Mélissa Guex © Yuri Pires Tavares
Mélissa Guex © Yuri Pires Tavares

Mélissa Guex, la danse dans le sang 

Après un passage à Programme commun à Lausanne, l’artiste vaudoise survoltée fait l’ouverture du festival Paris l’Été avec "Down (full album)", en compagnie de l’excellent batteur Clément Grin.

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Je me souviens des spectacles de la compagnie Karl’s kühne Gassenschau. Ils s’installaient dans les carrières de Saint-Triphon, en Suisse, avec des décors immenses. Je garde en mémoire la pyrotechnie, la batterie qui sortait de l’eau, et les cascades complètement folles. C’était le rendez-vous familial de l’été. J’y suis retournée il y a quelques années, mais cela n’avait plus rien à voir… 

Quel déclencheur vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ? 
Au départ, ce n’est pas seulement une question d’envie, mais aussi de chance, de privilèges et d’opportunités. Passer telle audition, être prise ici ou là après avoir raté les autres. La première fois que j’ai eu un oui, j’ai foncé. Et j’ai découvert en cours de route ce que je choisissais et ce dont j’avais réellement envie. 

Down (full album) de Mélissa Guex © DR
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Qu’est ce qui a fait que vous avez choisi d’être danseuse et chorégraphe ? 
J’aime les mots, mais ce que je retrouve et ressens dans le mouvement est incomparable. C’est comme si j’avais accès à un langage par lequel communiquer avec le monde. J’ai eu envie d’en apprendre toujours plus, et d’explorer encore et encore cette langue infinie. 
Le rapport au corps et à l’espace me passionne, et les rencontres que je fais à travers cette pratique sont vraiment belles. 

Le premier spectacle auquel vous avez participé, et le souvenir que vous en retenez ?
Je me souviens de mon premier rôle. Je devais avoir neuf ans et j’interprétais une enfant qu’un magicien avait transformée en marionnette à fils. J’étais transportée dans une caisse en osier au début du spectacle. Et cette caisse, je l’ai encore chez moi, c’est devenu ma caisse de costumes. 

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Je pense à deux spectacles : d’abord Carte noire nommée Désir de Rebecca Chaillon. J’ai rarement vu une team si grande et puissante dans spectacle si grand et puissant. En second, (M)imosa or Twenty Looks or Paris is Burning at The Judson Church (M), avec Cecilia Bengolea, François Chaignaud, Trajal Harrell et Marlene Monteiro Freitas.
Je l’ai vu au Festival d’automne à Paris l’année dernière seulement — c’est une pièce de 2011 !
C’est la plus belle claque et leçon de performance que j’ai jamais reçue. Une claque donnée par des maestro. Impressionnant ! J’étais très heureuse et excitée de le voir en vrai. 
Après avoir vu ça, je me suis dit : tout est possible ! Et j’ai compris pourquoi j’aimais ce métier. 

Down (full album) de Mélissa Guex © DR
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Quelles sont vos plus belles rencontres ? 
Il y en a tellement, et c’est ce qui me fait fleurir dans ce milieu. Je peux en citer certaines, qui sont souvent liées avec des instants de vies. Charlotte Vuissoz c’est la musicienne avec qui je collabore dans tous mes projets. J’étais chanceuse de me retrouver confinée pendant la période du Covid dans la même maison qu’elle. Géraldine Chollet, chorégraphe danseuse et tendre amie, qui m’emmène dans son travail et nos échanges vers une spiritualité et une façon tendre de regarder le monde. Katerina Andreou, mon coup de cœur de cette année avec laquelle je collabore dans sa première pièce de groupe : Bless this mess. Un coup de foudre artistique ! Augustin Rebetez, un ami, artiste qui m’a toujours encouragée à faire confiance dans mon art de façon brut et assumée. Et surtout, toutes les autres rencontres qui ne sont pas dans ce milieu et qui me permettent d’ouvrir d’autres modes de pensées, en restant connectée à l’essentiel. 

En quoi votre métier est-il essentiel à votre équilibre ? 
Je me dis souvent pour rire que si j’étais une star du rock, je me serai peut-être perdue dans la nuit et dans la fête.
Ici, j’ai le corps comme arbitre et comme gardien. Un corps avec lequel je deale les limites et les possibles. J’ai une grande soif d’aventures, de sensations fortes et un esprit curieux qui peuvent m’emmener partout. Je sais que pour y aller, et pour continuer, je dois aussi donner du temps pour le repos, le soin, et mon entourage : ces ingrédients essentiels pour trouver l’équilibre tant recherché. 

Down (full album) de Mélissa Guex © DR
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Qu’est-ce qui vous inspire ? 
Les gens avant tout. Les gens et leur rapport au monde. Le son, la musique et la composition dont je suis éperdument amoureuse. Et le Luna Park ! Je peux dire que je pratique une forme de polyamour entre ces différents éléments. 

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Je vois la scène comme un lieu de possibles, un temps suspendu pour un instant de partage ou un coup de gueule. La performativité fait partie de ma pratique, avec ou sans public. J’utilise la transformation comme un caméléon à travers le costume, le make up, et le mouvement. J’aime les risques, les enjeux, et la tension qui sont uniques à la scène.

À quel endroit de votre chair, de votre corps situez-vous votre désir de faire votre métier ? 
Je dirais dans le bas ventre, au niveau des tripes. Je parle souvent de feu qui bouillonne à l’intérieur, prêt à exploser. 

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ? 
Je pense que j’ai encore de belles rencontres à faire et des collaborations encore inconnues. C’est ce qui rend la suite excitante. Tant des artistes sonores ou visuels que d’autres chorégraphes. 

À quel projet fou aimeriez-vous participer ? 
J’avoue que je ferais bien un projet avec beaucoup de pyrotechnique un jour dans ma vie. Quelque chose qui explose pour de vrai, dans tous les sens.

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
J’irai chercher une œuvre musicale. Certainement un mix de tracks entre de la soul qui fait des frissons dans le dos, un BPM accéléré, mélangé à un son électronique assez dark venu des bas-fonds. Quelque chose qui s’écouterait à l’heure où le soleil se lève et la fête se termine.


Festival Paris l’Été
du 3 au 16 juillet 2024
Lycée Jacques-Decour
12 avenue Trudaine

75009 Paris

Down (full album) de Mélissa Guex
vu à Lausanne en mars dernier dans le cadre de Programme Commun
présenté le 3 et 4 juillet 2024 au Gymnase à 18h


Concept, direction et performance – Mélissa Guex
Création musicale et performance – Clément Grin
Accompagnement à la mise en scène et dramaturgie – Bast Hippocrate
Diffusion sonore – Charlotte Vuissoz
Scénographie et costumes de Lucie Meyer
Création lumière de Justine Bouillet

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