Encore une journée divine © Jean-louis Fernandez
© Jean-Louis Fernandez

Encore une journée divine : François Cluzet, follement psy aux Bouffes parisiens 

Après 25 ans d’absence, le comédien remonte sur les planches. Dirigé par Emmanuel Noblet, il donne chair au psychanalyste désaxé et manipulateur du roman de Denis Michelis.

François Cluzet  revient sur scène avec l’intensité nécessaire pour incarner Robert, un psychanalyste et auteur à succès qu’un léger surmenage a conduit à Sainte-Marthe, un établissement psychiatrique aux allures de sanatorium chic. En apparence, tout va bien. Certes, la nourriture est infecte, certains pensionnaires, tout particulièrement ses voisins de chambrée, l’insupportent et l’attitude du personnel médical l’agace profondément. 

Encore une journée divine © Jean-Louis Fernandez
© Jean-Louis Fernandez

Mais de là à le maintenir enfermé entre ces quatre hauts murs gris, impersonnels et terriblement déprimants ? Ridicule. Il se porte comme un charme, d’ailleurs, il le répète sans cesse : il n’a pas grand-chose à faire ici. Un petit tour au soleil lui ferait un bien fou. Mais Robert n’est pas un interné comme les autres : il connaît les règles du jeu. Il sait flatter, manipuler, embobiner – le public compris – et c’est bien là que réside la mécanique subtile du spectacle. 

La mise en scène d’Emmanuel Noblet épouse avec précision la confusion mentale du personnage imaginé par Denis Michelis. L’espace scénique devient une extension de son esprit déraillant, un territoire mouvant où la frontière entre réalité et délire s’efface au fil des monologues. Vérité ou affabulation ? Ironie grinçante ou détresse ? Le doute s’installe insidieusement, faisant vaciller les certitudes du spectateur. 

Robert est-il réellement cet auteur à succès, dont le frère est décédé dans d’étranges circonstances et un peu trop sensible aux charmes de sa belle-sœur ? Difficile à dire, tant il a le don de cacher ses failles avec de grands discours. Mais au fil de la pièce, le masque d’imperturbabilité vacille, des fêlures apparaissent. Victime d’un malentendu ou maître absolu de la manipulation ? Chacun se fera son opinion. 

Si Cluzet ne souligne pas suffisamment les ruptures de son personnage – la partition est particulièrement exigeante – il n’en reste pas moins fascinant. En tension permanente, il joue sur le fil du rasoir, incarnant cet homme qui, à force d’écouter les autres, finit par se perdre lui-même. Entraînant les spectateurs dans ce voyage quasi immersif aux confins de l’esprit humain et de sa folie, l’acteur signe un beau retour sur les planches.


Encore une journée divine de Denis Michelis
Théâtre des Bouffes parisiens
4 rue Monsigny
75002 Paris
Du 25 janvier au 18 avril 2025
durée 1h30 environ

Mise en scène d’Emmanuel Noblet
Avec François Cluzet
Scénographie d’Alain Lagarde
Lumières de Dominique Bruguière
Costumes de Fanny Brouste
Son de Samuel Favart-Mikcha

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