Alexandre Bierry © DR
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Alexandre Bierry, le théâtre dans le sang

Après avoir incarné avec talent Dorante dans "Le Menteur", le comédien issu d’une grande lignée de gens de théâtre jouera, dès le 17 septembre, le rôle de Christian dans "Cyrano de Bergerac", mis en scène par Alain Sachs.

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Vers quatre ou cinq ans, je suis allé voir ma mère dans Le Faiseur de Balzac avec Jean-François Balmer. La représentation commence. Au bout d’un moment, je demande discrètement : « Elle arrive quand maman ? ». Elle était déjà sur scène depuis cinq minutes mais… très enlaidie pour son rôle, je ne l’avais pas reconnue !

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
Justement, peut-être ce premier souvenir : ne pas reconnaître sa propre mère ! J’ai sûrement senti, intuitivement, que le théâtre pouvait être un lieu d’illusion et de surprise.

Marion Bierry, Stéphane Bierry, Renée Delmas et Etienne Bierry au 30 ans du Poche © Laurencine Lot
Marion Bierry, Stéphane Bierry, Renée Delmas et Etienne Bierry au 30 ans du Poche © Laurencine Lot

Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédien ?
Lorsqu’à l’école, les adultes nous demandaient d’écrire sur un petit papier le métier qu’on souhaitait faire plus tard, j’écrivais déjà « comédien ». Je suis né dans un théâtre [le Poche—ndlr]. J’ai grandi entouré de toutes ces personnes qui, de la billetterie à la régie, de l’administration à la scène, œuvraient à faire naître chaque soir cette magie qu’est la représentation. Je passais des journées entières à jouer dans les coulisses. Le théâtre restera toujours le refuge de mon enfance.

Le premier spectacle auquel vous avez participé et le souvenir que vous en retenez ?
La Ronde de Schnitzler dans une mise en scène de Marion Bierry — celle que je n’avais pas reconnue dans Le Faiseur… Ce spectacle, quoique monté de manière follement drôle, gardait son fond tragique et commençait par une image de mort avec des corps enlacés, dont le mien. J’étais le premier à prendre la parole et à ressusciter. Le soir de la première, à dix-huit ans, je me sentis naître une seconde fois.

Le menteur de Corneille @ Pascal Gely
Le menteur de Corneille, mis en scène par Marion Bierry, avec Anne-Sophie Nallino © Pascal Gély

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Les Noces de Figaro mis en scène par Strehler lors d’une reprise post-mortem, il y a une dizaine d’années à l’Opéra Bastille. Fou de Mozart depuis tout petit, Les Noces étaient déjà mon opéra préféré. Encore une fois, je redevenais un enfant devant tant de beauté.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Il y en tant ! Je vais choisir la dernière. L’année passée, Alain Sachs est venu voir Le Menteur. Il m’a fait part de son enthousiasme à l’issue de la représentation. J’étais très touché. Je me souvenais bien sûr d’avoir vu enfant un de ses spectacles qui m’avait enchanté : La Locandiera de Goldoni avec Cristiana Reali et Pierre Cassignard, qui nous manque tant. Cet hiver, je passe un matin devant une colonne Morris avec l’affiche de la dernière mise en scène d’Alain Sachs. Je me rappelle m’être arrêté et avoir songé devant cette colonne : « Je serais si heureux qu’Alain me propose un jour quelque chose… » Comme par magie, trois heures plus tard, il m’envoie un message : « Es-tu libre à la rentrée 2024 pour jouer Christian dans Cyrano ? » Mon vœu était exaucé. Nous commencerons le 17 septembre au Théâtre Montparnasse avec Arnaud Tsamère dans le rôle-titre.

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
C’est toute la variété de cet art qui me passionne, m’absorbe et m’enchante. Ne pas seulement jouer la comédie, mais connaître la lumière, la régie, la musique, tous les secrets techniques du plateau et partager ce bonheur d’être ensemble.

Quest-ce qui vous inspire ?
La poésie d’un texte. Qu’il soit comique ou tragique, contemporain ou classique. Celle aussi d’une musique, d’un éclairage, d’un costume, d’un décor…

© Ben Dumas
Les Romanesques d’Edmond Rostand, mis en scène par Marion Bierry avec Sandrine Molaro © Ben Dumas

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Un rapport qui tient du sacré. Le théâtre étant ma seule religion, la scène est mon lieu de culte. L’émotion que je ressens en montant sur un plateau est immense. Elle l’est tout autant qu’il y ait du public ou que la salle soit complètement vide ; comme ces matins où l’on arrive le premier à une répétition. Le silence d’un théâtre endormi est bruit magique.

A quel endroit de votre chair, de votre corps situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Au cœur. C’est lui qui s’emballe un soir de première — théâtrale ou amoureuse…

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Avec tous ceux que j’aime et tous ceux que je ne connais pas encore.

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
J’aime chanter. J’aime jouer au piano sur une scène. Alors peut-être une comédie musicale où je pourrais faire des claquettes en jouant du piano debout.

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
Singing in the rain ! Ne jamais se prendre au sérieux — notre art est de jouer. Et croire au soleil au plus fort de l’orage.


Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand
Théâtre Montparnasse
31 rue de la Gaîté
75014 Paris
Du 17 septembre au 15 décembre 2024

Durée estimée 1h30

Mise en scène d’Alain Sachs
Avec Arnaud Tsamère, Camille Favre-Bulle, Maud Le Guénédal, Alexandre Bierry, Alexis Desseaux, Jean-Pierre Malignon, Bruno Paviot, Vincent Remoissenet, Benoît Tachoires, Loïc Trehin.
Collaboration artistique Corinne Jahier
Décors de Pauline Gallot et Alain Sachs
Costumes de Jean-Daniel Vuillermoz
Musicienne Laure Ménard ou Catherine Paillot
Lumières de Denis Koransky
Combats Philippe Maymat

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