Dans Le Premier Sexe ou la grosse arnaque de la virilité, Mickaël Délis était parti de la fameuse phrase d’Erasme qui disait « on ne naît pas homme, on le devient ». Avec La fête du slip ou Le pipo de la puissance, titre très explicite, il aborde tous les malentendus qui persistent autour de la virilité et qui ont servi de base au patriarcat.
Les garçons naissent avec cette petite chose entre les jambes. Cela leur permet de faire pipi plus loin que certains de leurs copains et surtout plus loin que les filles ! Plus, tard, ils apprennent que cela va leur servir à faire l’amour et des enfants. Le premier malentendu est mis en place. On a dit aux hommes que d’avoir cette petite différence allait les rendre les maîtres du monde. Tout plein de stéréotypes ont été alors mis en place pour déstructurer la bonne marche des relations humaines.
Qu’est qui fait le mâle sans faire de mal ?
Pour aborder le rapport entre les hommes et leur sexe, Mickaël Délis est parti d’un sujet qu’il connait bien : lui-même. Ce quadragénaire à la gueule d’ange et à l’émotion à fleurs de peau reconnait être un obsédé du sexe. Il accumule les conquêtes, d’un soir le plus souvent et toujours masculine. Cela lui procure une jouissance parce qu’ainsi il a le sentiment d’être un conquérant.
C’est carrément une névrose, une « affection caractérisée par des troubles affectifs et émotionnels sans cause anatomique, et intimement liée à la vie psychique du sujet ». Donc si c’est une maladie, c’est que cela se soigne ? Mais pour cela, il faut comprendre d’où elle vient. Il va donc chercher pourquoi l’importance quasi obsessionnel de sa taille et de sa forme (dans le sens de la performance) a tant obnubilé l’homme, qu’il soit hétéro ou homo… Partant du personnel, il va toucher l’universel et atteindre son but, repenser la masculinité en la débarrassant des carcans du patriarcat et de tous les clichés qui vont avec.
Une mise en boîte parfaite
S’il s’adresse souvent au public, il n’en n’oublie pas pour autant la théâtralité, en convoquant de nombreux personnages qu’il interprète avec grand talent. On retrouve les personnages centraux, comme sa mère (figure très caubérienne), son père et son jumeau de frère, les axes fondamentaux de sa construction. Médecins, thérapeutes, les membres d’un centre d’addiction sexuelle, ses amants, son agent, le virus du VIH et le metteur en scène Jean-François Sivadier vont surgir pour illustrer son histoire.
On rit beaucoup à l’écoute de cette exploration qui remet les choses à leur place. L’émotion passe lorsqu’il aborde ses failles qui sont finalement très familières. Arriverons-nous à cette réconciliation qui fera qu’on l’on apprendra à conjuguer au mieux le verbe aimer ? Avec pour seuls accessoires de tubes néons, qui se transforment tour à tour en génome X, en ciseaux, en cuisine, ou téléphone, la mise en scène, co-signée par l’artiste et le grand Papy de Trappes, est une grande réussite. C’est donc avec impatience que l’on attend le troisième volet de cette trilogie nommée « La rencontre du troisième type », prévue en 2025. Le rendez-vous est pris.
Marie-Céline Nivière
La fête du slip, de et par Mickaël Délis
Festival Off Avignon
Avignon-Reine Blanche
16 rue de la Grande Fusterie
84000 Avignon.
Du 3 au 21 juillet à 21h45, relâche les 8 et 15 juillet.
Durée 1h15.
Théâtre de La Reine Blanche
2 bis Passage Ruelle
75018 Paris.
Du 7 mai au 14 juin 2024.
Co-mise en scène de Papy.
Collaborations artistiques de de Vladimir Perrin, David Délis, Elise Roth, Clément Le Disquay et Romain Compingt.
Lumières de Jago Axworthy.