La robe de mariée - Conti © Alain Bron
© Alain Bron

« La Robe de mariée » cousue au fil de l’émotion

À l'Essaïon, Marie-Catherine Conti fait résonner la voix intérieure de Marguerite Sirvins, artiste enfermée à l'hôpital psychiatrique de Saint-Alban au milieu du vingtième siècle, dans une remarquable adaptation du texte de Katherine L. Battaiellie.

Marguerite Sirvins est née en 1890 en Lozère. La vie était trop grande pour cette jeune fille internée à 41 ans pour troubles schizophréniques. Jusqu’à sa mort en 1957, elle broda une robe qu’elle destinait à sa noce imaginaire. En résulta un véritable chef-d’œuvre d’art brut qu’il est aujourd’hui possible d’admirer à Lausanne, dans la Collection de l’art brut de Jean Dubuffet.

Marguerite, c’est la cousine de Séraphine et de Suzanne, ces femmes que la déraison a poussé à réaliser des choses admirables, sans qu’elles en soient pleinement conscientes. Leurs fragilités psychiques les avaient rendus étrangères au monde. Enfermées dans des conditions difficiles, elles subissaient le manque de soin, le dénuement moral, affectif et matériel, le froid, la faim, les harcèlements, les moqueries… Marguerite s’est accrochée à une idée fixe, le mariage qui l’aurait sauvée de cet emprisonnement. « Il me trouvera ayant longtemps marché comme une princesse abandonnée dans son château et j’aurai déjà revêtu ma robe de mariée, sinon, comment me reconnaîtrait-il ? Et je serai prête ».

Il n’y a pas de logique aux divagations de Marguerite et pourtant, tout au long de ce dialogue intérieur, on suit le cheminement de sa douleur, de ses peurs mais aussi de ses petits plaisirs. Marie-Catherine Conti, avec ses cheveux courts, son visage presque enfantin, donne magnifiquement vie à cette femme brisée. Son jeu solide est bâti sur la sincérité des sentiments. Dans cet écrin de pierre de la salle du théâtre de l’Essaïon, accompagné par la musique de la violoncelliste Lucie Lacour, les lumières de Christian Palligiano et la collaboration artistique de l’académicienne Danièle Sallenave, son spectacle porte de bien belles nuances. Et comme Marguerite en dit aussi beaucoup sur le sens de la vie et la place de la femme dans la société, l’émotion est au rendez-vous.


La Robe de mariée de Katherine L. Battaiellie
Théâtre de l’Essaïon
6 rue Pierre-au-Lard
75004 Paris
Jusqu’au 6 juin 2024
Durée 1h10

Conception et jeu Marie-Catherine Conti
Collaboration artistique de Danièle Sallenave de l’Académie Française
Musiques de Jean-Christophe Rosaz et Lucie Lacour
Scénographie et lumières de Christian Palligiano
Costumes d’Isabelle Huchet
Sur une idée de Chris Berna

La robe de mariée – Marie-Catherine Conti © Cie du Lac Majeur

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