Descendre le Danube par l’écriture, c’est arpenter un chemin déjà amplement labouré par les auteurs du passé — Victor Hugo, Friedrich Hölderlin, Attila József et bien d’autres ont écrit sur le fleuve qui joint l’Allemagne à la Roumanie, pour se jeter dans la mer Noire. S’aventurer sur ce terrain particulier nécessite de se mesurer plus ou moins à ce passé poétique, d’autant que ce fleuve est tout particulièrement chargé d’histoire.
Mathias Zakhar n’est pas un inconnu. Fidèle de la compagnie le K et de la bande du Moulin de l’Hydre, tant comme comédien que metteur en scène, il présente justement Danube à l’occasion du festival annuel de cette jeune fabrique de théâtre. À la tête de la Cie Kilomètre Zéro, il partage, avec la troupe de Simon Falguières, l’esprit aventurier, la velléité d’amener le théâtre sur un territoire lyrique et volontiers épique, regardant avec une certaine nostalgie l’idée de l’artiste itinérant et la figure sacrée du poète. Il va sans dire qu’il trouve dans ce récit de voyage un terrain propice à l’expression de ce souffle.
Un voyage entre passé et présent
Allemagne, Slovaquie, Serbie, Roumanie : un pays ouvre sur un autre dans ce monologue dense, et l’histoire de l’Europe défile comme un paysage à la fenêtre d’un train. L’horreur du nazisme, le communisme, ses espoirs et ses échecs, se juxtaposent, au présent, à ce qu’est devenu l’esprit des peuples. Écrit comme le journal d’un voyage effectué en 2017, Danube est aussi un retour sur l’histoire familiale de son auteur, bien que le récit de celle-ci reste toujours allusif. Découle de cette matière autobiographique une écriture sensible, où l’intime jaillit dans les détails des décors arpentés, et qui atteint, sur sa route, de belles hauteurs poétiques.
En avant-première au Théâtre du Train bleu en juillet, Mathias Zakhar, seul sur scène, uniquement accompagné (avec talent) par le son d’Hippolyte Leblanc et les lumières de Léandre Gans, s’y montrait comme on le connaît : en comédien habité et passionné. Dans la nuit normande, ce samedi, ce voyage devrait encore gagner en ampleur.
Samuel Gleyze-Esteban
Danube de Mathias Zakhar
Festival du Moulin de l’Hydre
Samedi 7 septembre à 21h
Lumière Léandre Gans
Son Hippolyte Leblanc
Avec Mathias Zakhar
Magnifique voyage poétique ce soir au théâtre de l’hydre
Mercis infiniment Léandre, Hyppolite et toi Mathias
pour l’engagement de tes mots à corps et à cris perdus dans les eaux troubles
du Danube.
J’ai levé la casquette de mon père les yeux embués de bruine commune en vous saluant…Restez émerveillés et emerveillants par ces temps sombres
A nos pères…
Lionel