Comment avez-vous rencontré Silvia Gribaudi ?
Claudia Marsicano : Nous nous sommes rencontrées en 2016, lors d’un atelier pour un projet qui n’a jamais vu le jour. Elle est tombée amoureuse de mon « dos flexible », et moi de son énergie. Quelque temps plus tard, elle m’a appelée et m’a demandé si je voulais faire R.OSA. Au début, j’étais assez partagée. Je suis actrice, pas danseuse. J’ai fini par mettre de côté mes peurs et mes doutes. C’est certainement la meilleure décision de ma vie.
Quelle est la genèse du spectacle ?
Claudia Marsicano : Silvia a voulu travailler sur le concept de virtuosité, en tout cas pour mettre en lumière que cela ne concerne pas exclusivement le chant ou la dextérité à jouer d’un instrument. Ce qui l’intéressait, c’est de montrer que finalement, chacun de nous a des talents plus ou moins canoniques. Qu’en travaillant, en cultivant des arts ou des pratiques qui nous sont propres, on peut tous devenir des virtuoses. L’important, c’est l’exercice et l’entraînement.
Comment avez-vous travaillé ensemble ?
Claudia Marsicano : Silvia a créé ce spectacle spécialement pour moi. Pour ce faire, elle a dû apprendre à me connaître profondément. Du lien qui s’est créé ont découlé un certain nombre d’exercices, de moments hors répétitions, comme des dîners en tête-à-tête, des trajets en train, des face-à-face au cours desquels elle a saisi des morceaux de moi, des bouts invisibles à l’œil nu. De toute cette matière, elle a façonné un spectacle qui me ressemble.
R.OSA évoque le rôle social du corps de la femme, sa représentation dans la société. Pourquoi ce type de spectacle est-il nécessaire ?
Claudia Marsicano : Le monde a régressé ces derniers temps et tous les petits progrès sociétaux que nous avions réalisés de haute lutte sont en danger. C’est pourquoi qu’aujourd’hui, je crois que tout spectacle dans lequel une femme récupère son espace est nécessaire.
Sur scène, vous êtes époustouflante. Où trouvez-vous cette énergie ?
Claudia Marsicano : Il arrive que certains jours je n’en aie pas envie, mais ce qui me recharge toujours, c’est la relation avec le public ! R.osa est un pas de deux : je suis peut-être seule sur scène, mais sans l’énergie que les gens me donnent à chaque représentation, je n’y arriverais pas.
En brisant le quatrième mur, vous obligez le spectateur à devenir acteur, à changer de point de vue, afin de tordre certains préjugés. Quel est votre secret, votre force, pour que toute la salle se lève et vous suive dans votre proposition ?
Claudia Marsicano : Je ne pense pas que cela ait à voir avec la force. En fait, je pense que tout est une question de vulnérabilité. Sur scène, je suis seule, à moitié nue, dans un pays étranger, les gens sympathisent avec moi. En faisant ce que je leur demande, ils prennent soin de moi, comme quand on joue avec un enfant. Les gens sont bien meilleurs que ce que l’on pense, et cette série me le prouve à chaque fois.
Pourquoi Toxic de Britney Spears ?
Claudia Marsicano : C’est l’une de mes chansons préférées ! C’est pour la même raison que je chante Jolene au début du show : rien à voir avec les paroles de la chanson, c’est juste que je l’adore !
Qu’aimeriez-vous dire au public qui vient vous découvrir, au-delà du spectacle ?
Claudia Marsicano : Que cette pièce fait partie de moi, mais ce n’est pas moi. Je suis bien plus. Je peux être très incertaine, douter de moi. Certains jours, j’ai du mal à sortir du lit. Mais pour apprécier la lumière, j’apprends à embrasser l’obscurité, et c’est pour moi la beauté d’être un humain.
Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
R.OSA – 10 esercizi per nuovi virtuosismi de Silvia Gribaudi
Découvert en mai 2023 au Passages Transfestival de Metz
durée 55 min environ
Tournée
5 juin au Festival La Maison Danse, Uzès
5 au 7 juillet 2024 au Lycée Jacques Decour, Festival Paris l’Été
Concept, chorégraphie et mise en scène de Silvia Gribaudi
avec Claudia Marsicano
Lumières de Leonardo Benetollo
Costumes d’Erica Sessa
Conseillers artistiques d’Antonio Rinaldi, Giulia Galvan, FrancescaAlbanese, Matteo Maffesanti