Julie Duval © Emmanuel Chandelier
© Emmanuel Chandelier

Julie Duval, une combattante au cœur du théâtre

La jeune et talentueuse comédienne a marié ses deux passions, le théâtre et la boxe thaïlandaise dans L’odeur de la guerre, son très beau seule-en-scène qu’elle joue depuis deux saisons à la Scala de Paris.

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
J’étais en primaire. La maîtresse nous avait emmenés aux arènes de Fréjus assister à un concert-spectacle qui parlait d’écologie. C’était il y a plus de vingt ans et je me souviens de quelques paroles : « Jette à la poubelle tous les détritus ! » C’était génial de pouvoir être à l’extérieur à l’heure des cours.

L'odeur de la guerre - Julie Duval © Thomas O'Brien
L’odeur de la guerre © Thomas O’Brien

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
Une rencontre. J’ai demandé à un garçon que je connaissais un peu ce qu’il faisait dans la vie. Il m’a répondu : « Je suis clown pour les enfants malades à l’hôpital et je fais le cours Florent » Ça m’a intrigué. Quelques mois plus tard, j’étais inscrite au cours Florent et j’y suis restée pendant quatre ans.

Qu’est ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédienne ?
Au cours Florent, j’ai découvert la lecture. J’ai plongé dans d’autres vies que la mienne et j’ai adoré ça. Ensuite, il a fallu incarner ces vies en entrant dans la peau des personnages. J’ai commencé à imiter en cherchant une voix et un corps. Ces moments de recherche théâtrale m’ont rappelé l’enfance. Quand j’étais petite, je jouais avec ma sœur à imiter les grandes personnes. Je crois que c’est surtout ça qui m’a plu, redonner vie à des personnages.

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ?
En tombant sur la pièce Les Choutes de Barillet Grédy à la librairie théâtrale, j’ai eu un coup de cœur pour les personnages de cette histoire. J’ai immédiatement réussi à imaginer chaque membre de ma bande de potes (Pauline Huriet, Camille Tissot, Florian Boulay, Chloé Lorphelin, Romain Forêt, Arturo Perrier et moi-même) dans un des rôles. J’ai donc organisé une lecture avec eux et nous avons passé l’après-midi à nous marrer. C’est à partir de ce moment-là, que j’ai décidé de monter cette pièce pour les travaux de fin d’études au cours Florent.

Nous avons enchaîné avec le festival d’Avignon. C’était intense. J’ai adoré être sur scène avec autant de personnes. Je découvrais la mise en scène, la production… Cette expérience a été formatrice. Grâce à l’insouciance de notre jeune âge, nous avons pris tous les aléas que nous avons rencontrés pendant l’exploitation avec le sourire. Au fil du temps, parce que les financements étant durs à trouver et que d’autres projets s’ouvraient à nous, la fin de l’aventure des Choutes a sonné. J’en garde un très beau souvenir. Mon père a une affiche de la pièce dans sa chambre que nous avons tous dédicacée.

Sainte dans l'Incendie - Laurence Vielle © Giovanni Cittadini Cesi
Laurence Vielle dans « Sainte dans l’Incendie », texte et mise en scène de Laurent Fréchuret, au Théâtre du Ro nd-Point, 2013 © Giovanni Cittadini Cesi

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
C’était au Théâtre du Rond-Point. Je venais d’arriver à Paris. Une copine m’avait refilé deux places pour aller voir le spectacle Sainte dans l’incendie, avec Laurence Vielle, mise en scène par Laurent Fréchuret. Ce soir-là, devant mes yeux il y avait une comédienne seule au plateau qui, pendant une heure, a incarné Jeanne d’arc. La pièce s’est terminée et je n’ai pas arrêté de pleurer. Quelques jours plus tard, j’ai compris que je venais de prendre ma première claque théâtrale. La poésie de Laurence Vielle, tout de cette femme me bouleverse ! Sa voix, son corps, son écriture. Et puis je dirais, aussi, le Théâtre équestre Zingaro de Bartabas. Cabaret de l’exil a été un coup de cœur. Chaque tableau est une peinture.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Il y a quelques années, j’ai fêté mon anniversaire en tête à tête avec Pierre Barillet. J’étais heureuse d’avoir ce vieux monsieur en face de moi, me parlant d’une époque théâtrale que je n’ai pas connue. Juliette Bayi, mon amie, avec qui je travaille sur L’odeur de la guerre depuis plus de trois ans. Élodie Menant, Jules, Nolwenn, Thomas, Rodolphe. Chaque personne avec qui je travaille sur L’odeur de la guerre. Mon conjoint, ma famille, mes amies, mon coach de boxe, mes professeurs de théâtre, mes copines du sud. Toutes les femmes que j’ai rencontrées à travers les cours de boxe.

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
Je dirais plutôt que : ne pas travailler tout le temps me permet de trouver un équilibre. J’ai besoin de faire des pauses dans mon métier. Être avec mes amies, voyager, lire me remplit et me permet d’être pleinement là lorsque je suis en création où sur un plateau de théâtre.

L'odeur de la guerre - Julie Duval © Thomas O'Brien
L’odeur de la guerre © Thomas O’Brien

Qu’est-ce qui vous inspire ?
Dans l’associatif, j’ai rencontré beaucoup personnes aux parcours de vies chaotiques qui veulent s’en sortir et qui se battent pour une vie meilleure. Ce sont des parcours de vies qui me bouleversent et m’inspirent. Il y a quelque temps, je donnais des cours de boxe à des femmes qui avaient vécu le pire. Elles étaient là, devant moi, gants de boxe au bout des mains, prêtes à reprendre possession de leurs corps. C’est cette force qui m’inspire, celle qui vient des tripes.

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
De plus en plus sain, je crois, mais aussi de plus en plus joyeux et ludique.

À quel endroit de votre chair, de votre corps situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Grâce à la boxe, j’ai conscience de chaque partie de mon corps. Je suis connectée à mes mains, à mes jambes, à mon cœur, à mes coudes, à mes yeux. Il n’y plus de dissociation. Si le désir est présent, il passe de la tête aux pieds. Au contraire, si le désir n’est pas là, c’est tout mon corps qui est impacté.

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
J’aimerais travailler avec Léopold Legrand, Tony Gatlif, Emmanuelle Bercot, Joël Pommerat, Philippe Genty, Laurent Fréchuret.

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Jouer Électre de Sophocle.

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
L’odeur de la guerre


L’odeur de la guerreécrit et interprété par Julie Duval
La Scala Paris
13 boulevard de Strasbourg
75010 Paris
Du 22 septembre 2024 au 18 mai 2024
Duré 1h15

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