En cette soirée d’inauguration du Festival à vif, le temps était aux couleurs d’un printemps normand, gris pluie mâtiné d’éclaircies, ce qui n’a pas empêché les jeunes de prendre part au défilé qui lançait les festivités. Après les Métamorphoses, titre de l’édition passée, place aux Chants de batailles. Lors du discours inaugural, Lucie Berelowitsch souligne que « chacun des spectacles traitera à sa manière des chants que l’on porte, des batailles que l’on mène, avec soi et avec le monde pour se construire ».
Ce festival, « c’est dix jours de fêtes, de rencontres, avec les artistes, entre amateurs et spectateurs. Un temps privilégié où les adolescents et les adultes peuvent découvrir, partager, jouer la création contemporaine sous toutes ses formes, et dialoguer ensemble au travers du théâtre et de leurs convictions. » Cette édition, qui présente « cinq spectacles traversés donc par une thématique commune, mais aux esthétiques plurielles : théâtre documentaire, danse, récit intime, stand up musical… », démarre sous les chapeaux de roues avec un spectacle de toute beauté dans lequel la jeunesse à eu plus que son mots à dire.
Une odyssée poétique et contemporaine
Vive le collectif
Ce qui impressionne tout de suite, ce sont tous ces jeunes arrivant sur le plateau. Il n’y a rien de brouillon, de fragile, de maladroit dans leurs déplacements. Leur sérieux est impressionnant et l’image est saisissante. Ce sont trente-six silhouettes, trente-six voix formant un ensemble parfait pour faire entendre leurs mots, leurs questionnements, leurs rêves… Accompagnés, et non encadrés, par Louis de Villers, Sonia Bonny et Lola Roy, les gamins ne cessent de nous surprendre. On retiendra, dans toutes ces belles propositions artistiques, la réjouissante scène avec les petits vieux. Leur travail sur le masque et le corps est absolument remarquable et si drôle !
Si la nature est au centre de ce spectacle, représenté dans l’un par le cœur de la forêt et l’autre par l’idée de la montagne à gravir, l’adolescence en est son rayonnement. Car ils sont ceux qui construiront demain et c’est pour cela qu’ils font battre Le coeur de la terre. Simon Falguières, ayant préservé une partie de son âme d’ado, fait surgir d’un long et beau poème lyrique des questions qui amènent à réfléchir sur ce fameux sens de la vie, qui a emballé les festivaliers, toutes générations confondues. Bravo ! Après Vire, ils iront au Moulin de l’Hydre puis aux mythiques Amandiers de Nanterre.
L’Odyssée intime de l’exil pour évoquer l’universel
L’autre particularité de ce festival est les petites formes présentées dans divers lieux dont les lycées. Entourés de lycéennes et lycéens en option théâtre, nous avons assisté, à 10 heures du matin, dans la salle de spectacle du Lycée Jean Mermoz, à la très jolie prestation de Leïla Anis, Fille de…
Partant de son propre vécu, la comédienne a écrit en 2013, comme pour se libérer, ce très beau texte qui aborde l’exil, le métissage, l’intégration, la condition de la femme, mais aussi l’apprentissage de la vie, la création théâtrale, l’art dramatique, la folie, l’affirmation de soi… Ce bel envol est une recréation, mis en scène avec originalité et poésie par Justine Bachelet (nommée dans la catégorie révélation féminine aux Molières 2024, pour sa prestation dans le spectacle d’Ivo van Hove, Après la répétition/Persona). S’inspirant du théâtre d’objets, chaque chapitre de cette histoire passionnante se laisse entendre et voir sans temps morts. Les échanges lors du bord plateau furent intenses. Et c’est sous le soleil, que l’on a repris le chemin de la gare.
Marie-Céline Nivière
Festival à vif 2024
Le Préau
Place Castel
14500 Vire
Du 21 au 28 mai 2024.
Le cœur de la terre, texte et mise en scène de Simon Falguière
Du 21 au 28 mai 2024
Le Préau
Durée 1h30.
Tournée :
25 mai 2024 au Moulin de l‘Hydre à St Pierre d’Entremont (61).
8 juin 2024au Théâtre Nanterre-Amandiers (92).
Collaboration artistique Louis de Villers
Avec Sonia Bonny et Lola Roy – comédiennes permanentes au Préau, Louis de Villers, treize adolescent·e·s de Vire et du bocage (Calvados), vingt-quatre élèves d’une classe de Terminale du Lycée la Tournelle de Garenne-Colombes (Lycée professionnel – section numérique) (Hauts-de-Seine).
Lumières Léandre Gans.
Création sonore Hippolyte Leblanc.
Costumes Lucile Charvet et Lola Guillain.
Accessoires Alice Delarue.
Fille de… texte et interprétation de Leïla Anis.
Lycée Jean Mermoz
Du 21 au 28 mai 2024.
Durée 55 mn.
Mise en scène et scénographie de Justine Bachelet.
Conception des personnages miniatures de Cécile Paysant et Justine Bachelet..
Décor Morven Bouget et Olivier Bachelet.
