Je vis dans une maison qui n'existe pas de Laurène Marx © Lou Respinger
© Lou Respinger

Laurène Marx au cœur des troubles dissociatifs

Après avoir évoqué sa transition dans “Pour un temps sois peu”, l’artiste non-binaire plonge, avec “Je vis dans une maison qui n'existe pas”, au plus profond de la psyché et porte au plateau, dans un conte contemporain, le récit d’un personnage neuroatypique.

À Théâtre Ouvert, Laurène Marx fait carton plein. Son écriture, si reconnaissable, entre rage, punchlines bien senties et poésie brute, a l’art de saisir le public, de l’embarquer sur les chemins de pensée et les émotions de son autrice. Sa grande force, devenue une vraie marque de fabrique, ses adresses directes, crues, sans concession, font de sa prose un acte politique et militant, de ses textes des odes à la différence loin des paradigmes normés de nos sociétés patriarcales. 

Plongeant sans réserve dans la psyché de Nikki, une jeune femme trans non-binaire, souffrant de troubles dissociatifs de la personnalité, Laurène Marx donne vie au plateau aux démons et aux fantômes qui la hantent, la troublent, la font parfois dérailler. Ainsi, pour se protéger de ce trouble qui l’empêche de gérer sa colère, elle a fait de son corps une maison imaginaire dans laquelle cohabitent Madame Monstre, les Tout-Petits et Nuage le Nuage. Face à cette colonne de rage qui est en train de la submerger, elle convoque tout ce petit monde pour qu’il l’aide à retrouver son calme et ainsi se libérer de ses propres chaînes mentales. 

S’éloignant de la forme stand-up qu’elle avait adopté pour parler du genre, de son rapport complexe au féminisme, de sa guerre contre le patriarcat crasse, de la difficulté à fuir une binarité imposée par la société, Laurène Marx affine son jeu et la maîtrise de son image, de sa présence scénique. Plus ancrée au plateau, elle insuffle à son texte une intensité tellurique que cisèlent parfaitement les lumières savamment créées de Kelig Lebars. Plus affirmée, l’autrice campe ce double d’elle-même dont elle se détache peu à peu pour en faire un personnage d’(auto)fiction à part entière. 

Seul petit bémol à ce beau tableau, les coupes importantes opérées déstructurent l’œuvre originelle. Le fil tenu dans les méandres de cet esprit aux bords d’une folie maîtrisée se perd par moment sans jamais tout à fait se retrouver. Il ne sert à rien de bouder son plaisir, Laurène Marx sort petit à petit de sa chrysalide et révèle à chaque projet un peu plus de son grand talent. Elle est sans contexte une artiste à part entière ! 


Je vis dans une maison qui n’existe pas de Laurène Marx
Théâtre ouvert 
159 Avenue Gambetta
75019 Paris
jusqu’au 16 avril 2024
Durée 1h

Tournée
4 juin 2024 au Festival Chahuts – TnBA – CDN Bordeaux
6 et 7 juillet 2024 au Festival de la Cité – Lausanne 
14 ou 17 août 2024 au Far Festival – Nyon
22 et 23 novembre 2024 au Théâtre Sorano – Toulouse
du 2 au 6 décembre 2024 au Théâtre national de Strasbourg 
du 12 au 14 mars 2025 à l’Université de Lille 
29 et 30 avril 2025 au Quai – CDN Angers
 

Texte et mise en scène de Laurène Marx
éd. blast, parution le 19 avril 2024
Assistanat à la mise en scène – Jessica Guilloud
Collaboration artistique – Fanny Sintès
Avec Laurène Marx
Création sonore de Nils Rougé
Lumières de Kelig Lebars
Régie lumières – Gabrielle Marillier

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