La salle est plongée dans le noir. Une voix à l’accent chantant du sud entraîne dans son sillage une bande de touristes. C’est celle d’Éliette(Bess Davies), guide de la grotte de Lascaux. Éclairant à la lampe torche d’imaginaires bas-reliefs et autres gravures, elle distille, non sans un humour caustique, tout au long de la visite – presque 2 heures – anecdotes, faits avérés et théories scientifiques. Naviguant comme un poisson dans l’eau dans les méandres de cet antre aux milles secrets, en vraie passionnée, elle sert de liants entre les différents récits qui se télescopent dans cette fresque mi-rupestre, mi-urbaine.
Un Cro-Magnon trop mignon
De l’homme des cavernes (Mathieu Ehrhard), on ne verra que la silhouette vêtue de peau de bête. Loin de l’image d’Épinal véhiculée par La Guerre du feu, ce premier Homo sapiens est doué de raison. Il a traversé les millénaires dans les recoins sombres de la grotte afin de distiller son savoir aux générations futures. Présence décalée, presque surréaliste, il invite à dépasser le cadre et à faire entrer en résonances les trois histoires qui constituent les relations humaines.
Il y a ce père qui tente tant bien que mal d’élever sa fille depuis la mort de son épouse, ce frère et cette sœur que tout sépare, et enfin ces deux jeunes femmes, qui essayent malgré leurs antagonismes de travailler ensemble. Quand rien ne va, que tout semble aller de mal en pis, le dialogue, l’échange devient le seul remède. C’est dans ces interstices, ces cavités que nos maux trouvent parfois leur remède.
L’imaginaire comme terreau de mise en scène
Pensé pour être facilement transportable, le décor, imaginé par Hélène Jourdan, n’est là que pour esquisser par petites touches différents univers, la grotte, bien sûr, mais aussi une chambre d’ado, une galerie envahie par les eaux ou un atelier de restauration, et quelques effets scéniques – fumée dense, clair-obscur, etc. -c’est à l’imaginaire de faire le reste.
Il en va de même pour la mise en scène. Afin de donner corps au texte écrit à six mains par Tom Linton, Olivia Barron et Vincent Toujas, l’épure et une forme de naturalisme onirique suffisent à insuffler à ces récits fragmentés un peu d’épique et d’homérisme. Toutefois, l’ensemble résiste comme si le geste bien que profondément généreux était inachevé, le propos encore en suspens. Conteurs hors pair, les membres du Collectif Os’o habitent l’espace, donnent vie à mille histoires, mais faute d’une dramaturgie resserrée et d’enjeux clairement définis, le propos se perd quelque peu à trop se distendre dans l’anecdotique. Du potentiel, il y en a à revendre, mais il faudra le ciseler, l’affiner pour qu’enfin les mythes de la caverne fassent écho à ceux manquants de nos civilisations contemporaines en proie aux doutes et en quête de repères.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Saint-Brieuc
Caverne d’Olivia Barron, Vincent Toujas et Tom Linton – Collectif Os’o
La Passerelle – Scène nationale de Saint -Brieuc
1 Place de la Résistance
22000 Saint-Brieuc
Tournée
8 au 11 octobre 2024 à Blanquefort dans le cadre du FAB (33)
16 & 17 octobre 2024 au Théâtre de l’Union, CDN duLimousin, Limoges (87)
22 novembre 2024 – Centre Simone Signoret, Canéjan (33)
3 et 4 février 2025 à L’Odyssée, Périgueux (24)
6 février 2025 au Centre Culturel, Sarlat (24)
11 février 2025 au Théâtre Ducourneau, Agen (47)
13 février 2025 au Théâtre Le Liburnia, Libourne (33)
18 février 2025 au Champ de Foire, Saint-André-de-Cubzac (33)
21 février 2025 – M270, Floirac (33)
31 mars & 1 avril 2025 – Théâtre du Champ au Roy, Guingamp (22)
dramaturgie d’Olivia Barron et Vincent Toujas
avec Elsa Bosc, Roxane Brumachon, Bess Davies, Mathieu Ehrhard, Baptiste Girard, Shanee Krön et Tom Linton
scénographie d’Hélène Jourdan
lumières de Jérémie Papin
costumes : Aude Desigaux
création sonore et musique : Martin Hennart
régie générale : Benoit Lepage
production : Coralie Harnois et Fabienne Signat