taddeo, Pieter Desme
Texte de Fiona Benson
Musique de Warren Ellis/Dirty Three, ILA
Son & vidéo live – Schröder
Assistanat artistique, dramaturgie – Margherita Scalise
Costumes d’Isabelle Lhoas
Création lumière de Wim Vandekeybus, Benjamin Verbrugge
Réalisation des décors et conseil – Schröder, Pepjin Mesure et KVS
Régie son & vidéo live de Schröder
Lumières en tournée – Benjamin Verbrugge
Conseils sur la mythologie – Nadia Sels
Bande-annonce d’Infamous Offspring de Wim Vandekeybus © Ultima Vez