Dans Deux sœurs, Marine Bachelot Nguyen met en parallèle deux récits que les siècles séparent, mêlant l’histoire du Vietnam à celle de sa propre grand-mère. Ainsi le destin des sœurs Trung, héroïnes de l’indépendance face à l’envahisseur chinois il y a deux millénaires, rejoint-il celui de Nhan et Kieû, elles aussi résistantes à leur manière contre le colonisateur français il y a moins de cent ans. Pour sa première mise en scène, Océane Mozas s’empare de ces deux récits et en propose une approche de l’intime, dans une proximité et une sobriété qui servent une narration aussi épique que sensible.
Au sein d’un espace qui ne paie pas de mine – agrémenté d’un bureau, un porte-manteau, une malle et un paravent en guise d’écran de projection –, Océane Mozas convie les spectateurs à partager ce conte qu’elle semble avant tout se narrer à elle-même, comme pour renouer avec sa propre histoire. Car derrière le souhait de mettre au plateau ce texte qui n’est pas le sien, il y a aussi une rencontre, comme une mise en miroir de son propre récit familial. Illustrant sa narration de quelques archives dont elle use avec parcimonie, l’interprète et metteuse en scène transmet surtout un certain goût pour la poésie des mots, quand le langage lui-même se fait obstacle.
Car en dépit de tout l’héritage qui est le leur, Marine Bachelot Nguyen et Océane Mozas se confrontent à une difficulté de taille : celle d’une langue qu’elles ne parlent pas et qui fait pourtant partie de leur construction. C’est précisément en dépit de cette barrière que Deux sœurs se révèle comme une pièce interrogeant la transmission, quelle qu’en soit l’échelle. Passant par les grands récits du Vietnam aussi bien que par les souvenirs familiaux, cette création questionne finalement la manière dont la grande Histoire nous est relatée et comment celle-ci modèle notre rapport au monde qui nous entoure. Dans cette approche, Océane Mozas propose une prestation d’une grande douceur, grâce une mise en scène de l’essentiel qui s’appuie sur des créations lumière et son d’une belle délicatesse.
Peter Avondo – Envoyé spécial à Toulouse
Deux sœurs de Marine Bachelot Nguyen
Du 14 au 23 novembre 2024
ThéâtredelaCité
1 rue Pierre Baudis
31000 Toulouse
Durée 1h
Tournée
27 novembre — 7 décembre 2024 : Plateaux Sauvages – Fabrique culturelle de Paris
10 décembre — 13 décembre 2024 : La Comédie – CDN de Reims
25 janvier 2025 : La Ferme du Buisson – Scène nationale, Noisiel
Conception, écriture et interprétation d’Océane Mozas
Spectacle produit par le ThéâtredelaCité
Collaboration artistique – Igor Skreblin
Son d’Aline Loustalot
Lumières de Philippe Ferreira
Vidéo de Manuel RufiéRéalisation du décor dans les Ateliers de construction du ThéâtredelaCité sous la direction de Michaël Labat
Réalisation des costumes dans les Ateliers du ThéâtredelaCité sous la direction de Nathalie Trouvé
Avec l’aimable collaboration de Georgia Ives
Régie générale : Léo Thevenon, Régie lumière : Sadock Mouelhi, Régie son : Loïc Célestin