L'extraordinaire destinée de Sarah Bernhardt - Géraldine Martineau © Fabienne Rappeneau
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Sarah Bernhardt retrouve les planches et sa splendeur

L’année 2023 célébrait les cent ans de la mort de « la Divine », première star internationale. 2024 sera l’année de sa renaissance, par la grâce de Géraldine Martineau et Estelle Meyer.

Sarah Bernhardt est toute à sa place dans ce splendide écrin qu’est le théâtre du Palais Royal. Les ors et les velours lui vont si bien, et elle est ici en famille ! Le directeur du théâtre, Sébastien Azzopardi n’est autre que l’arrière-petit-fils de sa petite-fille. La comédienne y a joué en son temps et elle y rayonne encore depuis 2016 dans le Edmond d’Alexis Michalik.

L'extraordinaire destinée de Sarah Bernhardt - Géraldine Martineau © Fabienne Rappeneau
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Consciente que, si son nom raisonne encore aujourd’hui, peu de gens savent vraiment qui elle était, Géraldine Martineau démarre sa pièce par ces mots assez cocasses : « Mon nom vous dit peut-être quelque chose parce qu’on m’a donné un rôle d’aventurière dans Lucky Luke ! » Elle la termine par un brillant monologue. Celui-ci définit fort bien la personnalité de celle que l’on peut considérer comme une des premières féministes : « Quand je déroule le film de ma vie, il y a quelques trous noirs, mais je vois surtout des images joyeuses et colorées… Soyons libres et insoumises, Quand même ! Ne nous résignons jamais ! »

Entre le prologue et la tirade finale, l’autrice va dérouler, tel un beau livre d’images, L’Extraordinaire Destinée de Sarah Bernhardt. Entre sa naissance (1844) et sa mort (1923), le monde ne cesse sa marche vers le progrès, causant ainsi ses malheurs, les guerres (1870, 1914-1918), le patriarcat, l’antisémitisme… La petite Juive, mal aimée de sa mère, va passer du XIXe au XXe siècle avec panache, en créant sa propre légende, inventant de nouveaux codes dramatiques et sociétaux. La rousse flamboyante n’en faisait qu’à sa tête ! Pas facile de retranscrire en 1h45 cette dense vie. Avec un certain parti pris, Géraldine Martineau a ciselé son histoire, retranscrivant les événements marquants. Comme dirait le Cyrano de son ami Edmond Rostand : ce résumé de vie peut paraître un peu court ! Mais Sarah était une femme complexe dans une société qui l’était tout autant.

L'extraordinaire destinée de Sarah Bernhardt - Géraldine Martineau © Fabienne Rappeneau
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Il est certain que l’on attendait avec impatience la comédienne qui allait personnifier ce « monstre sacré ». L’artiste polymorphe Estelle Meyer est une belle découverte. Quel talent ! Cette brune est aussi incandescente qu’une rousse ! L’actrice, qui chante aussi divinement, fait corps avec son personnage. On n’est pas dans la représentation mais véritablement dans l’incarnation, celle d’une femme qui va jusqu’au bout de ses idées, de ses rêves, de ses caprices…

La pièce de Martineau est une ode au théâtre populaire, qui divertit mais aussi instruit. Sa mise en scène est un enchaînement de tableaux qui donne un rythme fou au spectacle. Les costumes de Cindy Lombardi et la scénographie de Salma Borde sont remarquables. Et puis il y a la troupe ! Dans un tourbillon, Marie-Christine Letort, grandiose, Isabelle Gardien, épatante, Blanche Leleu, formidable, Priscilla Bescond, délicieuse, Adrien Melin, extraordinaire, Sylvain Dieuaide, ineffable, et l’impeccable Antoine Cholet font vivre plus d’une trentaine de personnages — et pas des moindres. Les musiciens Florence Hennequin et Bastien Dollinger les accompagnent en direct. Les chansons composées par Simon Dalmais et Estelle Meyer sont de toute beauté. Surtout celle sur la mort de la petite sœur, qui arrache des larmes.

Plus que jamais, l’expression « ne fais pas ta Sarah Bernhardt » trouve son sens, car on a toutes emprunté quelque chose à cette femme qui a changé la manière de voir et de penser le monde.


L’extraordinaire destinée de Sarah Bernhardt, texte et mise en scène de Géraldine Martineau
Théâtre du Palais Royal
38 rue Montpensier
75001 Paris
Du 27 août au 31 décembre 2024
Durée 1h45

Avec Estelle Meyer, Marie-Christine Letort, Isabelle Gardien, Blanche Leleu, Priscilla Bescond, Adrien Melin, Sylvain Dieuaide, Antoine Cholet, Florence Hennequin, Bastien Dollinger
Scénographie de Salma Bordes

Lumière et vidéo de Bertrand Couderc
Costumes de Cindy Lombardi
Composition musicale de Simon Dalmais
Chanson d’Estelle Meyer
Chorégraphie de Caroline Marcade
Perruques et maquillages de Judith Scotto
Son d’Antoine Reibre
Collaboration artistique Sylvain Dieuaide
Assistante Elisabeth Calléo
Texte édité à L’avant-scène théâtre

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